dimanche 19 janvier 2025

Diana di Rosa (1602-1643)

 

Diana di Rosa (1602-1643)
Sainte Agathe – vers 1630
Huile sur toile, 61 x 52,5 cm
Collection particulière (vente 2020)


Diana di Rosa est probablement née à Naples en 1602. On sait qu’elle était la fille d’un peintre, Tommaso di Rosa et que sa mère s’appelait Caterina di Mauro. Elle avait un jeune frère, Franscesco, dit Pacecco, né en 1606.

On dispose de peu d’informations fiables concernant celle qu’on a longtemps appelée Annella di Massimo, sur la foi d’un chapitre du tome 3 du Vite dei Pittori, Scultori, ed Architetti Napolitani (Google Book, p.259), intitulé « Vita di Anna di Rosa, dette Annella di Massimo pittrice », de Bernardo De Dominici (1683-1759), un historien d’art spécialiste du baroque napolitain qui ne manquait pas d’imagination.

Je ne développe pas, sauf pour préciser que ce prénom d’Annella vient probablement du surnom « Daniella », mal compris par le biographe.

L’année de la naissance de Diana, son père, Tommaso, avait accueilli dans son atelier un certain Gaspare Del Popolo, lequel épouse en 1610 la sœur de Caterina, Isabella di Mauro. La même année, Tommaso meurt ; Caterina se remarie deux ans plus tard avec Filippo Vitale (1585-1650), peintre caravagiste napolitain. J’ai trouvé ces informations dans une étude précise et documentée.  (Giuseppe Porzio, « Ordine teatino e contesto artistico napoletano nel Seicento : Gaspare Del Popolo e una nota su Diana Di Rosa », Chierici regolari teatini le colonne del decumano, p.595-622)

Diana avait dix ans lors du remariage de sa mère, il n’est donc pas incongru de penser que c’est avec Filippo Vitale qu’elle a accompli sa première formation, tout comme son frère Pacecco, un peu plus tard.

 

Filippo Vitale (1585-1650)
Saint Pierre délivré de prison par un ange – vers 1620
Huile sur toile, 129 x 154 cm
Musée d’Arts de Nantes


Mais elle connaissait aussi, depuis son enfance, le peintre Gaspare Del Popolo, mari de sa tante. Et celui-ci l’embauche, par contrat, pour travailler dans son atelier, en novembre 1621.

En janvier de la même année, Del Popolo a également recruté un jeune homme, âgé de quatorze ans, Agostino Beltrano, lequel avait commencé sa formation chez Filippo Vitale. Autrement dit, Agostino et Diana se connaissaient probablement depuis longtemps.

Pendant ce temps, le frère de Diana, Pacecco, quitte lui aussi l’atelier de Vitale pour celui de Massimo Stanzione.

 

 Massimo Stanzione (1585-1656)
Judith avec la tête d’Holopherne – vers 1640
Huile sur toile, 199,4 x 146,1 cm
Metropolitan Museum of Art, New York

On comprend que Bernardo De Dominici, le « Vasari napolitain » né trente ans après la mort de Diana, se soit un peu emmêlé les idées entre tous ces oncles, frères, beaux-frères et professeurs…

Mais revenons à Diana. En 1626, elle se marie avec son jeune confrère, Agostino Beltrano. Le maître Del Popolo contribue pour deux cents ducats à la dot de Diana, ce qui laisse supposer qu’il était satisfait de la contribution de sa nièce à la bonne marche de son atelier.

Le nom de Gaspare Del Popolo n’apparaît nulle part sur le Net. La seule œuvre que je lui connais est reproduite dans l’étude citée plus haut mais je n’en ai trouvé aucune autre trace :

 

Gaspare Del Popolo (né vers 1589)
Vierge à l'Enfant couronnée d'anges, saint Jean-Baptiste 
et deux donateurs de la famille Moles – 1618
Huile sur toile
Eglise San Giovanni Battista, Turi
Publié in Giuseppe Porzio, op.cit., p.609


Seconde indication de la bienveillance de Gaspare à l’égard de Diana, il l’inscrit dans son testament pour le versement d’une rente.

Il est probable qu’ensuite, Diana ait exercé son art dans le même atelier que son mari, Agostino. Lui non plus n’est guère connu, même s’il bénéficie de quelques lignes dans Wikipédia. Il participe à de grands programmes dans les églises de Naples, comme Santa Maria della Sanità, où l’on trouve aussi son beau-frère, Pacecco, et un groupe de peintres choisis pour leur proximité stylistique avec Massimo Stanzione.


Agostino Beltrano (1607-1656) 
Saint Blaise avec saint Antoine et saint Raymond - sans date
Huile sur toile
Eglise Santa Maria della Sanità, Naples


Je n’ai pas trouvé l’œuvre, intitulée Saint Thomas d'Aquin recevant la ceinture de chasteté, que Pacceco a peint pour cette église. J’en place ici une autre, conservée au musée historique de Vienne, avec une belle série d'œuvres de ce peintre.

 

Francesco di Rosa, dit Pacecco di Rosa (1606-1656)
Saint Sébastien – avant 1640
Huile sur toile, 206 x 101 cm
Gemäldegalerie, Kunsthistorisches Museum, Vienne


Diana participe aussi à des programmes de peintures religieuses : la Contre-Réforme bat son plein. Deux œuvres lui sont traditionnellement attribuées, elles se trouvent aujourd’hui sur les côtés de l’autel de l'église de la Pietà dei Turchini à Naples.


Diana di Rosa (1602-1643)
La Naissance de la Vierge – sans date
Huile sur toile
Église de la Pietà dei Turchini, Naples

Diana di Rosa (1602-1643)
La Mort de la Vierge – sans date
Huile sur toile
Église de la Pietà dei Turchini, Naples


Le musée diocésain de Naples conserve aussi deux autres œuvres de Diana dans le même registre religieux. Comme beaucoup de musées italiens, ce musée ne montre pas ses collections en ligne, ce qui me conduit à utiliser une reproduction assez peu valorisante de ce Mariage de la Vierge

 

Diana di Rosa (1602-1643)
La Mariage de la Vierge – sans date
Huile sur toile
Musée diocésain San Giovanni Maggiore, Naples


… et de la Sainte Famille, reproduite dans l’étude précitée …

 

Diana di Rosa (1602-1643)
La Sainte Famille dans l'atelier de charpentier – sans date
Huile sur toile
Musée diocésain San Giovanni Maggiore, Naples
Publié in Giuseppe Porzio, op.cit., p.619

Wikipédia montre un petit détail de l'œuvre qui confirme que Jésus n’apprécie que très moyennement d’être assigné au balayage !

 

La Sainte Famille (détail)
Source : Wikipédia

Et puisque nous sommes sur le thème de la Sainte Famille, j’ajoute ici un autre tableau conservé en collection particulière, dont je n’ai trouvé aucune autre représentation. On ne dispose pas des mesures mais la composition suggère qu’il s’agit plutôt d’une petite toile de dévotion privée.

 

Diana di Rosa (1602-1643)
La Sainte Famille - sans date
Huile sur toile
Collection particulière
Publié in Giuseppe Porzio, op.cit., p.617


Dans la catégorie des tableaux de dévotion, l’étude énumère plusieurs autres toiles. L’une d’entre elles a été acquise récemment par un musée américain, une composition séduisante où l’on retrouve la délicate palette jaune et grise de la Sainte Agathe que j’ai placée en exergue, le même dessin des mains, les joues légèrement rosées, la fine écharpe torsadée autour du décolleté.

 

Diana di Rosa (1602-1643)
Sainte Cécile avec un ange – vers 1630/1640
Huile sur toile – 97,5 x 76,5 cm
Museum of Fine Arts, Boston

Il existerait deux autres toiles de « petite sainte » :

 

Diana di Rosa (1602-1643)
Sainte Barbara – sans date
Collection particulière
Publié in Giuseppe Porzio, op.cit., p.614


Diana di Rosa (1602-1643)
Sainte Ursule – sans date
Collection particulière
Publié in Giuseppe Porzio, op.cit., p.613


Et des compositions plus complexes…


Diana di Rosa (1602-1643)
Sainte Agathe en prison miraculeusement guérie par saint Pierre - sans date
Huile sur toile, 77,5 x 99 cm
Collection particulière
Publié in Giuseppe Porzio, op.cit., p.616


Diana di Rosa (1602-1643) 
Eliezer et Rebecca au puits - sans date
Collection particulière
Publié in Giuseppe Porzio, op.cit., p.610

 

… dont cette Annonciation que j’ai bien trouvée dans le catalogue (en noir & blanc !) du patrimoine cultuel italien mais attribuée à Pacecco di Rosa.


Diana di Rosa (1602-1643)
Annonciation – sans date
Huile sur toile
Eglise Santa Maria la Porta, Palo del Colle
Publié in Giuseppe Porzio, op.cit., p.615


Et trois œuvres qui ne sont pas citées dans l’article mais dont la composition et les visages féminins laissent penser qu’elles pourraient relever du corpus de Diana :

 

Diana di Rosa (1602-1643)
Sainte Cécile et des anges – sans date
Huile sur toile, 151 x 127 cm
Collection particulière (vente 2023)


Diana di Rosa (1602-1643)
Noli me tangere – sans date
Huile sur toile, 146 x 123 cm
Collection particulière (vente 2018)


Diana di Rosa (1602-1643)
Samson and Dalila – sans date
Huile sur toile, 101 x 155,5 cm
Collection particulière (vente 2021) 


Je termine avec les toiles d’inspiration historique ou mythologique. Giuseppe Porzio en signale une qui, lors de son passage sur le marché de l’art, a été attribuée à son frère, Pacecco di Rosa, ce qui confirme les difficultés d’attribution.

 

Diana di Rosa (1602-1643)
L’Enlèvement d’Europe - sans date
Huile sur toile, 128,5 x 185 cm
Collection particulière (vente 2017)
Publié in Giuseppe Porzio, op.cit., p.611


Et pour finir, trois grands tableaux d'histoire qui ne me convainquent pas vraiment. Ils auraient été peints à la fin de la carrière de Diana. Je les montre sous réserve mais, même sans y ajouter ces trois toiles, l’œuvre de Diana témoigne assez de son habileté et de son talent.

 

Lucrèce – sans date
Huile sur toile, 129 x 103 cm
Collection particulière (vente 2018)


La Mort de Didon – sans date
Huile sur toile, 128 x 103 cm
 Collection particulière (vente 2022)


Sophonisba à la coupe de poison – sans date
Huile sur toile, 129 x 103 cm
Collection particulière (vente 2022)


Enfin, pour en finir avec la légende racontée par Bernardo De Dominici : non, Diana n’a pas été tuée par son mari jaloux de la proximité de son épouse avec le peintre Massimo Stanzione, avec lequel rien ne prouve qu’elle ait jamais travaillé, sauf peut-être comme modèle car sa beauté est restée dans les annales. Toutes ses « petites saintes » paraissent avoir le même visage, c'était peut-être le sien. 

Ce qui est sûr, en revanche, c'est qu'on a retrouvé l'acte de décès de Diana, qui précise qu'elle est morte de maladie, à Naples, le 7 décembre 1643.

Quant à Massimo Stanzione, Pacecco di Rosa et Agostino Beltrano, tous trois sont morts en 1656, année funeste de la grande peste de Naples qui décima plus de la moitié de la population de la ville. 

 

 

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