dimanche 26 mars 2023

Jeanne Bieruma Oosting (1898-1994)

 

Autoportrait à la palette – sans date
Huile sur toile, 65 x 81 cm
Fries Museum, Leeuwarden


Adriana Johanna Wilhelmina Bieruma Oosting est née le 5 février 1898 à Leeuwarden, Pays-Bas, où son père, issu d'une famille patricienne frisonne, exerçait la profession d’avocat. Elle avait une sœur (Cornelia) et un frère (Hans) de 11 ans son cadet.

 

Jeanne à droite, avec son père, sa sœur et son frère, vers 1911


Lorsque Jeanne a neuf ans, sa famille déménage dans le domaine De Cloese près de Lochem - une « petite ville à la campagne », dit Wikipédia aujourd’hui – une région au nord-est de la Hollande qui paraît avoir conservé l’atmosphère de l’époque de son enfance, qu’elle passe à courir les champs quand elle n’est pas retenue à la maison par ses devoirs scolaires ou ses leçons de piano.

Sa famille la trouve un peu bizarre, trop occupée. Jeanne passe son temps à dessiner « tout ce qui a beaucoup de pattes, d’écailles et de plumes » et commence à prendre des cours de peinture à 16 ans.

De 1917 à 1920, contre l’avis de sa famille, elle s’installe à Haarlem et accumule les formations artistiques : à l'École des arts appliqués de la ville, elle étudie la gravure avec Samuel Jessurun de Mesquita, un aquafortiste réputé qui fut aussi le professeur de Maurits Cornelis Escher (1898-1972). (N’oubliez pas qu’il faut cliquer sur les images pour mieux les voir !)

 


La Pomme de pin – 1917
Pointe sèche, 20 x 15,8 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Puis, toujours sans l’accord de son père, Jeanne part à La Haye pour suivre des cours de dessin à l’Académie royale des Art et des cours particuliers avec Willem van Konijnenburg.

 

Willem van Konijnenburg (1878-1943)
Femme et bélier dans le jardin clos – 1907
Pointe sèche, 45 x 57,9 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

C’est une période très active pour elle : elle dispose de son propre studio, expose dessins, gravures et peintures grâce à des associations d’artistes et rejoint le Nederlandsche Vereeniging voor Ambachts en Nijverheidskunst (VANK), une association de promotion de l’art industriel, fondée en 1904.

C’est l’époque où elle commence à graver des Ex-libris :


Ex-libris pour elle-même – 1922
6,6 x 6,6 cm

Ex-Libris Koeleman – 1926
10,1 x 6 cm
Stedelijk Museum, Amsterdam


Ex-libris A.P. Brouwer – sans date
8,7 x 88 cm

Elle continue à pratiquer la pointe sèche :

 

Patte de poulet – 1923
Pointe sèche, 8,5 x 13,4 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Navires à Veere - 1928
Pointe sèche, image 34,6 x 46,8 cm
Collection particulière (vente 2021)


Et aussi la peinture :

 

Bateau à voile dans un port – 1927
Huile sur toile, 55,5 x 65 cm
Collection particulière (vente 2022)


En 1929, Jeanne s'installe à Paris sur les conseils de son amie, la sculptrice Charlotte van Pallandt. Elle y fréquente l'académie de peinture d'André Lhote, suit des cours d'histoire de l'art et d'anatomie à l'École des beaux-arts, des cours d’art graphique au célèbre Atelier 17 de Stanley Hayter (un peintre et graveur anglais, surréaliste dans les années 30 qui a évolué ensuite vers l’expressionnisme abstrait, une icône des plasticiens qui travaillera avec les plus grands, Picasso, Ernst, Chagall et j’en passe) et John Buckland Wright, un illustrateur et graveurs néo-zélandais.

 

Stanley William Hayter (1901-1988)
Rue de la Villette – 1946
Pointe sèche, 20,8 x 26,7 cm
Museum of Modern Art, New York


C’est dans cet atelier que Jeanne pratique la technique de l'eau-forte d’une façon expérimentale, en intervenant sur la plaque pour créer des effets. On peut considérer qu’elle termine à Paris sa formation de graveur.

En 1931, paraît un premier portfolio de dix lithographies de nus féminins, intitulé Chairs, avec texte et préface de Valentin Bresle, alors directeur du Mercure universel où il publie un article sur Jeanne en novembre 1931. Dans ladite préface, Bresle évoque le « talent prestigieux » de Jeanne et ne manque pas de préciser que « Les touches et les lignes vigoureuses des présentes lithographies font oublier que l’artiste est une femme à l’âme délicate et au cœur franc. Aucune mièvrerie ; mais de la ligne, du dessin, et une maîtrise bien personnelle, un virilisme d’âme forte. » (sans commentaire…)

A l’époque, ces lithographies, jugées trop osées pour une femme, ne sont pas montrées aux Pays-Bas.


Chairs – vers 1931
Portfolio de 10 lithographies, 42 x 29 cm
Collection particulière (vente 2010)






Je ne suis pas sûre que cette lithographie fasse partie de cette série mais elle a été réalisée à la même époque :

 

Lithographie, exposée dans l’exposition
« L’été de Jeanne » au Museum Belvédère (été 2022)




Confidences – 1935
Impression sur papier transparent, 10,5 x 14,8 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


A Paris, Jeanne a abandonné le nom de son père et « Jeanne Oosting » commence à apparaître ponctuellement dans la presse spécialisée : « Jeanne Oosting, Suédoise [sic], qui étudie à Paris l'art décoratif, clôt la sélection de ces vignettes, composées en l'honneur de notre Président, par trois Ex-libris décoratifs d'une heureuse venue, dont le symbolisme : vaisseau de la Ville de Paris, le glaive et le ‘’point carré’’ apparaît clairement. Mlle Jeanne Oosting a déjà dessiné beaucoup d'affiches, d'Ex-libris et de portraits. (Henri Daragon, « Le bouquet d’Ex-libris offert au président Poincaré », Revue L’Ex-libris, 1er avril 1931, p.70)

Ex-libris Poincaré
Revue Ex-libris, 1er avril 1931, p.72

« D’autres femmes peintres à l’ordre du jour de cette quinzaine […] Jeanne Oosting, au studio Marie-Colin, se montre travailleuse, sérieuse, sobre, volontaire » (Vanderpyl, « Salons et expositions », Le Petit Parisien, 24 mars 1931, p.6)

Sans soutien familial, elle doit assurer sa subsistance et publie des lithographies en séries, des œuvres d’assez grand format dont les titres sont peut-être révélateurs d’une solitude affective (ou, selon le Museum Belvédère, de sa « découverte de l’amour lesbien ») :  Accents plaintifs, Solitudes, Visions et Fantômes, L'amour et la mort, Rêves et Réalités, etc. Des scènes à l’atmosphère dramatique dans un style parfois expressionniste, parfois romantique.

Série Les Folles (1933) :

 

Série Les Folles : La Hantise – 1933
Eau-forte sur papier, image 36,9 x 29 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

Série Les Folles : L’Idée fixe – 1933
Eau-forte sur papier, image 36,8 x 29,8 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Série Accents plaintifs :

 

Série Accents plaintifs : L’Oubli
Encre sur papier, image 56 x 44 cm
Fries Museum, Leeuwarden


Série Accents plaintifs : La Révolte
Encre sur papier, image 44 x 56 cm
Fries Museum, Leeuwarden


Série Accents plaintifs : La Vie manquée
Encre sur papier, image 44 x 56 cm
Fries Museum, Leeuwarden


Série L’Opéra (1934) :

 

Série L’Opéra, partie II : L’Avant-scène
Eau-forte et aquatinte, 33,5 x 44,5 cm


Ses lithographies de scènes de ballet méritent d’être regardées de près :

 



(Photographies extraites d’un film présenté par le Museum Belvédère
à l’occasion de l’exposition « L’été de Jeanne »)


Elle crée aussi des vues plus pittoresques :


Le Bistrot – 1930/1939
Verni mou, 21,4 x 21,8 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Le Jardin du Luxembourg – 1934
Lithographie en couleur, 49,5 x 64,5 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Série Vision et Fantômes (1936) :

Série Vision et Fantômes : Sapho vaincue - 1936
Lithographie sur papier, image 63,5 x 45,2 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Série Vision et Fantômes : Les yeux qui guettent
Lithographie sur papier, image 63,5 x 45,2 cm
Rijksmuseum, Amsterdam



Série Rêve et réalité (1937) :

Série Rêves et Réalité : Jeanne – 1937
Lithographie sur papier, image 65,5 x 59 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Série Rêves et Réalité : Promenade nocturne - 1937
Lithographie sur papier, image : 65,8 x 55 cm
Rijksmuseum, Amsterdam



Série Rêves et Réalité : La Prisonnière – 1937
Lithographie sur papier, image 65,8 x 50,5 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Selon la presse de l’époque, elle fait partie d’un groupe de jeunes artistes « réalistes » dont le retour à l’objet est « effectué cependant avec retenue et d’où la vulgarité, si facile à côtoyer en cette matière, et totalement exclue ». (André Lhote « La mission de Montparnasse », Ce soir, 30 mai 1937, p.8)

 

L’Attente – 1937
Vernis mou, 24,8 x 14,8 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

L’Attente (détail)


Les Amoureux – 1938
(Support et technique non précisés) 47 x 63,4 cm
Stedelijk Museum, Amsterdam



Paris, Modes alimentaires – 1940
Vernis mou, 28 x 19,5 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

A Paris, elle aurait eu un important cercle d’amis, dont Kees van Dongen et Conrad Kickert (peintre, critique et collectionneur d’art néerlandais) et elle aurait rencontré Picasso, Rouault, Bonnard.

En tout état de cause, le fait que de nombreuses œuvres d’elle se trouvent dans le Fonds Marc Vaux (sur ce fonds, voir la notice de Valentine Prax) indique qu’elle fréquentait les artistes de Montparnasse.

 

Nature morte - entre 1930 et 1939
Photographie d’une œuvre créée à Paris et dont la localisation actuelle est inconnue
Source : Centre Pompidou/MNAM-CCI/Bibliothèque Kandinsky, Fonds Marc Vaux.

 

Autoportrait – entre 1930 et 1939
Photographie d’une œuvre créée à Paris et dont la localisation actuelle est inconnue
Source : Centre Pompidou/MNAM-CCI/Bibliothèque Kandinsky, Fonds Marc Vaux.



Autoportrait – entre 1930 et 1939
Photographie d’une œuvre créée à Paris et dont la localisation actuelle est inconnue
Source : Centre Pompidou/MNAM-CCI/Bibliothèque Kandinsky, Fonds Marc Vaux.

Cette dernière œuvre est aujourd’hui souvent représentée en ligne mais dans un autre format. Sans doute une copie de l’original, à moins que l’œuvre n’ait été découpée, par Jeanne elle-même puisqu'elle est signée.


Autoportrait - 1932
Collection particulière

On trouve quelques traces de sa peinture de l’époque dans les musées hollandais et sur les sites de vente mais elle paraît moins convaincante que ses gravures :

 

Gare de Bellevue (Près de Paris) – vers 1935
Huile sur toile, 48 x 44.5 cm
Collection particulière (vente 2003)

 

Les Poissons – vers 1930/1939
Huile sur toile, 71 x 89 cm
Fries Museum, Leeuwarden

A l’évidence, Jeanne travaille énormément et tient beaucoup à sa propre efficacité : « Appelez-moi avant huit heures du matin, sinon cela perturbera mon travail ». Ce n’est pas un hasard si sa première biographie s’appelle « Pas de temps à perdre » !

Ses soirées sont consacrées à l’opéra et au théâtre et elle découvre aussi les lieux auxquels sa jeunesse protégée ne l’a pas préparée, cafés, vagabonds, alcoolisme, prostitution. C’est peut-être ce que reflète la série Les Fenêtres, le soir (1937/1938), à l’atmosphère un peu inquiétante.

 

Série Les Fenêtres, le soir : La Grille – 1937
Vernis mou sur papier, image 25 x 24,8 cm
Centraal Museum Utrecht


Série Les fenêtres, le soir : Le café - 1938
Vernis mou, image 24,8 x 20 cm


Série Les fenêtres, le soir : Le Square, prenez garde la nuit -1938
Vernis mou, image 20 x 24,8 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

Elle expose régulièrement dans des galeries et avec les associations d'artistes. Elle aurait notamment été membre de l'Union des Femmes Peintres et Sculpteurs (UFPS) et du Salon d'Automne. Toutefois, les éléments sur ces deux associations sont trop rares en ligne pour que j’ai pu vérifier à quel moment. Elle est cependant citée pour ses « imageries veloutée », à l’occasion de l’exposition de l’UFPS par le Petit Parisien (13 février 1932, p.4)

J’ai lu aussi qu’elle avait remporté une médaille de bronze de la ville de Paris pour un tableau présenté à l’Exposition universelle de 1937 mais… j’ai (très longtemps) cherché : elle ne figure dans le catalogue, ni pour la France, ni pour les Pays-Bas. Et comme elle n'est pas non plus citée dans le Benezit, cela restera un petit mystère, sur cette page… 

En 1939, elle produit une nouvelle série de dix gravures, Le Cirque :

 

Série Le Cirque :  Les Clowns – 1939
Vernis mou, tirage sur papier, image 24,9 x 24,9 cm
Rijksmuseum, Amsterdam



Série le Cirque : Artistes de cirque au trapèze – 1939
Vernis mou, tirage sur papier, image 24,9 x 14,7 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Une série qu’il faut regarder de près, pour voir, par exemple, ce charmant petit singe !

 

Série Le Cirque : Numéro de cirque avec trois poneys (détail) - 1939
Vernis mou, tirage sur papier, image 29,8 x 20 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

La même année, une deuxième série sur le cirque, Le Chapiteau :


Série Le Chapiteau : Le Clown musicien – 1939
Eau-forte et aquatinte, 38,6 x 18,7 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Série Le Chapiteau : Diable noir - 1939
Eau-forte et aquatinte, 38,4 x 30,9 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Série Le Chapiteau : Les Chevaux - 1939
Eau-forte et aquatinte, 21,2 x 31,7 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


En octobre 1940, Jeanne Oosting retourne définitivement aux Pays-Bas : elle s'installe sur le Prinsengracht à Amsterdam et travaille beaucoup, y compris pendant les années de guerre, notamment à des illustrations de livres : en 1943, des estampes de sa main paraissent dans une édition clandestine des Fleurs du Mal de Baudelaire et la presse française en parle l’année suivante : 

« Les Fleurs du Mal jouissent d’une faveur particulière auprès des bibliophiles hollandais. Aux deux éditions récemment parues, dont l'une illustrée par Bantzinger et l'autre par Jeanne Bieruma Oosting s'ajoutera prochainement une nouvelle édition de luxe illustrée de lithographies de Mme Bieruma Oosting et lancée par les éditions Contact. » (Théodore Fontane, « Bibliothèque européenne », Comœdia, 15 avril 1944, p.4)

Les eaux-fortes de ce volume ont été souvent rééditées depuis. En voici quelques-unes d’une édition de 1976 :

 

Les Bijoux – 1940
Vernis mou, 14,9 x 14,7 cm
(Zutphen, La Gaillarde Presse, 1976)


Le Balcon - 1940
Vernis mou, 19,6 x 14,9 cm
(Zutphen, La Gaillarde Presse, 1976)


La Passante – 1940
Vernis mou, 19,7 x 15 cm
(Zutphen, La Gaillarde Presse, 1976)


Le Jeu – 1940
Vernis mou, 21 x 15,7 cm
(Zutphen, La Gaillarde Presse, 1976)


Tu mettrais l’univers entier dans ta ruelle – 1940
Vernis mou, 15,9 x 13,8 cm
(Zutphen, La Gaillarde Presse, 1976)


Après la Libération, Jeanne participe à l'exposition « Art en liberté » au Rijksmuseum et produit douze gravures illustrant les fables de La Fontaine :

 

Série La Fontaine : Le rat des villes et le rat des champs
Eau-forte, feuille : 30,2 x 23,3 cm
Collection particulière


Série La Fontaine : Le corbeau et le renard
Eau-forte, feuille : 30,2 x 23,3 cm
Collection particulière

Un thème sur lequel elle reviendra plusieurs fois au cours de sa vie :


La cigale et la fourmi – 1952
Eau-forte et aquatinte, roulette et impression de matière sur papier, image 29,5 x 29,5 cm
Centraal Museum, Utrecht


Le lièvre et la tortue – vers 1952
Gravure, 19,5 x 24,8 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Au printemps 1950, Jeanne fonde l'association d'artistes féminines De Zeester avec Charlotte van Pallandt et plusieurs autres peintres et sculptrices, comme Maaike Braat et Ro Mogendorff. Leur démarche, qui visait essentiellement à créer des opportunités d’expositions n’est pas très bien reçue par la critique et, de fait, les expositions du groupe n’auront lieu que quelques années.


La Rencontre – 1944
Lithographie en vert, 64,6 x 48 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

Un peu plus tard, l’héritage de sa mère lui donne une aisance qui lui permet non seulement d’acheter en 1955 une belle maison de campagne à Almen (où elle passera les quarante dernières années de sa vie) mais aussi, dans les années 60, un immeuble de plusieurs étages donnant sur l’Oosterpark d’Amsterdam, un parc d’une douzaine d’hectares créé à l’emplacement des anciennes fortifications de la ville. Elle peut donc peindre sans sortir de chez elle….

 

Figures dans l'Oosterpark à Amsterdam – sans date
Huile sur toile, 98 x 100 cm
Collection particulière (vente 2007)


Quatre pommes – 1969
Huile sur toile, dimensions non communiquées
Museum Henriette Polak, Zutphen


Nature morte aux asperges, poires et pommes – sans date
Huile sur toile, 54 x 64 cm
Collection particulière (vente 2022)


Les fauteuils en rotin – sans date
Huile sur toile, 71 x 100 cm
Stedelijk Museum, Amsterdam

 

… et surtout y recevoir nombre de ses contemporains. Elle participe de façon très active à plusieurs associations prestigieuses, comme celle des aquarellistes de Hollande (De Hollandse Aquarellistenkring), celle des artistes graphiques (Dutch Circle of Graphic Artists and Drafters), Arti et Amicitiae et De Muiderkring.

Jeanne travaille sans vraiment tenir compte de l’évolution des styles. Restée figurative, elle dépeint son environnement : animaux, intérieurs, vues de sa fenêtre. Si sa peinture n’a jamais eu les honneurs de la critique, son travail graphique, qui s’est clarifié et stylisé au cours du temps, a été en revanche très apprécié et on le trouve aujourd’hui dans de nombreuses collections muséales des Pays-Bas.


Les natures mortes constituent une grande part de son travail graphique :

 

L’œuf miroir – 1950/1951
Gravure en relief et aquatinte, 23 x 49,3 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Nature morte avec raisins et poires – sans date
Eau-forte et aquatinte, image 19,8 x 48,7 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Oursins- avant 1958
Eau-forte et aquatinte, image 25,6 x 44,3 cm
Rijksmuseum, Amsterdam



Oranges – sans date
Eau forte et aquatinte, image 24,5 x 39,5 cm
Collection particulière (vente 2014)



L’Automne – sans date
Linogravure, dimensions non précisées
Smithsonian American Art Museum, Washington D.C.



Citronnade – sans date
Eau-forte et aquatinte, image 39,5 x 39,4 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Elle ne dédaigne pas non plus les paysages, toujours un peu fantasmagoriques :



L’Hiver – 1963
Eau-forte et aquatinte sur papier, image 39 x 49,5 cm
Centraal Museum, Utrecht



Lune bleue – vers 1970
Eau-forte et aquatinte, 48,9 x 39,5 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Elle trouve souvent son inspiration dans les animaux, surtout les plus étranges


Le Nid – 1962
Eau-forte et aquatinte sur papier, image 39,5 x 39 cm
Centraal Museum, Utrecht



Méduse – 1959
Gravure en relief et aquatinte sur papier, image 49,2 x 41,2 cm
Centraal Museum, Utrecht



Deux Goliaths – vers 1960
Gravure, 14,7 x 19,7 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Monstres marins – vers 1965
Eau-forte, 39,8 x 49 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Crapaud géant – 1967
Gravure sur papier, image 39,5 x 39,3 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Aquarium – sans date
Lithographie, 56,8 x 64 cm
 Exposée à la Fondation Nobilis, Fochteloo, en 2022


Les Escargots – sans date
Technique non précisée, sur papier japonais, 61,2 x 83 cm
Rijksmuseum, Amsterdam



L’iguane – sans date
Support et technique non précisés, 41 x 50,7 cm
Musée Boijmans Van Beunigen, Rotterdam


Jeanne paraît avoir été fortement associée aux fondamentaux de la culture néerlandaise. Ainsi, par exemple, lorsqu’est réédité en 1963 un recueil de poème d’Adriaan Roland Holst (1888-1976), l’une des figures majeures de la littérature moderne des Pays-Bas, c’est à elle qu’on fait appel pour l’illustrer :

Deux illustrations du poème Een winter aan zee (Un hiver au bord de la mer)
Eau-forte et aquatinte, 27,2 x 20,3 cm
(Utrecht, De Roos, 1963)


L’aspect patrimonial de son travail est aussi souligné par le fait qu’on l’a sollicitée pour créer des timbres. Un certain nombre apparaît sur le net mais ceux-ci sont validés par le Museum Staal d’Almen !





Enfin, elle a été distinguée par le prix de peinture du Friesland en 1943, la médaille Arti et Amicitiae (une prestigieuse société d’artistes néerlandais) en 1971 puis par sa nomination au grade de chevalier de l’Ordre d’Orange Nassau.


Jeanne a aussi beaucoup voyagé et y a puisé de nouvelles inspirations…

 

L’hiver à Moscou – 1975
Ouvrage de huit gravures à la pointe sèche et textes
Dimension de l’ouvrage, 40 x 28 cm
Collection particulière

L’hiver à Moscou – 1975
Ouvrage de huit gravures à la pointe sèche et textes
Dimension de l’ouvrage, 40 x 28 cm
Collection particulière


Fenêtre en Jordanie – années 70
Eau-forte et aquatinte, 19,4 x 19,7 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


  mais elle est retournée régulièrement à Paris pour réassurer sa technique de gravure, dans l’atelier de Stanley Hayter.

La Soirée– 1977
Gravure, 39,6 x 39,4 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Jeanne a travaillé et exposé jusqu'à un âge avancé. A la fin de sa vie, elle pratiquait essentiellement l’aquarelle avec une grande fluidité, une palette aux couleurs réalistes et des effets de fond qui rejoignent parfois l’abstraction… 

  

Nature morte – sans date
Aquarelle sur papier, 39 x 48cm
Museu Raset, Gérone



La grappe de raisin – vers 1960
Aquarelle, 35,1 x 43,6 cm
Institut néerlandais d'histoire de l'art


  beaucoup de fleurs :



Nature morte aux roses – sans date
Aquarelle sur papier, 59 x 72 cm
Fries Museum, Leeuwarden



Bouquet de fleurs – sans date
Aquarelle sur papier, 67 x 52 cm
Collection particulière

En 1970, elle a fait don de son importante collection (des œuvres de Picasso, Toulouse Lautrec, Kokoschka, Kathe Kollwitz, Stanley Hayter, Chagall, Redon et Charlotte van Pallandt) à une fondation pour créer un prix, décerné chaque année pour soutenir les artistes figuratifs. Le prix Jeanne Oosting existe toujours aujourd’hui.

 

Jeanne Bieruma Oosting est décédée le 14 juillet 1994 à Almen, à l'âge de 96 ans. 

 

Avant que son propre pays ne la redécouvre, il a fallu quelques années et une biographie parue en 2021, intitulée Pas de temps à perdre. Jeanne Bieruma Oosting 1898-1994 (Jolande Withuis, De Bezige Bij éditeur) qui ne paraît pas avoir été traduite en français… A cette occasion, le musée Henriette Polak à Zutphen, le Musée de Maassluis, le Musée Staal à Almen et la Fondation Nobilis à Fochteloo, se sont associés pour présenter « L’été de Jeanne », au cours de l’été 2022.

 

Dommage que la période parisienne de cette artiste, dont l’œuvre gravé est impressionnant,  n’ait pas inspiré à un musée parisien l’idée de s’associer à cette initiative !

 

 *

 

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