vendredi 29 octobre 2021

Mary Cassatt (1844-1926)

 

Autoportrait – 1878
Aquarelle et gouache sur papier vélin, 60 x 41,1 cm
The Metropolitan Museum of Art, New York

Née à Pittsburgh, en Pennsylvanie, au sein d’une riche famille de banquiers américains d'origine française, Mary Cassatt voyage à Paris, Heidelberg et Darmstadt avec ses parents au début des années 1850, s’imprégnant très tôt de culture européenne. Entrée à seize ans à l’École des beaux-arts de Philadelphie (Pennsylvania Academy of Fine Arts), elle en est peu satisfaite et arrive à convaincre ses parents de repartir à Paris où avec Paul-Constant Soyer (1823-1903), Charles Chaplin (1825-1891) et Jean-Léon Gérôme (1824-1904), elle reçoit un enseignement académique, tout en fréquentant assidûment le Louvre.

Après un refus en 1867, elle est admise au Salon de 1868, sous le nom de Mary Stenvenson, et expose une Joueuse de mandoline, d'inspiration post-romantique. 

 

La joueuse de mandoline – 1868
Huile sur toile, 73 x 91 cm
Collection particulière

La guerre franco-prussienne de 1870 la contraint à rentrer aux Etats-Unis d’où elle repart bien vite vers l’Europe, se rendant à Rome et à Parme. Là, elle s’initie à la gravure en creux et à l’aquatinte avec Carlo Raimondi (1809-1883) puis visite l’Espagne dont elle s’attache à restituer les coutumes dans un style modernisé.

Elle continue cependant à participer chaque année au Salon, cette fois sous le nom de Mary Stenvenson-Cassatt, et y montre en 1872 Pendant le carnaval.  

 

Pendant le carnaval - 1872
Huile sur toile, 65 x 57 cm
Philadelphia Museum of Art, Philadelphie, Pennsylvanie


En 1873, elle expose Offrir le panal au toréro qui célèbre la richesse des couleurs de la peinture espagnole. (Pour cellezetceux que cela pourrait intéresser, le « panal » est un morceau de cire d’abeille imbibée de miel qu’on trempait dans de l’eau fraîche pour la sucrer !)

Offrir le panal au Torero – 1873
Huile sur toile, 100,6 x 85,1 cm
The Clark Art Institute, Williamstown, Massachusetts


Elle revient s’installer définitivement à Paris en 1874, en compagnie de sa sœur Lydia qui lui servira souvent de modèle. Un peu plus tard, ses parents viendront aussi vivre à Paris. Au Salon, elle montre un unique tableau intitulé Ida (œuvre disparue). En la voyant, Degas décèle en Mary une sensibilité proche de la sienne tandis que Mary elle-même admire les pastels de Degas. Ils deviennent amis et engagent une durable collaboration artistique.

 

Edgar Degas (1834-1917)
La répétition sur scène – 1874
Pastel sur dessin au pinceau et à l'encre sur papier vélin de couleur crème, 53,3 x 72,4 cm
The Metropolitan Museum of Art, New York

A l’époque, Mary cherche son style. Elle est influencée par l’œuvre de Manet mais son travail sur la lumière est encore hésitant, comme on le voit sur son premier grand tableau, représentant son neveu d’environ cinq ans, Edward (Eddy) Buchanan Cassatt qui adopte une pose raide assez éloignée de celle des portraits d’enfants qu’elle exécutera ensuite. La palette est encore restreinte, rouge pour de costume de velours de l’enfant et le tapis, brune pour le chien et le grand rideau. Seuls les cheveux et le col de l’enfant attrapent un peu la lumière…

 

Eddy Cassatt - 1875
Huile sur toile, 148, 6 x 109,9 cm
National Gallery of Art, Washington D.C.

Dès 1878, Mary adopte un style beaucoup plus libre dans la représentation des enfants, un de ses thèmes favoris. En témoigne cette Petite fille dans un fauteuil bleu, dont l’auteur restitue parfaitement les sentiments : c’est clair, cette petite fille s’ennuie !

Petite Fille dans un fauteuil bleu – 1878
Huile sur toile, 89,5 x 129,8 cm
National Gallery of Art, Washington D.C.

La composition de la scène est inattendue, son sujet principal n’étant pas placé au centre de la toile, comme on pourrait s’y attendre. Le petit chien endormi fait contrepoint dans un espace constitué d’une « ronde de fauteuils » un peu étrange…

Dès 1877, Mary est conviée par Degas à rejoindre la première exposition expressionniste. Elle n’y participe qu’en 1879, avec onze œuvres, dont plusieurs explorent un thème qui deviendra récurrent dans son travail : les femmes au théâtre.

 

Dans la loge – 1878
Huile sur toile, 81,2 x 66 cm
Museum of Fine Art, Boston, Massachusetts

A la représentation d’après-midi de la Comédie française, pendant qu’une jeune femme élégante regarde attentivement la scène, un homme l'observe depuis une loge, située un peu plus loin. Le spectateur est témoin de ce double regard. 

Ce tableau est le premier de Mary à avoir été exposé à Boston, où il ne passa pas inaperçu : la critique a considéré que Mary « dépassait en force la production de la plupart des hommes ».





Etude de femme avec éventail  – 1879
Pastel avec peinture métallisée dorée sur toile, 64,9 × 80,6 cm
Philadelphia Museum of Art, Philadelphie, Pennsylvanie



Jeune femme dans une loge – vers 1878/1879
Pastel, gouache, aquarelle et fusain et peinture métallisée, 64 x 50,5 cm
Collection particulière (vente 2022)


Lydia seated in a Loge - vers 1879
Pastel sur papier, 55,4 x 46 cm
The Nelson Atkins Museum of Art, Kansas City, Missouri



La Loge – vers 1878/1880
Huile sur toile, 79,8 x 63,8 cm
National Gallery of Art, Washington D.C.

Il y a un miroir derrière ces deux jeunes femmes, puisque s’y reflète le dos de la seconde d’entre-elles, celle qui se cache derrière son éventail. Dès lors, on comprend que les balcons sont aussi des reflets dans le miroir ; à leur courbe répond celle de l’éventail tandis que la robe rose de la figure du premier plan paraît réfléchir les couleurs du théâtre lui-même. La représentation du reflet est récurrente dans l'œuvre de Mary.

Même utilisation du reflet dans ce tableau :



Femme au collier dans une loge - 1879
Huile sur toile, 81,3 x 59,7 cm
Philadelphia Museum of Art, Philadelphie, Pennsylvanie


Elle présente aussi quelques portraits, comme celui-ci :

Moïse Dreyfus – 1879
Pastel sur papier, 81,2 x 65,2 cm
Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la ville de Paris


Mary participera à quatre expositions impressionnistes entre 1879 et 1886 et sera, avec Marie Bracquemond et Berthe Morisot, l’une des trois seules femmes à y figurer. 

C’est avec Degas, Pissarro et Félix Bracquemond qu’elle revient à la gravure dans l’objectif de participer au projet d’une revue intitulée Le Jour et la Nuit. Les quatre artistes recherchaient de nouveaux effets en travaillant de manière innovante les surfaces des plaques de gravure, dans l’esprit de la peinture impressionniste. Le projet ne se réalisera finalement pas mais il permit à Mary d’approfondir plusieurs techniques, pointe sèche, vernis mou et aquatinte et de produire, à cette occasion, deux estampes qui suscitèrent l’admiration de ses amis :

 

Au théâtre (femme à l’éventail) – 1880
Verni mou, aquatinte et eau-forte
Source : Gallica / Bibliothèque nationale de France


Au théâtre, reflet dans la glace - 1880
Verni mou, aquatinte et eau-forte
Source : Gallica / Bibliothèque nationale de France


Pour le même projet, Degas exécute cette estampe, destinée à figurer dans le premier numéro de la revue et qui représente Mary et sa sœur :

Edgar Degas (1834-1917)
Mary Cassatt au Louvre, la galerie étrusque – 1879/80
Eau-forte, pointe sèche et aquatinte, 43,2 x 30,5 cm
The Metropolitan Museum of Art, New York


Les estampes, dont la Femme à l’éventail, constituent la moitié des seize œuvres que Mary présente à l’exposition impressionniste de 1880, où on pouvait aussi voir Le Thé :

Le Thé – 1880
Huile sur toile, 64,77 x 92,07 cm
Museum of Fine Art, Boston, Massachusetts


Portrait de Mme C… (Mère sur le point de laver son enfant endormi) - 1880
Huile sur toile, 100,3 x 65,7 cm
L.A. County Museum of Art (LACMA), Los Angeles, Californie

Si l’on se fonde sur le site « Salons » du musée d’Orsay, cette toile a été présentée à celui de 1880 sous le titre Portrait de Mme C… Je dois avouer mon étonnement car on peut difficilement prétendre avoir la moindre idée du « portrait » de cette éventuelle Mme C… D’ailleurs, le LACMA, où ce tableau est conservé, l’intitule Mère sur le point de laver son enfant endormi. En tout état de cause, ce tableau serait le premier exemple d’un thème traité de façon particulièrement récurrente par Mary, les mères avec enfants. Il est très caractéristique : l’enfant est présenté avec un grand naturel et les mères enlacent, caressent, embrassent.

Ces très nombreuses scènes maternelles sont celles que l’on trouve le plus fréquemment représentées à propos de son travail, je n’insiste donc pas. 


 

Mère et enfant – 1880
Pastel sur papier
Collection particulière

A l’exposition impressionniste de 1881, Mary montre quelques huiles dont deux portraits de sa sœur Lydia, intitulés Le Jardin et l'Automne et de nombreux pastels, comme Mère et Enfant (ci-dessus). Le célèbre marchand d'art, Paul Durand-Ruel commence à acquérir les œuvres de Mary.


Le Jardin (Lydia crochetant dans le jardin de Marly) – 1880
Huile sur toile, 65,6 x 92,6 cm
The Metropolitan Museum of Art, New York


Jeune fille au jardin (Femme cousant) – 1880/1882
Huile sur toile, 92 x 56 cm
Musée d’Orsay, Paris
© Musée d’Orsay, RMN-Grand Palais / Martine Beck-Coppola



L’Automne – 1880
Huile sur toile, 92,5 x 65,5 cm
Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la ville de Paris

Les années 1882 et 1883 sont marquées par le deuil : Lydia meurt le 7 novembre 1882 et Edouard Manet décède le 30 avril 1883. Les toiles de Mary ne retrouvent les cimaises qu’en mai 1886, pour la dernière exposition impressionniste, avec Enfants sur la plage, une Etude très remarquée et Jeune fille à la fenêtre.

Enfants jouant sur la plage – 1884
Huile sur toile, 97,4 x 74,2 cm
National Gallery of Art, Washington D.C.


Etude (Fille arrangeant ses cheveux) – 1886
Huile sur toile, 75,1 x 62,5 cm
National Gallery of Art, Washington, D.C.


Jeune fille à la fenêtre – 1883/84
Huile sur toile, 100,3 x 64,7 cm
National Gallery of Art, Washington D.C.

Mary participe aussi, avec trois œuvres, à la première exposition impressionniste organisée à New York par Durand-Ruel. Il est probable que cela l’a aidée à se faire reconnaître de la haute société américaine dont elle est issue et avec laquelle elle est restée en contact.

La même année, elle a aussi exécuté ce portait de petite fille au charme duquel on résiste difficilement …

 

Petite fille au chapeau de paille - vers 1886
Huile sur toile, 65,3 x 49,2 cm
National Gallery of Art, Washington D.C.

« De larges coups de pinceau visibles forment des motifs abstraits sur les manches blanches du chemisier et de la blouse. La peinture a été appliquée rapidement et directement sur la toile, d’une manière appelée alla prima, qui donne une apparence de spontanéité à l’œuvre. » (Extrait de la notice du musée)

Au début de l’année 1887, la famille Cassatt s’installe au 10 rue de Marignan où Mary peut disposer d’un atelier. Elle achète un presse à taille-douce et va se concentrer sur son travail de gravure. La Bibliothèque nationale de France en conserve de nombreux exemples, comme celui-ci, qu’on peut voir sur le site de Gallica :

Margot appuyée contre sa mère- 1902
Estampe, 2e état, pointe sèche, 24 x 16,7 cm
Source : Gallica / Bibliothèque nationale de France


Une série de ses pointes-sèches est présentée pour la première fois aux Etats-Unis dans une exposition organisée par Durand-Ruel à Boston.

En 1889, Mary participe à la première exposition de la société des peintres - graveurs à Paris. Parallèlement elle commence à exercer une activité de conseillère artistique, notamment auprès d’Henry Osborne Havemeyer, « le roi du sucre de New York », et collabore avec Durand-Ruel qui vient s’ouvrir une galerie à New York.

Mais c’est surtout à partir de 1890 et de sa visite en compagnie de Berthe Morisot à l’exposition de gravure japonaise organisée par l’Ecole des beaux-arts de Paris, que le style de Mary va fortement évoluer. Elle travaille en couleur à l’aquatinte qu’elle retouche ensuite à la pointe sèche et obtient des rendus d’une qualité exceptionnelle qui seront très recherchés. En voici quelques-unes (voir aussi le site Gallica) :

La Toilette - vers 1891
Pointe sèche, vernis mou et aquitaine en couleurs, 35,9 x 26,3 cm
Source : Gallica / Bibliothèque nationale de France


La Lettre – 1891
Pointe sèche et aquatinte en couleur34,2 x 22,3 cm
Source : Gallica / Bibliothèque nationale de France


Caresse maternelle – 1890/1891
Pointe-sèche, vernis mou et aquatinte en couleur, 6e état, 36,7 x 26,8 cm
Terra Foundation for American Art, Chicago, Illinois



Sur l’herbe – 1891
Pointe sèche et aquatinte en couleur, 39,7 x 28,2 cm
Source : Gallica / Bibliothèque nationale de France


Féministe engagée, Mary reçoit en 1891 une commande pour le Pavillon de la femme à l’Exposition universelle de Chicago de 1893 : la réalisation d’un décor mural monumental de quatre mètres de haut sur dix-huit de long, ayant pour sujet une allégorie à la gloire de la femme moderne, tandis que sa compatriote, Mary Fairchild MacMonnies, doit réaliser le pendant sur la femme primitive.

Mary Fairchild MacMonnies (1856-1946)
Les femmes primitives - 1893

Après quelques hésitations, elle accepte et installe un atelier dans une dépendance du château de Bachivillers dans l’Oise, qu’elle a loué pour l’été. 

Son décor est en trois panneaux : le panneau central représente « Les jeunes femmes cueillant les fruits de la connaissance », flanqué de « Jeunes filles à la recherche de la renommée » à gauche, avec « Les arts, la musique et la danse », à droite.  Les personnages étaient des femmes contemporaines, dessinées de façon naturaliste.

Elle enverra l’œuvre à Chicago, mais n’assistera pas à l’inauguration.

L’accueil critique sera assez négatif, on lui reprocha notamment de n’avoir intégré aucun homme. Elle répondit que les images d’hommes, « dans toute leur vigueur », apparaissaient déjà partout et que c’était l’occasion de représenter le point de vue de la femme « la douceur de l’enfance, le charme de la féminité … si je n’ai pas été absolument féminine, alors j’ai échoué. » Aujourd’hui, son « absolument féminin » est sans doute un peu désuet mais son désir de magnifier le rôle des femmes, sans mièvrerie, fait encore écho à notre sensibilité.

Il ne reste de ce travail que de mauvaises photos, les œuvres ont disparu. 



Mary Cassatt (1844-1926)
Les femmes modernes – 1893

Panneau central 

Depuis la première mise en ligne de cette notice, j'ai pu cependant faire une capture d’écran d'un reportage présenté dans l’exposition « Le décor impressionniste » qui s’est tenue au musée de l’Orangerie à Paris (mars-juillet 2022). On y voit une toile qui constitue probablement une étude du sujet central et permet de se faire une idée de l’ensemble du panneau décoratif : 

Jeunes femmes cueillant des fruits - 1891/92
Huile sur toile
(localisation non précisée)

Durand-Ruel organise la première exposition individuelle de Mary, avec plus de quatre-vingt-dix œuvres, à Paris. Là encore, Mary ne rencontre pas le succès escompté…

Elle fait l’acquisition du château de Beaufresne au Mesnil-Théribus en 1894, y fait réaliser de nombreux aménagements de confort et embellit le parc de nombreuses plantations. C’est là qu’elle passera tous les étés.

Son style continue à évoluer, comme le montre cette toile de la même année, où l’influence de l’art japonais est sensible dans la ligne d'horizon placée très haut, l'élimination des détails et un travail des surfaces en aplat.

 

The Boating Party - 1893/1894
Huile sur toile, 90 x 117,3 cm
National Gallery of Art, Washington D.C.


Elle continue son travail à l’aquarelle et ses portraits d’enfants à l'huile très caractéristiques. Là encore, son style a évolué, plus proche de l’ébauche, avec une part de toile laissée en réserve.

 

Deux petites sœurs – vers 1901/1902
Huile sur toile, 33 x 41,3 cm
Collection particulière (vente été 2020)


Simone avec un bonnet bleu - vers 1903
Huile sur toile, 61 x 52.1 cm
Rhode Island School of Design, Providence, Rhode Island


Et j'en profite pour montrer cette superbe pointe sèche :


A genoux dans un fauteuil – 1904
Eau-forte et pointe sèche sur papier, 30 x 24,2 cm
Wadsworth Atheneum, Hartford



La fin de sa carrière est positive au plan de sa reconnaissance artistique : 


Signe de sa notoriété auprès du grand public, elle est sollicitée en 1906, pour une estampe parue dans le supplément de Noël de La Vie Heureuse.

 

Supplément de Noël de La Vie Heureuse – 15 décembre 1906, p.23
Source : RetroNews / BNF

En 1908, elle expose des pastels chez le marchand Ambroise Vollard, qui a constitué une collection très importante de ses œuvres.


Sa première biographie paraît en 1913, la ville de Philadelphie la couvre de distinctions honorifiques et elle reçoit la Légion d’honneur en 1904. Cependant, malade, elle cesse de peindre en 1914 et devient aveugle en 1921… 


Mary Cassatt meurt le 14 juin 1926, à l’âge de quatre-vingt-trois ans, dans sa propriété du Mesnil-Théribus.


*

Mary Cassatt est généralement classée dans les expressionnistes et si sa technique l’est sûrement - du moins dans les années 1880 - elle tenait, comme Degas, à être considérée comme indépendante. Cela n’a sans doute pas aidé à sa reconnaissance en France et même Degas disait à son propos : « Je ne supporte pas qu’une femme dessine aussi bien ! »

Très célèbre aux Etats-Unis où l’on trouve ses œuvres dans toutes les grandes collections, Mary Cassatt reste assez méconnue en France : elle est peu présente dans les collections nationales (le musée d’Orsay ne conserve que quatre œuvres mineures, si on se fonde sur son site de collections) et elle n’a bénéficié en France, depuis son décès, que d'une seule exposition, au musée Jacquemart-André « Mary Cassatt, une impressionniste américaine à Paris », en 2018.


Je termine, bien sûr, avec  une nature morte, la seule qu'elle paraît avoir réalisée.

 

Vase de lilas à la fenêtre – 1882/83
Huile sur toile, 61,5 x 51,1 cm
The Metropolitan Museum of Art, New York



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 N.B : Pour voir d’autres notices de ce blog, si elles n’apparaissent pas, vous pouvez cliquer sur « Afficher la version Web » en bas de cette page.


 

 

 





mercredi 27 octobre 2021

Berthe Morisot (1841-1895)



Autoportrait -1885
Huile sur toile 61 x 50 cm
Musée Marmottan Monet, Paris
(photographié au musée)

Si j’avais trouvé un autre autoportrait de Berthe, je n’aurais pas choisi celui-là, parce que sa fille Julie a raconté dans son Journal que sa mère l’avait roulé et rangé au fond d’une armoire. Ce n’est pas l’idée que je me fais d’un « autoportrait de postérité », même s’il a été présenté à la première exposition posthume de Berthe, un an après sa mort. Mais voilà, tous les autres la représentent avec sa fille. Et puis cet autoportrait est fort : Berthe nous regarde avec détermination et elle tient à la main, dans un tourbillon, les attributs de son art, palette et pinceaux !


Lorsque naît Berthe Morisot, le 14 janvier 1841, son père, Edme Tiburce Morisot, architecte de formation, est préfet du Cher. Autant dire que son milieu d’origine ne la prédestine pas particulièrement à tenir les pinceaux ! La famille suit les affectations du père : Calvados, Ille-et-Vilaine puis Paris où il finit par être nommé conseiller à la Cour des comptes en 1852.

Berthe a 11 ans, elle effectue sa scolarité, comme ses deux sœurs ainées, au cours Désir et, pour parfaire leur éducation, on leur fait étudier dessin et piano. Seules Edma et Berthe s’intéressent à la peinture et demandent à rejoindre le cours de Joseph Guichard, élève d’Ingres et de Delacroix. Celui-ci prévient leurs parents que leurs filles sont douées et qu’elles ne se satisferont pas d’une pratique en dilettante. Les parents laissent faire, ce qui n’est pas rien.

Berthe et Edma s’inscrivent au Louvre en 1858, en tant qu’élève de Guichard et copient des grands maîtres, Véronèse (1528-1588) et Titien (1485 – 1576).

Grâce à Guichard, Edma et Berthe, qui souhaitent peindre en plein air, rencontrent Camille Corot. Elles travaillent avec lui puis avec son élève et ami, Achille Oudinot. Tous trouvent qu’Edma est la plus douée mais Berthe s’accroche. Elle écrit dans son journal : « Plus on veut, mieux on veut, au moral comme au physique. J’ai toujours eu la sensation du gouffre ; gouffre de l’action, du rêve, des souvenirs, du désir, etc… du beau […] il est grandement temps d’agir, de considérer la minute présente comme la plus importante des minutes, et de faire ma perpétuelle volupté de mon tourment ordinaire, c’est-à-dire du travail. »

Jean-Baptiste-Camille Corot (1796-1875)
Souvenir de Mortefontaine – vers 1864
Huile sur toile, 65 x 89 cm
Le Louvre, Paris

Berthe Morisot (1841-1895)
Vieux Chemin d'Auvers - 1863
Huile sur toile, 45 x 23cm
Collection particulière

En 1864, Berthe et Edma présentent chacune deux toiles au Salon de Paris, en tant qu’élèves de Guichard et Oudinot. C’est à nouveau Edma qui est la plus remarquée par la critique. C’est cette année-là, aussi, que Berthe rencontre la sculptrice Adèle d’Affry (Marcello, voir sa notice) dont elle deviendra l’amie et qui exécutera un buste d’elle puis un portrait à l’huile quelques années plus tard.

La même année, la famille Morisot s’installe au 16 de la rue Franklin, à Passy, en face de leur précédente adresse. Dans cette maison, les Morisot reçoivent, tous les mardis, des artistes comme Corot, Carolus-Duran et Degas mais aussi Jules Ferry puis, plus tard, Emile Zola. Et aussi le peintre belge Alfred Stevens qui fera de Berthe ce portrait qu'il offrira à ensuite à Edouard Manet :


Alfred Stevens (1823-1906)
Portait d’une jeune femme (Berthe Morisot) – 1868
Huile sur panneau, 55 x 39 cm
National Gallery of Ireland, Dublin

C’est là aussi que leur père fait construire pour ses filles un atelier dans le jardin. Les Morisot resteront une dizaine d’années à cette adresse et Berthe y peindra plusieurs œuvres, comme Femmes et enfant au balcon (1872) où l’on voit les jardins du Trocadéro, le Champ-de-Mars et le dôme des Invalides.

 

Femme et enfant au balcon - 1872
Huile sur toile, 60 x 50 cm
Artizon Museum, Tokyo

Il est probable que la jeune femme présentée sur le tableau est Yves, la sœur aînée de Berthe née en 1838, avec sa fille Paule Gobillard, surnommée Bichette. C’est l’époque où Berthe est en relation étroite avec Edouard Manet qui l’influence visiblement.

Berthe et Edma ont rencontré Edouard Manet au Louvre, par l’intermédiaire de leur ami Henri Fantin-Latour (1836-1904). Berthe est impressionnée par le génie de Manet et lui par la personnalité de Berthe, qui accepte de poser pour Le Balcon, qui fut reçu plutôt fraîchement par la critique du Salon de 1869. Les frères Manet sont régulièrement invités aux « mardis » de madame Morisot et Edouard peindra une dizaine de portraits de Berthe au cours des années suivantes, dont le somptueux Portrait au bouquet de violettes. 

 

Édouard Manet (1832-1883)
Berthe Morisot au bouquet de violettes - 1872
Huile sur toile, 55 x 38 cm
Musée d’Orsay, Paris
© Musée d’Orsay, RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt

A propos de ce portrait, Paul Valery écrira : « Je ne mets rien, dans l’œuvre de Manet, au-dessus d’un certain portrait de Berthe Morisot, daté de 1872. Je puis dire à présent que le portrait dont je parle est poème. Par l’harmonie étrange des couleurs, par la dissonance de leurs forces ; par l’opposition du détail futile et éphémère d’une coiffure de jadis avec je ne sais quoi d’assez tragique dans l’expression de la figure. Manet fait résonner son œuvre, compose du mystère à la fermeté de son art. Il combine la ressemblance physique du modèle, l’accord unique qui convient à une personne singulière, et fixe fortement le charme distinct et abstrait de Berthe Morisot. » (Préface du catalogue de l’exposition marquant les cent ans de la naissance d’Edouard Manet)

En cette année 1869, les sœurs Morisot ne participent pas au Salon qui commence en mai : au mois de mars précédent, Edma a épousé Adolphe Pontillon, lieutenant de vaisseau, stationné à Lorient. La carrière de peintre d’Edma va s’arrêter là. L’été suivant, Berthe va rejoindre sa sœur et peint ce lumineux tableau que Manet qualifiera de chef-d’œuvre.

 

Le port de Lorient – 1869
Huile sur toile, 43,5 x 73 cm
National Gallery of Art - Washington D.C.

Elle peint aussi ce portrait de sa sœur qu’elle présentera au Salon de 1870 – où il fera sensation – avec un autre tableau intitulé La Lecture, que Manet avait jugé approprié de « réviser » (c’est-à-dire qu’il intervint dessus), à la grande fureur de Berthe.

 

Jeune femme à la fenêtre – 1870
Huile sur toile, 54,8 x 46,3 cm
National Gallery of Art – Washington D.C.

Ce portrait où Edma jeune mariée un peu désœuvrée, assise à côté d’une fenêtre qui paraît ouvrir sur un balcon, reste l’œil perdu sur son éventail comme si elle y retrouvait des joies révolues, exprime peut-être ce que ressent sa sœur, après l’avoir vue abandonner sa carrière artistique ?

Puis vient la guerre et le siège de Paris, Berthe se réfugie à nouveau chez sa sœur. A son retour, elle présente seulement un pastel au Salon, son autre toile ayant été refusée. Elle commence à vendre un peu, bien peu, par l’intermédiaire du marchand d’art Durand-Ruel et en ressent une grande frustration.


La robe rose (Portrait d’Albertie-Marguerite Carré) – vers 1970
Huile sur toile, 54,6 x 67,3 cm
The Metropolitan Museum of Art, New York


Jeune femme – 1871
Huile sur toile, 54,6 x 46 cm
The Museum of Fine Art, Houston, Texas


En dépit de ses maigres succès et de l’insistance de sa mère qui commence à trouver qu’il serait séant qu’elle se mariât, Berthe travaille avec passion et peint cette année-là l’un de ses tableaux les plus célèbres, Le Berceau.

Le Berceau – 1872
Huile sur toile, 56 x 46,5 cm
Musée d’Orsay, Paris
© Musée d’Orsay, RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt

A nouveau, aucune des toiles de Berthe n’est retenue pour le Salon, ni cette année-là, ni la suivante. Tout juste la laisse-t-on montrer des pastels, jugés sans doute plus appropriés à sa féminité.

La mort de son père, en janvier 1874, la persuade qu’elle doit se marier pour ne plus être une charge pour sa famille. 

C’est alors qu’elle décide de répondre à la proposition de Degas de participer à la première exposition de la « Société anonyme coopérative des artistes peintres, sculpteurs, graveurs et lithographes » (l’exposition où est présentée Impression, soleil levant) qui se tient dans les anciens ateliers du photographe Nadar. Elle est la seule femme à y figurer cette année-là et, ce faisant, renonce définitivement à exposer au Salon officiel. Elle y présente neuf œuvres, dont La Lecture 


La Lecture – 1873
Huile sur toile, 46 x 71,8 cm
The Cleveland Museum of Art, Ohio

… et Cache-cache, où l'on trouve déjà toutes les caractéristiques de l’impressionnisme : palette claire, contours fondus et inscription des personnages dans un paysage lumineux.


Cache-cache – 1873
Huile sur toile, 45 x 55 cm
Collection particulière

L’été suivant, le frère d’Edouard, Eugène Manet, la courtise. Berthe l’épouse le 22 décembre 1874, en dépit des réticences de son jeune frère, Tiburce, qui lui conseille de n’épouser personne et d’adopter plutôt « la liberté d’allure d’une veuve honnête ». Sur l’acte de mariage, les deux époux sont déclarés « sans profession » mais ils sont à l’abri des soucis matériels. Pour autant, Berthe ne renonce pas à son art et continuera à signer ses œuvres de son nom, exemple rare en son temps. Quant à Eugène, il ne manquera jamais de promouvoir avec ardeur la carrière de sa femme.

En mars de l’année suivante, elle se joint à Renoir, Monet et Sisley qui organisent une vente aux enchères de leurs œuvres à Drouot, soutenue par Durand-Ruel. Berthe y propose 5 toiles, quelques pastels et des aquarelles. C’est une œuvre de Berthe qui atteint le prix le plus élevé. Cependant, la vente est considérée comme un échec collectif, les enchères n’ayant pas été suivies.

Les nouveaux époux partent en voyage de noce en Angleterre. Berthe y peint son premier portrait d’Eugène, prétexte à la représentation du jardin et du port vus à travers la fenêtre et dont elle restitue admirablement la luminosité grise où éclatent quelques points colorés.

 

Eugène Manet à l’ile de Wight – 1875
Huile sur toile, 38 x 46
Musée Marmottan Monet, Paris

En avril suivant, s’ouvre la deuxième exposition des impressionnistes. Cette fois, Berthe y présente vingt œuvres, dont Au Bal, pour lequel elle a fait poser un modèle dans son salon puisqu’elle n’a pas d’atelier.

Au Bal – 1875
Huile sur toile, 62 x 52 cm
Musée Marmottan Monet, Paris

La façon un peu raide dont la jeune femme tient son éventail est surprenante. J’imagine qu’il s’agit de montrer ce qu’il représente, visiblement une scène galante dans l’esprit du XVIIIe siècle, que Berthe appréciait particulièrement. On croit reconnaître l'éventail ci-dessous qui a fait partie de la collection personnelle de l'artiste.

La Bergère et l’Oiseleur – vers 1760/1780
Ivoire sculpté, gouache et or sur papier
Musée Marmottan-Monet 

« L’œuvre appartient à un groupe de portraits de jeune fille en toilette de bal. […] L’intérêt de l’artiste se porte sur le rendu de la robe et des accessoires. La mousseline du corsage, les gants et l’éventail à dominante blanche contrastent avec la chevelure, le regard et certaines fleurs sombres. Des touches de jaune, rouge, bleu et vert égayent l’œuvre et complètent sa palette restreinte caractéristique de l’année 1875. » (Extrait de la notice du musée)


Petite pause pour montrer deux beaux portraits d'Edma de la même époque :


Portrait de femme – 1872/1875
Huile sur toile, 85,6 x 56 cm
The Courtauld, Londres

Ce portrait se caractérise par une sincérité non idéalisée qui implique que la peintre connaît très bien le modèle. Cela a conduit penser qu’il pourrait s’agir de sa sœur, Edma.


Portrait de Madame Edma Petillon, née Morisot – 1876
Pastel sur papier
Musée d’Orsay, Paris
(Photographié dans l’exposition « Pastel de Millet à Redon », musée d’Orsay, mai 2023)

Berthe réalise ce portrait de sa sœur alors que celle-ci est confinée, attendant son deuxième enfant. Il s’agirait de son deuxième pastel sur environ 200 et montre son degré d’aisance et sa capacité à en varier les effets. Elle l’utilise ici mouillé, en épaisseur pour le visage et à la brosse pour les motifs fleuris du canapé. Le fond est traité en aplats de pigments gris pâle, un procédé qu’affectionne particulièrement Manet. (Extrait de la notice de l'exposition)

Encore Edma, probablement, cette jeune femme sur une terrasse qui conjugue scène d’intérieur et peinture du paysage. L’arrière-plan, rendu comme à la hâte, est particulièrement évocateur de la lumière parisienne, changeante et légèrement brumeuse. 

Jeune femme arrosant un arbuste - 1876
Huile sur toile, 40 x 31,7 cm
Virginia Museum of Fine Art, Richmond, Virginie

Revenons à l'exposition des impressionnistes. Pour en restituer la réception critique, citons simplement le journaliste Albert Wolff, qui assène, dans Le Figaro du 3 avril, qu’il a vu les travaux de « cinq ou six aliénés, dont une femme » …

Qu’importe. En 1877, à la troisième exposition impressionniste organisée par Gustave Caillebotte, c’est douze œuvres que présente Berthe, dont La Psyché, son tableau le mieux reçu par la critique, Jeune femme à sa toilette et Tête de jeune fille. Aujourd’hui, le livret de cette exposition paraît idéal : entre autres chefs-d’œuvre, Caillebotte présente Paris, par temps de pluie, Degas sa Répétition de ballet, Cézanne une Etude de Paysage, Pissarro ses vues de Pontoise et Monet sa fameuse Arrivée de train gare Saint-Lazare

 

La Psyché – 1876
Huile sur toile, 65 x 54 cm
Museo national Thyssen-Bornemisza, Madrid



Jeune femme à sa toilette - vers 1875
Huile sur toile, 60,3 x 80,4 cm
The Art Institute, Chicago, Illinois

A propos de ce tableau, Emile Zola écrit qu'il est illuminé « comme une véritable perle […] les gris et les blancs des étoffes jouent une symphonie très délicate.» 

*

Je ne résiste pas au plaisir d’ajouter ici ce tableau exactement contemporain de Manet dont chacun sait « qu’il n’était pas impressionniste. » (!)


Édouard Manet (1832-1883)
Devant le miroir - 1876
Huile sur toile, 93 x 71,6 cm
Salomon R. Guggenheim Museum, New York

*


Tête de jeune fille - 1876
Huile sur toile
Collection particulière

Peut-on exprimer plus clairement l’ennui profond que ressent cette jeune-fille, posée sur son canapé, attendant que « cela » se termine d’une façon ou d’une autre ? 

La Tête de Jeune fille (Femme à l’éventail) de Berthe est comparée au « ton et l’allure les recherches de M. Stevens », grâce à sa touche « libre et précise ». C’est assez étonnant quand on pense aux œuvres aux contours bien plus précis de Stevens. En fait, Berthe est en train de développer une « esthétique de l’ébauche » qui plait (ou déplait) mais s’impose comme un style qui lui est propre. 

 

Alfred Stevens (1823-1906)
Rêverie - vers 1878
Huile sur toile, 56.2 x 41.3 cm
Collection particulière (vente 1998) 

On voit aussi se mettre en place, progressivement, les thèmes récurrents de l’œuvre de Berthe : des personnages - on disait à l’époque des « figures » - saisis dans la nature ou installés dans un salon et/ou devant une fenêtre, le plus souvent des femmes dans leur intimité ou en tenue d’apparat. Une femme de son milieu doit chercher ses modèles dans son entourage familial ou social, ce qui n'empêche pas Berthe, comme les autres impressionnistes, de représenter ponctuellement les femmes qui travaillent autour d'elle, femmes de chambres, lingères, cuisinières, qui sont nombreuses à intervenir dans les foyers de la bourgeoisie aisée. 

L’année suivante, Berthe met au monde sa fille unique, Julie, le 14 novembre 1878. Cette année-là, elle n’ira pas à l’exposition impressionniste à laquelle participent pour la première fois deux autres femmes, Marie Bracquemond et Mary Cassatt avec laquelle Berthe a des relations un peu distantes. Cette année-là, aussi, meurt de tuberculose son amie sculptrice, Adèle-Marcello.

Berthe participe aux expositions impressionnistes de 1880 et 1881 qui commencent à attirer un nombre significatif de visiteurs. Elle y montre des aquarelles et des pastels et une quinzaine d’huiles, dont Le lac du bois de Boulogne et Jeune fille en toilette de bal. La critique devient dithyrambique (« Madame Berthe Morisot est Française par la distinction, l’élégance, la gaieté, l’insouciance » et « manie la palette et le pinceau avec une délicatesse vraiment surprenante ») mais reste convaincue du caractère « féminin » de son travail, au grand agacement de Berthe. 


Le lac du bois de Boulogne (Jour d’été) - 1879
Huile sur toile, 45.7 x 75.2 cm
National Gallery, Londres

Je pense qu'on peut placer ici cette scène non datée où semblent apparaître les mêmes protagonistes, dans la même tenue.

Au bois de Boulogne – sans date
Huile sur toile - 61 x 73,5 cm
Nationalmuseum, Stockholm


Jeune femme en toilette de bal - 1879
Huile sur toile, 71,5 x 54,0 cm
Musée d’Orsay, Paris
(Photographié au musée)

Jeune femme en toilette de bal  (détail)

Mallarmé admirait ce tableau où la toilette, avec ses touches de blanc et de vert, fait écho aux fleurs placées derrière le modèle et souligne la résonnance entre la figure et le fond. C’est lui qui le fit acquérir par l’Etat, quelques années plus tard, car le tableau avait été retenu avant même l’ouverture de l’exposition.

A l’exposition impressionniste de 1880, figurent Eté et Hiver, représentations de la Parisienne moderne.

 

Eté (Jeune femme devant une fenêtre) - 1879
Huile sur toile, 76 x 61 cm
Musée Fabre, Montpellier

Le critique Paul-Armand Silvestre s'extasie devant l’Hiver : « avec sa figure, si courageusement moderne, de la Parisienne bravant le froid dans ses fourrures ».



Hiver - 1880
Huile sur toile, 74,9 x 51,6 cm
Dallas Museum of Art, Texas

Hiver (détail)
(Photographié au musée Marmottan en décembre 2023)


Les Manet-Morisot achètent un terrain sis 40 rue de Villejust (aujourd’hui rue Paul-Valéry), près du bois de Boulogne, et lancent la construction d’un petit hôtel particulier. Ils passent tous les étés à Bougival, où ils louent une propriété avec un jardin qui inspire à Berthe de nombreuses compositions, où Julie figure très souvent en compagnie de la jeune servante de la famille.


Eugène Manet et sa fille dans le jardin de Bougival – 1881
Huile sur toile, 73 x 92 cm
Musée Marmottan Monet, Paris


La chaise panier – 1882
Huile sur toile, 61,3 x 75,5 cm
The Museum of Fine Art, Houston, Texas


Femme et enfant dans un pré à Bougival – 1882
Huile sur toile, 60,1 x 73,3 cm
National Museum Wales, Cardiff


La Fable – 1883
Huile sur toile, 39,6 x 31,6 cm
Collection particulière
(photographié au musée Marmottan en décembre 2023)



La leçon de couture - 1884
Huile sur toile, 59 x 71,1 cm
Minneapolis Institute of Art, Minnesota


La septième exposition impressionniste (1882) est un succès, on y compte plus de 300 visiteurs par jour, et Berthe figure aussi dans une exposition londonienne. Après l’été, pendant lequel Berthe et Mary Cassatt se rendent ponctuellement visite, les Manet-Morisot restent à Bougival pour l’hiver car leur maison n’est pas terminée.

Au mois d’avril 1883, Edouard Manet meurt brutalement, des suites de la syphilis.

À l’automne, Durand-Ruel monte une exposition impressionniste à Londres, Paintings, Drawings, and Pastels by Members of La Société des Impressionnistes où Berthe est représentée par trois peintures. Pendant l’hiver, le couple Manet s’installe enfin dans sa nouvelle maison. C’est le salon qui sert d’atelier à Berthe. Depuis l’atelier construit par ses parents, elle n’a jamais eu d’espace personnel pour peindre. On est encore loin d’une « chambre à soi »...

Avec Suzanne Leenhoff, la veuve d’Edouard, la famille Manet prépare son exposition rétrospective qui aura lieu à l’Ecole des Beaux-Arts avec 179 œuvres et un catalogue préfacé par Emile Zola. Le salon de la rue de Villejust devient, tous les jeudis soir, le quartier général de leurs amis, Degas, Mallarmé (qui, très impressionné par la personnalité de Berthe, l’appelle « l’amicale méduse »), Monet, Renoir, mais aussi Puvis de Chavannes, James Abbott McNeill Whistler et Gustave Caillebotte.

L’été 1884 sera la dernière année de Bougival. Berthe y peint cet extraordinaire Jardin, explosion de couleurs lumineuses où les détails sont à peine esquissés, comme saisis dans l’instant. Il sera présenté à la huitième et dernière exposition impressionniste de 1886, avec la Petite servante, Roses trémières et Au bain, toile largement saluée par la critique mais qui ne sera pas vendue et sera finalement achetée par Claude Monet.

 

Le jardin à Bougival – 1884
Huile sur toile, 73 x 92 cm
Musée Marmottan Monet, Paris

Devant cette toile, on pense à ce que Mallarmé disait des œuvres de Berthe : « dans un tel milieu de joie, de fête et en fleur », chaque toile fixe « un suspens de perpétuité chatoyante. » (« Berthe Morisot » in Quelques médaillons et portraits en pieds, Divagations, OC II, p. 151/152)

Pour autant, Berthe est rarement satisfaite de son travail. Elle exprime souvent les doutes que ses recherches lui inspirent : « … j’ai pensé tout le temps à ce qu’Édouard en ferait ; cela naturellement me fait trouver mon essai d’autant plus laid. » (Lettre à Eugène, 1882)


Roses trémières – 1884
Huile sur toile, 65 x 54 cm
Musée Marmottan Monet, Paris



Jeune femme au divan (détail)



« La femme représentée est certainement un modèle, sinon professionnel, du moins qui posait de temps à autre contre rémunération. Elle n'est ni une parente ni une amie et ma mère ne connaissait pas son nom. » (Denis Rouard, petit-fils de Berthe, 9 octobre 1969)




La petite servante – 1886
Huile sur toile, 71 x 44 cm
Collection particulière 


Au bain 1885/86
Huile sur toile, 92,1 x 73,3 cm
The Clark Art Institute, Williamstown, Massachusetts


L’été suivant, les Manet-Morisot partent en villégiature à Jersey. Berthe y peint l’Intérieur de cottage, où l'on voit Julie jouer à la poupée devant une fenêtre donnant sur un jardin, au-dessus d’un petit port. C’est au retour de Jersey qu’Eugène contracte une maladie respiratoire dont il ne se remettra jamais vraiment.

Intérieur de cottage - 1886
Huile sur toile, 50 x 60 cm
Musée d’Ixelles, Bruxelles


Bateaux à quai - 1886
Huile sur toile - 49,8 x 59 cm
Collection particulière (vente 2021)

En 1887, Berthe participe à plusieurs expositions, dont celle de La Revue indépendante, où des œuvres de Manet, Pissarro et Georges Seurat figurent aussi, et l'exposition annuelle des XX organisée au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles où elle présente cinq œuvres, dont l’Intérieur de cottage, qui y sera très apprécié.

Mallarmé aurait un jour déclaré à Berthe : « une chose dont je suis heureux, c’est de vivre à la même époque que Monet ». Il tenta de réunir ses amis autour d’un projet d’illustration d’une anthologie intitulée Le Tiroir de Laque, auquel il proposa à Monet mais aussi à Berthe, Renoir, Degas et John Lewis Brown (1829- 1890) de collaborer. Le projet n’aboutit pas et Mallarmé sollicita Berthe pour illustrer un autre de ses poème, « Nénuphar blanc ». Elle réalisa plusieurs pointes sèches (que je ne suis hélas pas parvenue à retrouver…) pour ce projet qui n'aboutit pas non plus et lui laissa de grands regrets car elle avait l'impression qu'il lui aurait permis d'avoir fait « quelque chose pour laquelle on se souviendrait d'elle ».

L'anthologie paraîtra finalement en 1891 sous le titre Pages, avec une eau-forte de Renoir en frontispice. 

Renoir-Mallarmé
Pages
Grand in-8 broché
Bruxelles, Edmond Denan, 1891, 192 p., 325 exemplaires
Collection particulière


Berthe travaille aussi beaucoup au pastel qu’elle pratique depuis sa jeunesse, notamment pour portraiturer Julie.

La fille au jersey bleu – 1886
Pastel sur toile, 100 x 81 cm
Musée Marmottan Monet, Paris

Le travail du visage montre qu’elle maîtrise parfaitement la pratique « classique » du pastel. Le traitement du décors et du vêtement est d’une facture beaucoup plus moderne, comme l'est aussi celle de ce portrait de la cousine d'Edouard et Eugène Manet :


Mlle Marie de Vaissière – 1887
Pastel sur papier
Collection particulière 
(Photographié au musée Marmottan)

C’est à cette époque que Berthe se rapproche de Renoir dont elle a visité l’atelier l’année précédente. Elle lui commande un portrait de Julie avec son chat :

 

Auguste Renoir (1841-1919)
Julie Manet - 1887
Huile sur toile, 65,5 x 53,5 cm
Musée d’Orsay, Paris
© Musée d’Orsay, RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt

Le nouveau style de Renoir ne convainc pas ses proches et Degas en aurait fait un commentaire assez caustique : « A force de faire des figures rondes, Renoir fait des pots de fleurs ». Mais Berthe est très sensible à cette nouvelle manière qui rejoint ses propres recherches.

Berthe s’occupe parallèlement de sa nièce, fille de sa sœur aînée, qui souhaite devenir artiste. Elle l’inscrit au Louvre comme copiste, supervise son travail et la peint devant son chevalet, dans le salon familial.

 

Paule Gobillard peignant – 1887
Huile sur toile, 86 x 94 cm
Musée Marmottan Monet, Paris


Paule Gobillard peignant  (détail)


Dans un décor resté flou, seul le visage de la jeune fille est vraiment terminé. Le « double bras » figure le mouvement du pinceau entre la toile et la palette…


Paule Gobillard en robe de bal – 1887
Huile sur toile
Collection particulière 
Photographié dans l'exposition "Berthe Morisot et l'art du XVIIIe siècle"
au musée Marmottan-Monet en décembre 2023


Paule Gobillard en robe de bal (détail)


Paule Gobillard en robe de bal (détail)


Berthe expose régulièrement, grâce à Durand-Ruel qui ouvre une succursale de sa galerie à New York où il montre ses œuvres, ainsi qu’à l’exposition impressionniste qu’il organise dans sa galerie parisienne. Il exposera ce portrait de Louise Riesener où apparaît le goût de Berthe pour le XVIIIe siècle, notamment dans la table en marqueterie et la délicieuse petite nature morte qui s'y trouve.


Portrait de Louise Riesener – 1888
Huile sur toile, 73,3 x 92 cm
Musée des Beaux-Arts de Limoges
(photographié au musée)


Portrait de Louise Riesener (détail)


À l’automne, la famille part à Cimiez, près de Nice et y reste jusqu’au printemps 1888. Ils y louent la villa Ratti. C’est peut-être là que Berthe peint cette charmante lectrice. Le travail de la lumière qui devait entrer à flot par la fenêtre ouverte y est particulièrement sensible.


La Lecture – 1888
Huile sur toile, 74,3 × 92,7 cm
Museum of Fine Arts, St. Petersburg, Floride


Berthe dessine la végétation méditerranéenne.

Les Aloès, villa Ratti – 1889
Mine de plomb, 29 x 23 cm
Musée Marmottan Monet, Paris

Berthe a un rapport difficile avec le dessin dont son tout premier professeur l’a un peu dégoutée. Elle ne pratique que des esquisses rapides. Elle retrouvera le plaisir de dessiner en travaillant avec Renoir, au début des années 1890.


Les Aloès, Cimiez – 1889
Huile sur toile, 69 x 50 cm
Collection particulière (vente 2021)


Cueillette d’orange - 1889
Huile sur toile
Collection particulière

De retour à Paris, Berthe aide Monet à lancer une souscription pour décider l’Etat à acquérir l’Olympia de Manet, propriété de sa veuve et convoitée par un américain. Ayant réuni 97 % de la somme demandée, Monet offre officiellement le tableau à l’Etat qui le refuse pour le Louvre mais finalement accepte de l’accueillir au musée du Luxembourg…

Il ne semble pas que Berthe et Mary Cassatt aient été très intimes même si cette dernière a visiblement fait quelque effort pour se rapprocher de Berthe. Elle la recommande en 1890 à l’exposition du Woman’s Art Club de New York et les deux peintres iront ensemble découvrir « les merveilleux Japonais » de l’exposition sur la gravure japonaise organisée par l’École des Beaux-Arts de Paris. Sur ce plan, Mary est beaucoup plus expérimentée que Berthe ; elle a déjà exécuté plus d’une centaine de gravures alors que Berthe commence à peine à s'initier à la pointe sèche et à l’eau-forte. 

La leçon de dessin (autoportrait avec Julie) – 1888/1889
Pointe sèche, 35,4 x 27,8 cm
Source Gallica / Bibliothèque nationale de France



Fillette au chat (Julie Manet) –  vers 1889
Pointe sèche, 15 x 11,8 cm
Collection particulière

L’année suivante, une nouvelle exposition impressionniste est organisée par Durand-Ruel. Berthe y montre onze œuvres. Berthe et Eugène louent une propriété à Mézy ; Berthe et Renoir travaillent ensemble d’après nature pendant l’été. Il arrivait aussi à Berthe de peindre en compagnie d'Eugène mais probablement pas dans la complicité artistique qu'elle avait connue avec sa sœur. Peindre avec Renoir, qu'elle admirait tout en le considérant comme son égal (ils avaient le même âge), ravivait sans doute le souvenir de cette complicité. 

 

Auguste Renoir (1841-1919)
Jeunes filles dans le jardin de Mézy – 1891
Huile sur toile, 55,5 x 46 cm
Collection particulière


Berthe Morisot (1841-1895)
Foin à Mézy – 1891
Huile sur toile, 50 x 61 cm
Collection particulière

Berthe commence à Mézy sa série des Cerisiers, pour laquelle elle fait poser Julie et sa cousine Jeannie Gobillard.

L’œuvre ne sera jamais exposée au public du vivant de Berthe.

 

Le Cerisier- 1891
Huile sur toile 154 x 84 cm
Musée Marmottan Monet, Paris

Elle peint cette Bergère couchée la même année :

Bergère couchée – 1891
Huile sur toile
Musée Marmottan-Monet, Paris
Photographiée dans l'exposition "Le décor impressionniste, aux sources des Nymphéas"
musée de l'Orangerie, juillet 2022


Au cours d’une randonnée, en octobre, Eugène et Berthe découvrent puis achètent, un château du XVIIe siècle, Le Mesnil, près de Mantes. Eugène meurt le 13 avril suivant, Berthe se retire un mois au Mesnil puis prépare sa première exposition personnelle, déjà organisée par Eugène juste avant son décès.

La première exposition monographique de Berthe se tient du 25 mai au 2 juin 1892 à la galerie Boussod, Valadon et Cie, 19 boulevard Montmartre, avec quarante-trois œuvres. Les ventes sont peu nombreuses.

Avec Julie, Berthe s’installe dans un appartement en location rue Weber et se fait aménager un atelier dans les chambres de bonne. Pendant l’été, elles séjournent avec Mallarmé à Valvins dans une petite auberge en bord de Seine. C’est là que Julie commence à rédiger son Journal (1893-1899). Sa mère continue à la prendre régulièrement comme modèle :


Jeune fille au divan – 1893
Huile sur toile, 45,9 x 55,1 cm
Musée Léon-Dierx, Saint Denis de la Réunion


Julie Manet et sa levrette Laërte – 1893
Huile sur toile, 73 x 94,5 cm
Musée Marmottan Monet, Paris

Julie, en robe de deuil, pose dans l’appartement de la rue Weber. Sa chienne lui a été offerte par Mallarmé que Berthe a déjà désigné par testament comme son tuteur légal. L’œuvre tiendra une place centrale dans l’exposition posthume de Berthe et sera achetée par Claude Monet en mémoire de son amie.

L’année suivante, c’est Gustave Caillebotte, peintre, mécène et organisateur des quatre premières expositions impressionnistes, qui disparaît. Il a légué toute sa collection de peinture (qui ne comporte aucun tableau de Berthe) au musée du Luxembourg qui n’en accepte qu’une moitié, soit une trentaine. Lui aussi restera méconnu en France pendant près d’un siècle… 

Quelques temps plus tard, sur l’intervention de Mallarmé, le musée du Luxembourg achète Jeune femme en toilette de bal, (voir supra) premier tableau de Berthe à figurer dans une collection publique.

L’été suivant, Berthe et Julie parcourent la Bretagne puis au début de l’année 1895, Berthe participe à l’exposition du Woman’s Art Club de New York. Julie tombe malade, probablement d’une grippe que Berthe contracte en la soignant. 

Berthe Morisot meurt le 2 mars 1895, dans l’appartement de la rue Weber.


Photographie d’Edgar Degas
Paule Gobillard, Jeannie Gobillard, Julie Manet et Geneviève Mallarmé – 1895
Tirage argentique à la gélatine
The Metropolitan Museum of Art, New York

Degas a photographié la fille de Mallarmé, Geneviève, et « les petites filles Manet » - Julie Manet et ses cousines Paule et Jeannie Gobillard, toutes trois orphelines, que les artistes avaient pris sous leur aile. Assises face à Degas, dont l'appareil se reflète dans le miroir, les jeunes femmes sont jointes l'une à l'autre par la noirceur continue de leurs robes, toile de fond du doux rythme de leurs mains. (Extrait de la notice du musée)

Pendant le reste de l’année, Mallarmé, Renoir, Degas et Monet préparent avec Julie - qui a dix-sept ans et raconte ces préparatifs avec passion dans son Journal - une exposition en mémoire de leur amie. Elle ouvrira le 5 mars 1896 à la galerie Durand-Ruel avec trois cent quatre-vingts œuvres. Le catalogue porte en frontispice le Portrait de Berthe Morisot (1873) par Manet et s'ouvre sur une préface de Mallarmé qui se termine par ces mots :

« Rappeler, indépendamment des sortilèges, la magicienne, tout à l’heure obéit à un souhait, de concordance, qu'elle même choya, d’être perçue par autrui comme elle le pressentit : on peut dire que jamais elle ne manqua d’admiration ni de solitude. Plus, pourquoi – il faut regarder des murs – au sujet de celle dont l’éloge courant veut que son talent dénote la Femme – encore, aussi qu’un Maître : son œuvre, achevé, selon l’estimation de quelques grands originaux qui la comptèrent comme camarade de lutte, vaut, à côté d’aucun, produit par un d’eux et se lie, exquisément, à l’histoire de la peinture, pendant une époque du siècle. »


Edouard Manet (1832-1883)
Portrait de Berthe Morisot – 1873
Huile sur toile, 26 x 34 cm
Musée Marmottan Monet, Paris

*

En dépit de l’œuvre considérable qu’elle a laissé – plus de 420 huiles, 181 pastels et 240 aquarelles, Berthe est rapidement classée par les critiques d’art comme un peintre mineur du mouvement impressionniste voire simplement évoquée comme modèle de Manet.

Une première exposition rétrospective est montrée au Mount Holyoke College Art Museum (Massachusetts) en 1987 puis à la National Gallery of Art de Washington. Le musée Marmottan-Monet qui lui rendit son premier hommage parisien en 2012, dix ans après le musée des Beaux-Arts de Lille. Enfin, l’exposition « Berthe Morisot, femme impressionniste », monographie coproduite par le Musée national des Beaux-Arts du Québec, la Fondation Barnes, le Dallas Museum of Art et le musée d’Orsay, a été présentée à Paris en 2019.

La place de Berthe Morisot, cofondatrice de l’impressionnisme, est enfin redevenue ce qu’elle n’aurait jamais dû cesser d’être.


*


Je termine avec quelques petites natures mortes. Berthe en composa très peu, ce qui les rend encore plus attachantes ! 

 

Pivoines – vers 1869
Huile sur toile, 40,8 x 33 cm
National Gallery of Art, Washington D.C.


Pomme coupée au pichet – 1876
Huile sur toile, 32 x 41 cm
Musée Marmottan Monet, Paris


Nature morte avec soupière et pomme – 1877
Huile sur toile, 46 x 56,2 cm
Denver Art Museum, Colorado


Bouquet de fleurs sur une cheminée
Aquarelle
Collection particulière



Fleurs blanches dans un bol – 1885
Huile sur toile, 46 x 55 cm
The Museum of Fine Art, Boston, Massachusetts


La Cage – 1885
Huile sur toile, 50,3 x 38 cm
National Museum of Women in the Arts, Washington D.C.


Et dernier clin d'œil, avant de quitter Berthe…  


Chien au ballon – sans date
Huile sur toile, 45 x 41 cm
Collection particulière (vente 2020)



*

 

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