Alexandra Alexandrovna Grigorievitch est née à Bialystok (aujourd’hui en Pologne) le 6 janvier 1882, dans une famille de la petite noblesse aisée et cultivée. Elle est élevée à Kiev, où elle reçoit une éducation classique au lycée de jeune fille, de 1892 à 1899, dans une atmosphère provinciale mais ouverte au monde, du fait du peuplement cosmopolite de la ville. Elle apprend l’allemand et le français, s’intéresse à la poésie française, s’initie au dessin et à la musique, et fréquente l’école d’art de Kiev, de 1899 à 1903 où elle est l’élève, avec Vladimir Bourliouk, du peintre de genre réaliste Mykola Pymonenko (1862-1912).
Selon
les spécialistes de la période, son expérience de vie à Kiev, ses paysages, la
silhouette de la ville, auront une influence déterminante sur la peinture et
l’art d’Alexandra.
Elle se marie avec un avocat d’affaires et s’intéresse très tôt à l’art d’avant-garde russe et ukrainienne.
Dès 1906, elle voyage en Europe, notamment avec le peintre Jawlensky avec lequel elle se rend en Suisse et en Bretagne. Elle reste plusieurs mois à Paris en 1907, se forme à l’académie de la Grande Chaumière où elle fait la connaissance de Fernand Léger.
En janvier 1908, David Bourliouk, le frère de Vladimir, organise à Kiev une exposition intitulée « le Maillon » (Zveno) où Alexandra présente une toile intitulée Suisse. Dans ses mémoires, Bourliouk dit que dans les toiles d’Alexandra « il y avait une froideur verte. »
En février 1909, elle organise avec son amie Natalia Davydovna une exposition de peintures et broderies inspirées de l’art populaire russe mais avec des motifs « suprématistes ». Le suprématisme est un courant d’avant-garde russe créé par Kazimir Malevitch (1879-1935) qui prône l’utilisation de formes simplifiées et de motifs géométriques élémentaires. Un art « sans objet » où la couleur joue un rôle structurant.
En
l’espèce, il s’agissait de prendre ses distances avec un art populaire trop naturaliste. L’exposition a un grand succès et suscite la création
de la Société artisanale kiévienne, présidée par Natalia Davydovna. Cette
société joua un rôle majeur dans la prise de conscience de la nécessité de
renouveler l’art populaire et soutiendra des ateliers paysans de broderie à Verbivka, près de
Kharkiv et à Skoptsy, près de Poltava, qui commenceront à utiliser des motifs
« suprématistes » pour leurs objets utilitaires (tissus, rubans, sacs,
coussins, etc.) au milieu des années 1910. Je ne suis pas parvenue à trouver un
exemple plus contemporain mais on comprend l'idée…
En mars 1909, la presse moscovite annonce la naissance du futurisme, dont la première manifestation apparaît sous la forme d’une publication Le Jardin des Juges (ou Le Vivier aux Juges, j’ai trouvé les deux traductions et je ne sais pas laquelle est la bonne !) qui intègre deux aspects : littéraire, c’est à dire une approche poétique qui privilégie la sensualité et l’imaginaire, et artistique, qui tente une intégration du temps et du mouvement dans l’espace pictural. Les deux frères Bourliouk, les amis d’Alexandra, y participent.
En décembre 1910 a lieu la première exposition du groupe dit « Valet de Carreau » où sont présentées des œuvres des frères Bourliouk, Alexandra Exter, Natalia Gontcharova, Kandinsky, Larionov et Malévitch ainsi que des Français, Gleizes, Le Fauconnier et Metzinger. Mais quelques mois plus tard, une première sécession a lieu au sein du groupe. Pour l’expliquer simplement, certains artistes, comme Natalia Gontcharova, sont critiques à l’égard de l’art occidental qu’ils jugent conservateur, et souhaitent se recentrer sur des thématiques liées à la vie rurale et paysanne avec une polychromie considérée comme « russe ». Un nouveau groupe se crée, la « Queue d’âne », qui se veut plus proche de l’art vernaculaire.
Pendant
ces batailles théoriques (et politiques !), Alexandra continue à voyager,
notamment en Italie où elle se rend en 1910 et 1912. Elle découvre l’art
étrusque qui la touche particulièrement.
On ne peut qu’évoquer ce qu’elle a pu voir, à travers quelques images qui sont des choix purement personnel, en commençant pas l’œuvre la plus universellement connue :
Ou
bien cet autre monument funéraire, dont certains dessins de costumes théâtraux,
qu’Alexandra créera plus tard, évoquent le souvenir.
A
partir de 1910, elle dispose d’un atelier à Paris, au 10, rue Boissonnade et fréquente Elisabeth
Epstein, une amie des Delaunay, ainsi que son compatriote Serge Férat, qui
finance la revue Les Soirées de Paris, dirigée par Apollinaire. Revue
poétique (on peut y lire Sous le pont Mirabeau dans le n°1), très
engagée dans les questions artistiques d’avant-garde. C’est dans ce cercle
qu’Alexandra rencontre Apollinaire, Picasso et Max Jacob. La même année,
Alexandra participe – une unique fois – au Salon des Indépendants où elle
montre deux Compositions dont on n’a pas gardé trace.
Ses
premières œuvres connues sont de style « cézannistes géométriques »,
comme ces paysages urbains… (cliquer sur les images pour agrandir)
… qu’on pourrait presque trouver encore un peu « statiques »
à côté d’Au bord de la Seine…
… ou surtout de ce Pont de Sèvres qui
danse, littéralement.
Progressivement, elle a intégré dans sa peinture
les préceptes futuristes, en les conjuguant avec sa base cubiste. Elle dénomme
ce style « cubisme dynamique », connu par ailleurs sous le nom de
« cubo-futurisme », terme qu’elle aurait peut-être inventé elle-même.
C’est l’époque où elle partage son atelier avec le peintre futuriste italien
Argendo Soffici.
Et,
en tant que membre assidue des Soirées de Paris, elle continue à informer
régulièrement ses amis russes des dernières nouveautés parisiennes.
En avril-mai 1914, Alexandra
participe avec plusieurs peintres russes à l’Exposition internationale des
peintres et sculpteurs futuristes, que la galerie Sprovieri présente à Rome. Mais
elle semble être restée prudemment à l’écart des manifestes cubo-futuristes russes, trop marqués
par un a priori anti-occidental.
Alors que, jusque-là,
Alexandra partageait son temps entre la France, la Russie et les voyages, elle
est contrainte de se réinstaller en Ukraine au début de la Grande Guerre.
Et, au printemps 1915, elle participe à l’exposition radicale « Tramway V », présentée à Saint Pétersbourg en pleine guerre. Elle y montre quatorze toiles, dont plusieurs paysages urbains cubo-futuristes :
Dès l’année 1916, elle est sollicitée par Alexandre Taïrov, qui a fondé deux ans plus tôt, à Moscou, le Théâtre de poche (Kamernyi) pour travailler aux costumes et aux décors de plusieurs spectacles : Thamire le Citharède d’Innokenti Annenski, en 1916...
Parallèlement,
une grande présentation de ses œuvres picturales a lieu dans le cadre du Salon
« Valet de Carreau » à Saint Pétersbourg. Cette brillante rétrospective (92 œuvres) fournit
une nouvelle vision de la peinture constructiviste. Car, contrairement à Kazimir Malevitch
qui professait l’autonomie inconditionnelle des plans non-objectifs, Alexandra
tient à employer conjointement différents éléments, pour imbriquer l’énergie de
chaque couleur dans ses constructions.
En 1917, Alexandra perd son mari puis sa mère et, en raison d’une obscure question d’héritage, elle n’a plus accès à sa propre maison où une partie de ses œuvres est conservée. La plupart d’entre elles seront détruites au cours de la guerre civile qui suit la formation de la Rada, le Conseil central ukrainien (créé en mars 1917) qui proclame l’indépendance de l’Ukraine par rapport à la Russie. Malgré la brutalité de cette guerre, se crée en octobre 1917 l’Académie nationale ukrainienne des beaux-arts où Tatline et Malevitch viendront enseigner dans les années 20.
Et,
la même année, est publié à Moscou un essai sur le cubisme, intitulé Picasso
et Environs, du jeune critique d’art Ivan Aksionov. Alexandra en a dessiné la couverture.
En 1918, toujours à Kiev, Alexandra crée un
atelier d’enseignement qui rencontre un vif succès auprès des jeunes peintres ukrainiens.
Et
elle continue à travailler pour le théâtre :
Installée
à Moscou au début de l’année 1920, Alexandra participe à l’exposition constructiviste
« 5×5=25 » de septembre 1921, évènement qui marque l’apogée de la
peinture non-objective radicale…
… et mène un nouveau projet de décor et de
costumes pour Roméo et
Juliette.
Le décor, surtout,
frappe les esprits : « Sous la direction d’Alexandra Exter, les
décors de Roméo et Juliette se
plient et se démultiplient ; les ponts de Vérone se croisent, tissent
leurs différences et la multiplication des escaliers finit ainsi par créer une
sorte d’espace proprement piranésien, bien loin du fonctionnalisme ou de
l’éloge de la machine généralement prêtés au constructivisme. » (Emmanuel Rubio, « Melnikov, Le Corbusier, Kiesler : la guerre des espaces », L’année
1925, 2012, Presse universitaire de Paris-Nanterre, p.81-94)
Et, selon la monographie de Tugendhold, elle intervient aussi dans d’autres spectacles.
En 1923, elle conçoit
également une partie du décor de la première « Exposition panrusse de
l’agriculture et de l’industrie », des roues dentées, des
poulies, des tapis roulants et des grues disposées dans une grande fresque
destinée à un pavillon qui présentait les conceptions de pointe en matière
d’équipement mécanique.
C’est la même année qu’on commence à trouver le nom d’Alexandra dans la presse française :
« Le Théâtre
Kamerny, théâtre de chambre, a été fondé le 2 décembre 1914. Bercé par le canon
de la guerre, il grandit dans la tourmente révolutionnaire. Pendant huit ans,
isolé de l'Occident par une muraille d’acier, il travaille à renouveler l’art
scénique russe. Il est donc essentiellement autonome et naturellement combatif.
(…) Le Théâtre Kamerny de Moscou est l’œuvre d’une pléiade d'artistes dont la
foi ne s'est jamais démentie.
Alexandre Taïroff est l'inspirateur et le metteur en scène du « Kamerny ». Il avait déjà fait sur une autre scène, celle du brillant mais éphémère « Théâtre Libre de Moscou », des expériences concluantes en montant la pantomime du Voile de Pierrette et une chinoiserie burlesque : la Veste jaune. Mais il lui fallait être le maître chez lui pour aboutir. Qu’avait-il voulu, créer en inaugurant le Théâtre de Chambre et vers de brillantes destinées prétendait-il le conduire ? Il s’était élevé contre le théâtre naturaliste, imitateur de réalités minables et blafardes. Il s’était évadé du théâtre conventionnel, de son esthétique pour marionnettes qui réduit l’homme au rôle d’un pantin automatique. Il voulut de toute l’ardeur d’une volonté forgée par la lutte un théâtre de formes scéniques, non plus abstraites, mais saturées d’émotion créatrice, un théâtre où triomphât l’action. » A côté de l’article figure une liste de pièces de théâtre ; celle du 8 novembre 1924 : « THAMIRAS CYTHAREDE drame bacchique de Annensky, Musique de Forterre, Décors d’Alexandra Exter. » (Paris Journal, 6 mars 1923, p.1)
Puis Alexandra participe au film de science-fiction Aelita, réalisé par Iakov Protozanov (1881-1945), un des films les plus novateurs de l’époque, qualifié (beaucoup) plus tard de « péplum martien » (!)
Elle crée les décors, le premier rappelle étrangement le Monument à la troisième Internationale de Taline…
… et aussi les
costumes :
En 1924,
Alexandra profite de l’invitation qu’elle reçoit pour quitter la Russie afin de
participer à la biennale internationale de Venise. Elle va y montrer
notamment cette toile :
L’exposition
est longuement commentée dans la presse française, dont voici un extrait :
« (…) Le mouvement cubiste réveillant la compréhension de toutes les lois
formelles, de la peinture, a ouvert à ses partisans le sens de la construction,
de la liberté de choix et de l'accord des formes naturelles, et a créé une
volonté rationaliste. C'est de cette École que Malevitsch, Popowa, Exter et
Altmann obtinrent leur spéciale conformation artistique. Le cubisme, cependant,
qui, malgré tout, était basé sur la perception de la nature, ne pouvait
satisfaire pleinement une génération extrémiste à la recherche des déductions
absolues. Il ne put donc exercer qu'une action transitoire, ouvrant le chemin à
cet art "sans objet" qui se refuse à représenter le monde actuel et qui
est actuellement connu en Russie sous le nom de suprématisme. Pour lui, la
peinture doit s'émanciper de l'imitation de l'objet qui asservit l'artiste. Les
problèmes de construction et de facture, ainsi qu'un rationalisme et un
formalisme abstrait, caractérisent ce mouvement dont les œuvres de Tatlin,
Malevitsch, Popova, Rodtchenko, Exter et Altmann nous présentent de nombreux
exemples. » (Boris Ternovetz,
« La section russe de la biennale internationale de Venise », La Renaissance de l’art français et des
industries de luxe, 1er
juillet 1924, p. 535 à 547)
Ensuite,
après un bref séjour en Italie, Alexandra revient à Paris où elle s’installe de
façon définitive.
Dès 1925, elle participe au Salon de l’Araignée, à la Galerie Dewambez : « Madame Alexandra Exter, décoratrice du Théâtre Kamerny de Moscou, nous montre deux maquettes de décors qu’il est difficile de juger sans avoir vu les spectacles qu’ils doivent encadrer ; un panneau composé d’aquarelles très décoratives, peintes avec des couleurs pures et qui ont quelque analogie avec certaines œuvres anciennes de Robert Delaunay et de Fernand Léger ; enfin, des "photos montages", curieuse combinaison de photographie et de dessin. » (Charensol, « Le Salon de l’Araignée », L’Art vivant, 15 mai 1925, p.16)
Et
elle ouvre un « cours d’art théâtral et de scénographie » dont on trouve
les publicités dans la presse et qui semble avoir bénéficié d'une rapide notoriété.
« Parmi les Camarades dont le radicalisme se borne au théâtre, et avec des résultats splendides, on peut citer Alexandra Exter, Robinovitch, Tchestakov, Erdman et Fedotov. Mme Exter est bien connue à Paris par son école de scénographe. » (Arthur Moss, « Over the River », The Paris Times, 13 novembre 1925, p.3)
Elle
participe à nouveau au Salon de l’Araignée, organisé en 1927 par la Galerie
Granoff, et c’est la première fois que ses fameuses marionnettes paraissent
dans la presse française :
Je
n’ai pas trouvé dans quelle circonstance elle les a produites. Elles furent
montrées ensuite à la Galerie
Flechtheim, à Berlin et on en trouve quelques exemples dans les collections d’un
musée de Zürich.
Elle
produit d’autres décors de théâtre et des projets de costumes.
Et elle continue à peindre.
En 1929, la galerie des Quatre-Chemins lui consacre une exposition personnelle, particulièrement bien relayée par la presse, même si l’on sent que la critique « traditionnelle » a quelques difficultés à déglutir, tout en reconnaissant son indéniable talent :
« C'est actuellement en Russie, en Russie soviétique, que s'élaborent les recherches décoratives les plus audacieuses. Voici l'essentiel de la profession de foi de ces "révolutionnaires" : L'avant-garde a renoncé résolument à la prédominance de la peinture ; aux décors peints se substituent des architectures fictives, l'action se passe, dans les trois dimensions de la scène, la longueur, la largeur et la hauteur. On peut affirmer que Mme Alexandra Exter est, en partie, "coupable" de cette évolution qui tend à remplacer l'embellissement de la scène cher aux Bakst, Benois, Bilibine, Dobujensky, Roerich, Lissim, par des éléments purement constructifs, inspirés directement du cubisme.
L'exposition de Mme Exter (Galerie des Quatre-Chemins) prouve son très grand talent, et ses conceptions, parfois déconcertantes, éclairent cette soif d'originalité qui préside au renouvellement de la mise en scène en U. R. S. S. Collaboratrice du Kamerny Théâtre, elle composa les décors et les costumes de Thamira Cytharède (1916), ceux de la Salomé d'Oscar Wilde (1917) et de Roméo et Juliette de Shakespeare (1920). On trouve à cette exposition des esquisses pour Otello, Faust, divers décors d'opérettes et de revues, des projets pour le cinéma et surtout une série de marionnettes qui sont de pures merveilles d'intelligence et d'ingénieuse cocasserie. L’art d’Alexandra Exter réside avant tout dans un besoin de construire ; elle construit un décor avec des plans, des masses, des volumes ; elle construit un costume de la même façon et on sent qu'elle discipline jusqu'aux projecteurs pour accuser certains reliefs ou certaines ombres. C'est une nécessité quasi morbide, elle voit les reliefs comme un stéréoscope et dès cet instant plus rien ne compte ; elle y sacrifie le style d'une époque, comme la glace d'une courbe : c'est toujours puissant mais souvent insensible.
Il ne faudrait pas croire que toutes ces esquisses manquent de séduction, bien au contraire : elles séduisent pour mieux vous asservir. Il ne faudrait pas croire également que Mme Exter répugne aux prestiges de la couleur : ses harmonies sont toujours savamment étudiées. Il ne faudrait pas croire, enfin, que cet art, aussi systématique qu'il paraisse, manque de variété. Mme Exter a beaucoup d'imagination et elle s'en sert avec encore plus d'adresse. Mais il y a dans l'ensemble de cette œuvre considérable une sorte de "mécanisation" outrancière qui finalement exaspère. Mme Exter est bien le reflet de notre civilisation de la machine ; il faut qu'elle collabore aux œuvres d'un Prokofieff, d'un Molnar ou d'un Kaiser, il faut que le music-hall lui demande des projets pour ses revues, il faut que le cinéma utilise ses idées, mais surtout, surtout qu'on ne lui laisse pas toucher à l'œuvre d'un Musset ou d'un Sarment.
Dans cet épanouissement extraordinaire qui émancipe le théâtre et la littérature pour tendre exclusivement vers l'art du jeu (mimique et plastique), il faut bien reconnaître que la voie dans laquelle s'engagent les Russes mène droit à la faillite, à la faillite cela s'entend, des œuvres théâtrales écrites. » (André Boll, « Alexandra Exter, peintre de décors », Paris Le Soir, 7 juin 1929, p.5)
« Mme Alexandra Exter exposera, à partir du 10 mai,
à la Galerie des Quatre-Chemins, rue Godot-de-Mauroy, une sélection de ses
principales œuvres. On y remarquera particulièrement des dessins et des
maquettes de décors, des dessins de costumes et une série de marionnettes
disposées en groupes d’une vie intense.
Mme Exter n’appartient en réalité à aucune école. Nous savons qu’elle
fut parmi les maîtres du "Constructivisme" et qu’elle a obtenu de très grands
succès au Théâtre Artistique de Moscou et au Kamerny, qui ont tous deux donné
des séries de représentations à Paris. Mme Exter a travaillé depuis à Londres,
Berlin et Vienne, pour le théâtre, le music-hall et le cinéma. Elle exposera,
entre autres, une maquette de décors lumineux, extrêmement intéressante.
Virtuose de la lumière dans la diversité angulaire et spectrale de ses rayons,
cette artiste apporte au music-hall et au cinéma de nouvelles possibilités. Les photos ci-contre
représentent deux "Constructions" scéniques particulièrement originales et réussies. » (B.D., « L’art
décoratif appliqué au théâtre », Vu, journal de la semaine, 1er mai
1929, p.349)
« (…)
Mme Exter n'est pas une débutante. Ses premières mises en scène au théâtre
Kamerny sont antérieures à la révolution. L’artiste se fait, connaître par sa
présentation de Salomé, de Wilde. Elle réagit contre le "décor de peintre".
Elle lui substitue le décor constructif et architectural. Elle met en relief le
caractère spatial de la botte scénique. L'acteur était au temps de Bakst, un
complément tonal, de la toile de fond. Exter souligne par le costume rigide sa
corporalité et sa plasticité. Elle crée entre la structure statique de la
scène, transformée en espace mesurable et l’acteur, élément dynamique, de
nouvelles relations. Elle renonce, par la suite, au décor qui situe exactement l’action
et bâtit de simples échafaudages, claires-voies faites de pontons, de plans en
déclive, de passerelles et de mâts, où l'acteur intégral, danseur, mime et
gymnaste, évolue en créant l'atmosphère adéquate à la pièce par le jeu, ce
moyen d’expression qui lui est spécifique.
Après avoir conçu des décors et des costumes plastiques, après avoir prôné l’acteur-sur-marionnette, fantoche et automate, dont le régisseur-maître de l’œuvre compose les moindres gestes et régit les attitudes stylisées, Alexandra Exter libère le comédien, le hisse sur un pavois et en fait le roi du théâtre. Ses créations récentes nous mettent en présence de l'acteur revêtu d’un costume purement utilitaire qui n’entrave aucun de ses mouvements et qui accuse sa personnalité. Tous ceux que passionnent des problèmes du décor de théâtre et de la mise en scène se doivent de visiter l’exposition d’Alexandra Exter. (Waldemar Georges, « Art et scénographie, l’exposition Alexandra Exter », La Presse, 19 mai 1929, p.2)
« Galerie
des Quatre-Chemins. — Alexandra Exter possède une fertile imagination, tous les
décors, maquettes, costumes la montrent capable de s'adapter aux plus divers sujets. La
simplification très caractéristique des motifs architecturaux, des costumes est
marquée par leur esprit fin, atomisant souvent, et largement décoratif. Tout ici est bien vu, bien cherché en vue du maximum d'expression et du plus
juste accord avec le sujet. Le décor doit avoir le même sens que la pièce qu'il
accompagne et ceci a trop souvent été négligé ; le mérite d'Alexandra Exter est de l'avoir compris. » (La Semaine à Paris, 24 mai 1929, p.48)
« L’Exposition d’Alexandra Exter (Galerie des Quatre-Chemins) prouve son très grand talent et ses conceptions parfois déconcertantes, éclairent cette soif d’originalité qui préside au renouvellement de la mise en scène en U. R. S. S. L’art d’Alexandra Exter réside avant tout dans un besoin de construire, elle construit un décor avec des plans, des masses, des volumes ; elle construit un costume de la même façon et on sent qu’elle discipline jusqu’aux projecteurs pour accuser certains reliefs ou certaines ombres. C’est une nécessité quasi morbide, elle voit les reliefs comme un stérioscope et dès cet instant plus rien ne compte ; elle y sacrifie le style d’une époque comme la grâce d’une courbe : c’est toujours puissant, mais souvent insensible. Il ne faudrait pas croire que toutes ces esquisses manquent de séduction, bien au contraire : elles séduisent pour mieux vous asservir. Il ne faudrait pas croire que Mme Exter répugne aux prestiges de la couleur : ses harmonies sont toujours savamment étudiées. Il ne faudrait pas croire, enfin, que cet art, aussi systématique qu’il paraisse, manque de variété. Mme Exter a beaucoup d’imagination et elle s’en sert avec encore plus d’adresse. Mais il y a dans l’ensemble de cet œuvre considérable une sorte de "mécanisation" qui exaspère. Mme Exter est bien le reflet de notre civilisation de la machine ; il faut qu’elle collabore aux œuvres d’un Prokofieff, d’un Molnar ou d’un Kaiser, il faut que le music-hall lui demande des projets pour ses revues, il faut que le cinéma utilise ses idées, mais surtout, surtout qu’on ne lui laisse pas toucher à l’œuvre d’un Musset ou d’un Sarment. Dans cet épanouissement extraordinaire qui émancipe le théâtre et la littérature pour tendre exclusivement vers l’art du jeu (mimique et plastique), il faut bien reconnaître que la voie dans laquelle s’engagent les Russes, mène droit à la faillite, à la faillite, cela s’entend, des œuvres théâtrales écrites. » (« Les Beaux-Arts », Notre temps, 1er mai 1929, p.212)
La
galerie édite à cette occasion un album de quinze pochoirs de ses décors de
théâtre, préfacé par Alexandre Tairoff.
Pendant
ce temps, Alexandra a rejoint son ami Fernand Léger à l’Académie moderne qu’il
a créé deux ans auparavant. Ce rapprochement paraît naturel aujourd’hui car tous
deux ont porté l’art moderne au théâtre, Léger a été un précurseur en France,
si l’on se souvient de La Création du monde, en 1922… (voir la notice de
Marie Vassilieff), même si ses décors paraissent moins complexes que ceux
d’Alexandra. A l’Académie moderne, Alexandra dirige un atelier sur la couleur,
en compagnie de Marcoussis.
En
1930, paraît dans Mobilier et Décoration, un très long article d’un ami
d’Alexandra, auquel elle lèguera plus tard son atelier et ses archives. « Mme Alexandra Exter est très connue en Russie,
aux Etats-Unis, en Allemagne et, quoique depuis plusieurs années elle habite et
travaille à Paris, quoique son art si personnel, si fort, soit goûté et accepté
par un certain nombre de gens, par tous ceux qui s'intéressent à l'art théâtral
et suivent les évolutions et les efforts de la décoration théâtrale moderne,
malgré tout cela son nom n'est pas connu du grand public. Constructiviste, Mme
Exter arrive à donner des décors construits, qui, certes, ne seront pas compris
par tout le monde, qui pourront même choquer, mais l'harmonie des lignes, des
coloris, la vue générale sont si belles, si bien conçues et présentées avec
tant de goût qu'on ne peut que les admirer et s'incliner devant la force, le
sens décoratif qui s'y dégagent.
Tel décor composé d'escaliers, de plates-formes, de mâts ; tel autre,
uniquement de fanions et de drapeaux, sont des merveilles d’inventions et de
fantaisie. Les décors lumineux, dont l'idée, outre le théâtre, serait amusante
à utiliser au cinéma, comporte des ombres et des éclairages divers.
Quelques projets de photomontages qu’elle présenta à sa dernière exposition à
Paris, où des intérieurs, des parties de maison, des grilles en photographies
découpées voisinaient avec un dessin fin et très réaliste, et le tout composait
des ensembles en noir, gris, blanc d'une grande beauté architecturale,
démontrent que l'artiste a su là aussi indiquer une voie nouvelle à ce genre de
présentation. Mme Exter est avant tout décorateur de théâtre. Nous connaissons
ses œuvres picturales, ses panneaux décoratifs avec des blancs et des blancs
grisonnants, si chauds, où le regard s'attarde et ne peut quitter la toile ;
nous connaissons ses projets d'intérieurs et notamment cet ensemble remarquable
d'un appartement de onze pièces qu'elle exécute actuellement pour la danseuse
Eisa Kruger ; nous connaissons donc tout ce qu'elle fait en dehors du théâtre.
Mais même là l'influence du théâtre se remarque facilement. L'artiste voit tout
en théâtre ou plutôt, si l'on peut s'exprimer ainsi, par des jumelles
théâtrales. Elle connaît le théâtre ; ses secrets les plus intimes, ses
possibilités, ses dangers ; elle l'aime de tout son être. Le Théâtre, c'est
pour elle la vie de ses rêves. Dans sa préface pour l'exposition que Madame
Exter fit à Paris, Gaston Baty dit : "Comme un acteur consciencieux
n'ajoute rien à ses répliques non plus qu'il n'en retranche rien, le décor,
quel qu'en soit le style, contiendra tous les éléments plastiques nécessaires à
sa pleine signification, et ceux-là seulement. Nul détail inutile. Nulle
recherche de vain pittoresque. L'expression d’abord".
Et cette expression existe dans l'œuvre théâtrale de l'artiste. Et en plus une harmonie parfaite, un accord merveilleux entre tous les éléments. En voyant ces projets, on comprend aisément le critique qui dit à propos de ses décors mobiles : "Ces combinaisons mouvantes de formes et de couleurs émotionnaient le spectateur comme des accords musicaux." (I. Tugendhold : Alexandra Exter. Editions Saria, 1922.) Et plus loin, en parlant des costumes, le même critique dit : "Les costumes de Mme Exter sont précisément des rythmes humains fixés en lignes et en couleurs. Elle obtient de trois façons différentes cette impression de dynamisme : par le pinceau qui souligne les plis et les rythmes du flottement des étoffes (comme dans Salomé, par exemple), par de différents matériaux (exemple : bouts de velours dans le costume produisant l’impression de ralentissement, tandis que la soie provoque une sensation de légèreté, trépidation, accélération de la vitesse), enfin par des variations de couleurs qui soit affaiblissent, soit renforcent, par leurs contrastes, le geste."
Mme Exter est une grande artiste. Je comprendrai les personnes qui n'aimeront
pas son art. Ceci dépend du goût et il est trop compliqué, son art, trop composite pour plaire, pour être
compris et aimé par chacun. Mais nous sommes sûrs qu'il sera toujours discuté passionnément, avec un réel
intérêt, qu'il sera toujours accepté comme un art sincère, toujours jeune,
plein de goût et d'idées nouvelles. » (Simon Lissim, « Alexandra
Exter », Mobilier et Décoration, 1er janvier 1930, p.108-112.)
La
même année, à la galerie 23, rue de la Boétie, a lieu l’exposition « Cercles
et carrés », du nom du groupe créé en 1928 par le critique d’art Michel
Seuphor. Alexandra en était partie prenante, avec d’autres femmes, souvent
associées à l’Académie moderne, comme Marcelle Cahn, Sophie Taeuber-Arp et
Florence Henri. L’exposition regroupe un ensemble d’artistes d’une grande
diversité de styles, cubiste, futuriste, constructiviste, néo-plastique,
puriste. C’est peut-être cette diversité qui détourna les critiques de l’exposition
sur laquelle je n’ai trouvé aucun compte rendu dans la presse.
En 1931, elle participe au spectacle « Les nouveautés en revue » où rayonne le « délicieux sourire » d’Elvire Popesco. « Henri Jeanson y a prodigué sa verve, son esprit caustique, sa bonne humeur et M. B.-L. Deutsch a fait appel à des artistes comme : Yves Alix, André Boll, Lucien Boucher, Paul Colin, Alexandra Exter » (La Liberté, 23 mars 1931, p.2)
Je place ici cette photographie dont on ne
connaît pas la date mais qui exprime assez clairement la modernité de son
travail.
J’ai aussi trouvé un texte sur la question de l’affiche, écrit par Alexandra dans La Volonté, un quotidien qui a paru entre 1925 et 1936 : « Il est de toute évidence que l’art publicitaire n’est pas un art libre : deux principes le régissent : le sujet concret et l’attrait immédiat, la force magnétique, la persuasion de sa réalisation. L’art publicitaire, ses possibilités, ses réalisations sont sans limites, sont extrêmement vastes, ont plusieurs aspects différents, mais également intéressants, d’une valeur artistique et publicitaire évidente, l’affiche, à deux ou trois dimensions, l’affiche statique ou dynamique, l’affiche aux coloris simples et nets, à coloris multiples, aux clairs obscurs si différents et si intelligents. Il y a aussi l’étiquette, l’étiquette qu’on colle sur les bouteilles, les flacons, les boîtes. Un des cas particulièrement intéressants. L’étiquette est faite sur un papier, elle est plate. Mais par sa destination même elle devra prendre une forme autre que celle qu’elle a. Car elle sera collée sur des objets à plusieurs dimensions. Elle perdra sa forme personnelle pour prendre celle des objets pour lesquels elle a été créée. L’enseigne, si amusante dans le temps, ayant eu des formes et des sujets extraordinaires, devient simple, mais en accord parfait soit avec l’architecture de l’immeuble, soit avec la façade du magasin.
Elle est architecturale aujourd’hui, elle est devenue plate. Les étalages enfin — sont une publicité à dimensions. C’est peut-être celle qui est la plus efficace, la plus accessible. Une exposition d’objets déjà exécutés dans une vitrine existante, crée une discipline qui n’a la possibilité de s’évader qu’avec les sujets de l’étalage, mais encore là elle sera retenue par les sujets des marchandises. On voit donc que la publicité offre des moyens sans limites, des possibilités énormes. On voit aussi quels énormes progrès a faits cette branche d’art décoratif ces dernières années et il ne reste qu’à lui souhaiter de se développer sans cesse et en faisant toujours du progrès. Alexandra Exter » (reproduit dans « Tour d’horizon à travers les feuilles », L’affiche française, 1er octobre 1933, p.313)
Peut-être cet article est-il lié au fait qu’Alexandra s’est frottée à la question de la présentation commerciale en intervenant dans les vitrines des Galeries Lafayette, en 1930 ?
Quoi
qu’il en soit, il semblerait qu’elle ait continué sa production théâtrale au
moins jusqu’au début des années 30.
Ensuite,
Art et Décoration du 1er janvier 1935 annonce une exposition
sur les marionnettes à laquelle Alexandra participe et « touche au
cubisme » selon l’auteur (p.37).
En 1937, le Bulletin de la Société des historiens du théâtre annonce une exposition d’Alexandra Exter au musée des Arts et Métiers de Prague, sur ses décors et costumes. (1er décembre 1937, p.134)
Puis, c’est principalement dans le domaine de l’édition que la presse parle d’elle, et d’abord la presse pour enfants, dans une édition encore bien connue des « boomers » d’aujourd’hui, les Albums du père Castor, chez Flammarion : « … dans la série infiniment variée des "albums-jeux", le Père Castor présente cette année : Mon jardin, dessiné, construit et mis en couleurs avec un art exquis par Alexandra Exter. Lorsque les enfants en auront découpé soigneusement les arbres, les plantes, les fleurs de toutes sortes, il s'agira bien réellement d'un jardin à planter, d'un délicieux jardin, à la fois très réel et plein de rêves, qui sera leur œuvre et dont ils pourront changer la disposition selon leur goût et leur fantaisie. » (« Livres pour enfants », Le Peuple, organe quotidien du syndicalisme, 28 décembre 1936, p.3)
En
1938, nouveau retour dans la presse à l’occasion de la publication de trois ouvrages pour enfants qu’Alexandra illustre sur un texte de Marie Colmont. Le
premier est le Panorama du fleuve, « depuis les sources glaciaires
jusqu’à la mer », les deux suivants sont ceux de La Montagne et de La Côte.
L’enfant peut les déplier et les accrocher au mur de sa chambre : « J’ai appris qu’un petit garçon âgé de 7 ans, vivant dans un village de Ile-de-France, est tombé, pour ainsi dire, amoureux de cette révélation artistique ; chaque matin il se lève et regarde longuement la frise et note ce qui le frappe spécialement ce jour-là. » (Edmond Schlesinger, « L’art et l’enfant », Vendredi, 15 décembre 1938, p.8)
« Dans
cette collection, un Panorama de la Montagne semble répondre à une
double exigence : d’un côté l’image seule d’Alexandra
Exter, la montagne, "ses glaciers roses ou violets, son ciel d’un bleu
changeant, le blanc éblouissant de sa neige" ; de l’autre, le texte, de Marie
Colmont, pour le jour où il saura comprendre "qu’il n’est pas de but lointain
que nous ne puissions atteindre à force de volonté" ». (Les Nouvelles
littéraires, artistiques et scientifiques, 10 décembre 1938, p.6)
« Cet
album contient d’un côté une frise, composée de dix planches en dix couleurs, dues
au talent d’Alexandra Exter ; de
l’autre un texte explicatif de Marie Colmont. C’est
très beau et d’une présentation très originale. » (Le Page, Bayard,
22 janvier 1939, p.8) Texte repris dans Le sanctuaire, revue hebdomadaire
des enfants de chœur, 22 janvier 1939, p.8 (!)
Au
cours des années suivantes, Alexandra centre ses activités sur l’édition. On
voit passer des compliments sans toujours savoir de quel ouvrage il peut
s’agir…
« Un album d'ALEXANDRA EXTER absolument remarquable. D'une présentation parfaite, il se compose de quinze planches originales & donne une idée très précise de l'art d'un des plus grands maîtres du décor d'avant-garde. Sa place est particulièrement bien indiquée parmi les collections de la Bibliothèque de l'Opéra qui retracent toute l'histoire de l'art du costume & du décor. » (Rapport sur le fonctionnement des divers services de la Bibliothèque nationale / Ministère de l'Instruction publique et des beaux-arts, 1944, p.59). Peut-être s'agit-il de ses pochoirs de décors…
Elle
aurait illustré de nombreux ouvrages, je n’en ai trouvé qu’un :
Je
n’ai pas trouvé non plus si elle avait participé à la première exposition
« Machine Age » qui s’est tenue à New York en mai 1927. Une autre
aurait eu lieu en 1934 où elle était peut-être. Ce qui est sûr, en revanche,
c’est que certaines de ses œuvres figuraient à celle de 1968 :
L’exposition réunissait tous les grands noms de l’histoire de l’art moderne, Tatline, Tinguely, Klee, Umberto Boccioni, Max Ernst, Georges Grosz, Fernand Léger, Giacomo Balla, Oskar Schlemmer, Picabia, Hans Bellmer, Jacob Epstein, Chirico, Lissitzky, Calder, Man Ray, Duchamp, etc. Alexandra était en (bonne) compagnie d’une myriade d’hommes et… je n’ai pas repéré d’autres femmes mais j’espère qu’il y en avait malgré tout quelques-unes !
En 1946, Alexandra participe à la décoration du Salon d’Automne, dans une salle où sont présentées des maquettes de théâtre des spectacles présentés l’année précédente. Le catalogue ne la cite que pour un « projet de décor » dans la section de décoration théâtrale (p.96).
Alexandra est citée aussi dans la réalisation de L’Annonce faite à Marie, mais l’article ne précise pas ce qu’elle y a fait. (Arts, 11 octobre 1946, p.7)
Alexandra
Exter est morte à Fontenay-aux-Roses, le 17 mars 1949.
*
En
dépit de la monographie que Jakov
Tugendhold écrivit sur elle dès 1922, il faut bien constater que son rôle précurseur
dans la diffusion de l’art moderne en Russie et, d’une façon plus générale, son
œuvre de passeur des idées novatrices venues d’Ukraine ne sont que très peu mis
en valeur dans les publications d’aujourd’hui.
Elle a pourtant bénéficié de plusieurs expositions au cours des années 70, comme celle qui a eu lieu à la galerie Léonard Hutton Galleries de New York, qui montrait ses marionnettes, en octobre-décembre 1975.
Et,
bien sûr, il y a eu le « Paris-Moscou » à Pompidou en 1979 mais qui
se souvient d’y avoir vu ses œuvres ?
En 2010, un historien de l’art, Georgy Kovalenko, a publié une monographie en deux tomes qui a été saluée par les historiens de l’art. Je n’ai pas l’impression qu’elle ait été traduite en français. C’est dans une recension de ce livre que j’ai trouvé ce que je cherchais.
Georgy Kovalenko a commenté les natures mortes de l’artiste : « tout en elles est empli de sens et de signification : la couleur et la densité d’une bouteille, le caractère "cristal" des coupes, la matité de porcelaines des assiettes… et dans le même temps, en juxtaposant des objets totalement différents par leur texture, Ekster cherche la possibilité de les "rapprocher", de les "réunir", de présenter chacun d’eux comme la manifestation d’une seule matière indivisible. » (Tome 1, p.130, cité par Jean-Claude Marcadé, Chronique bibliographique, Revue des études slaves, LXXXV /2014, p.560-564)
Une
belle introduction pour mes dernières images, les natures mortes d'Alexandra …
*
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