samedi 16 mars 2024

Gesina ter Borch (1631-1690)

 

Autoportrait – 1661
Album de famille
Encre et aquarelle, 36 x 24,3 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Gesina ter Borch est née le 15 novembre 1631 à Deventer, une ville proche de Zwolle, chef-lieu de la province d’Overijssel, au nord-est des Pays-Bas.

Elle est la fille de Gerard ter Borch l’Ancien, né vers 1583 et qui s’est marié trois fois : d’abord avec Anna Bufkens (1583-1662), avec laquelle il a eu deux enfants, Gerard et Jannechien ; ensuite avec Geesken van Voorst (1599-1628), dont il a eu deux filles, Anna et Sara ; enfin avec Wiesken Matthis (1607-1683), dont il a eu neuf enfants, trois garçons et six filles. Selon un site de généalogie que j’ai consulté, Gesina serait la deuxième enfant de ce troisième lit, son frère Matthijs étant né en 1629. Mais selon d'autres sources, elle serait l'aînée.  

Après une première formation de peintre, Gerard ter Borch l’Ancien voyagea en Italie puis revint dans sa ville natale, Zwolle, vers 1612. Il abandonne rapidement son premier métier pour embrasser une carrière d’administrateur mais enseigne son art à ses fils, principalement à l’aîné, aujourd’hui connu comme Gerard ter Borch le Jeune (1617-1681), le demi-frère de Gesina. C’est le seul de la famille à avoir connu une véritable carrière artistique même si deux frères cadets de Gesina, Harmen (1638-1677) et Moïse (1645-1667) ont laissé des dessins, annotés par leur père dès leur enfance, preuve de la formation qu'ils ont reçue.

Gerard ter Borch l’Ancien est aussi un collectionneur d’estampes. Il a commencé sa collection en Italie et l’a poursuivie à son retour, grâce à de fréquents voyages professionnels à La Haye. La famille dispose donc de références iconographiques (Annibale Carracci, Rembrandt, Dürer) et littéraires, également collectées par Gerard le Jeune, lors de ses propres voyages.

Comme Gesina n’a jamais vendu ses dessins, qu’elle semble avoir réservés à sa parentèle, elle n’a jamais été considérée comme une artiste professionnelle, du moins jusqu’à ce que l’historien de l’art Abraham Bredius (1855-1946) découvre les albums de la famille ter Borch et comprenne qu’ils avaient été peints et soigneusement conservés par Gesina.

Bien qu’elle n’ait, semble-t-il, jamais suivi d’apprentissage à proprement parler, même si son père lui a probablement appris le dessin, tout laisse penser que Gesina se considérait elle-même comme une artiste, comme l’indiquent ses nombreux autoportraits, tous réalisés à l’aquarelle.

Ces albums ont également permis de la reconnaître dans plusieurs œuvres de son demi-frère Gerard, dont elle était visiblement très proche :


Gerard ter Borch (1617-1681)
Femme devant un miroir – vers 1652
Huile sur panneau, 34,5 x 26 cm
Rijksmuseum, Amsterdam



Gerard ter Borch (1617-1681)
Portrait d’une jeune fille en costume paysan – 1660
Huile sur panneau, 28 x 23 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

« Au XVIe siècle, on reconnaissait immédiatement une jeune célibataire à ses nattes et son bandeau rouge. Le modèle est probablement Gesina qui posait très souvent pour son frère. » (Notice du musée)

Au cours de sa vie, Gesina a réalisé trois albums distincts.

Elle a commencé le premier vers 14 ans et l’a intitulé Materi-boeck, ce qui signifie à peu près « Livre de matière ». La page de garde est datée de 1646 (cliquer sur les images pour les agrandir).

 

Première page de l’album « Materi-Boeck »
Calligraphie sur papier, 15,5 x 21 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


C’est d’abord un album de calligraphie dans lequel elle insère plus tard quelques illustrations, comme cette étude de figures occupées à diverses activités. C’est son tout premier dessin connu, elle a 16 ans.

 

Petites figures datées du 28 avril 1648
Album Materi-Boeck
Encre et aquarelle sur papier, 15,5 x 21 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Viennent ensuite diverses scènes familières :

Femmes et enfants – vers 1649
Album Materi-Boeck
Encre et aquarelle sur papier, 15,5 x 21 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Un homme lace le soulier d’une dame, une femme ajoute du bois dans un petit poêle
Album Materi-Boeck
Encre et aquarelle sur papier, 15,5 x 21 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Et enfin un probable portrait de son frère Moïse jouant du violon.

 

Jouer du violon – vers 1650
Album Materi-Boeck
Encre et aquarelle sur papier, 15,5 x 21 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Gesina commence son deuxième album en 1652. C’est un livre de ballades et de poèmes, intitulé Livre de poésie qui s’ouvre sur une allégorie de l’art mais les différents feuillets ne sont pas nécessairement placés en ordre chronologique.  Beaucoup des poèmes se réfèrent directement ou indirectement à la littérature musicale et emblématique du XVIIe siècle, notamment aux thèmes développés par le grand moraliste hollandais, Jacob Cats (1577-1660).

 

Eerbetoon aan Kunst (Hommage à l’art) – vers 1652
Album de Poésie
Aquarelle et crayon sur papier, 31,3 x 20,4 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

 

Vient ensuite le blason des Ter Borch, peint quelques années plus tard :

 

Blason de la famille Ter Borch – 1660
Album de Poésie
Aquarelle et crayon sur papier, 31,3 x 20,4 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Puis plus d’une centaine de feuillets, tous composés de la même façon : un texte calligraphié dans la partie haute, une illustration en bas. Ici, par exemple, pour illustrer une ritournelle sur les joies du mariage - dont il est précisé qu’elle se chantait sur l’air de « La plus belle nymphe de la forêt » - Gesina peint une scène de ménage plutôt musclée…

Couple s’attaquant – vers 1652
Album de Poésie
Aquarelle et crayon sur papier, 31,3 x 20,4 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Couple s’attaquant (détail)


Parfois, lorsque la chanson est courte, l’illustration prend ses aises. Si j’ai bien compris l’explication, il est ici question de deux personnes mortes dans un baquet et les lavandières auraient menti… selon le musée, il est possible que le dessin lui-même ait été repris d’un dessin de Gerard l’Ancien.


Chanson des lavandières – vers 1652/1653
Album de Poésie
Aquarelle et crayon sur papier, 31,3 x 20,4 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Ailleurs, il est question d’un chat jeté dans un four pour le punir d’avoir mangé un fromage.

 

Le boulanger jette un chat dans le four (détail) – vers 1652/1653
Album de Poésie
Aquarelle et crayon sur papier, 31,3 x 20,4 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Là, d’une jeune fille atteinte du mal d’amour :

Une jeune femme alitée avec des « douleurs d’amour »,
pendant qu’un médecin prend son pouls - 1653
Album de Poésie
Aquarelle et crayon sur papier, 31,3 x 20,4 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


S’intercalent aussi des scènes religieuses, ici reprise d’un dessin de son père…


Visite de la Vierge à sainte Anne - 1653
Album de Poésie
Aquarelle et crayon sur papier, 31,3 x 20,4 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

 

… ou des dessins sans poésie, en format à l’italienne …

Un couple s’embrasse devant une autre femme – 1654
Album de Poésie
Aquarelle et crayon sur papier, 20,4 x 31,3 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


… comme ces deux lavandières dans un paysage…

 

Deux paysannes dans un paysage – 1654
Album de Poésie
Aquarelle et crayon sur papier, 20,4 x 31,3 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

 

Tandis que cette scène illustre un poème sur un homme qui n’arrive pas à choisir entre deux amours.

 

L’homme entre deux amours (détail) – 1654
Album de Poésie
Aquarelle et crayon sur papier, 31,3 x 20,4 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

Et il semblerait que la situation inverse soit aussi possible !

 

Couple à pied, main dans la main, suivi par un jeune homme– vers 1654/1658
Album de Poésie
Encre et aquarelle sur papier, 20,4 x 31,3 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

 

Ici, l’amoureux formule sa déclaration en prenant le monastère comme métaphore de son amour.

 

Couple à l’entrée d’un monastère - vers 1658
Album de Poésie
Encre et aquarelle sur papier, 31,3 x 20,4 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Une chanson peut aussi inviter à noyer son chagrin d'amour dans l’alcool, tandis qu’au fond de la scène une femme traite son mari de voyou.

 

Intérieur d’une auberge avec deux morts et un buveur – vers 1658
Album de Poésie
Encre et aquarelle sur papier, 31,3 x 20,4 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

Bref, vous l’aurez compris, c’est la vie avec ses joies et ses peines, traitée avec la distance qu’autorise la chanson, voire de façon satyrique comme dans cette déclaration au clair de lune, où l’on voit un « Brabander » amoureux.

C’est un homme du sud des Pays-Bas alors sous domination espagnole. Dans l’esprit des gens du nord, leurs vêtements à la mode française et leurs manières excessivement raffinées sont parfaitement ridicules.

Gesina a mis en scène son expérience de la vue nocturne avec, au loin, la silhouette de bâtiments, l’éclat des lanternes et les ombres portées des protagonistes. Mais le poème illustré par cette scène évoque l’amour sans espoir d’un certain Jacks pour une Elisabeth, publié par le peintre Willem Schellinks (1623-1678), à Amsterdam en 1654 !

 

Seigneur courtisant une dame au clair de lune – vers 1658
Album de Poésie
Encre et aquarelle sur papier, 31,3 x 20,4 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

« Bonsoir, Betty, amour, je dis, je, je, je suis ton esclave … prêt à tout pour ton plaisir. »

 

On peut aussi imaginer que Gesina, qui a acheté avec une de ses sœurs une maison de campagne, s’est aussi servi du décor de sa propre vie quotidienne dans certaines représentations, comme celle-ci :

 

Une dame accueillant un couple à la porte d’une maison de campagne – 1659
Encre et aquarelle sur papier, 20,4 x 31,3 cm
Album de Poésie
Rijksmuseum, Amsterdam

Ces charmantes aquarelles ne constituent pas la seule production artistique de Gesina pendant les dernières années de la décennie 1650. On sait aujourd’hui qu’elle a participé à la réalisation de deux portraits de son frère Moïse.

Les historiens de l’art pensent que plusieurs éléments du premier ne correspondent pas au fini soigné de Gerard. La touche légère, le traitement de la peau de mouton, sa densité lourde qui contraste avec la délicatesse des cheveux bouclés, les broderies du manteau, pourraient être la marque de Gesina.

 

Attribué à Gesina ter Borch (vers 1631-1690) et Gerard ter Borch (1617-1681)
Moïse ter Borch tenant une canne de kolf – vers 1655
Huile sur panneau, 39, 3 × 26,6 cm
National Gallery of Art, Washington D.C.

Le jeune Moïse a commencé à servir dans la flotte hollandaise en 1664 et a combattu lors de la deuxième guerre anglo-néerlandaise (1665-1667). Il meurt en 1667, pendant la prise de Fort Languard, en Angleterre. Gesina, probablement très affectée, peint un portrait commémoratif de son frère. Il a été récemment retrouvé et acheté par le Rijksmuseum.


Gesina ter Borch (vers 1631-1690)
Portrait de Moïse ter Borch à l’âge de deux ans – vers 1667
Huile sur toile, 56 x 45 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

Selon le musée, bien que Gesina ait inscrit la date de 1645 en haut à gauche de la toile, il s’agit d’un portrait posthume car elle a représenté, par la présence de l’épée et du fouet qui se trouvent par terre, la fin tragique de son frère, mort à 22 ans.

Puis, Gesina et Gerard unissent à nouveau leurs pinceaux pour ce portrait commémoratif, beaucoup plus élaboré.

 

Gesina ter Borch (vers 1631-1690) et Gerard ter Borch (1617-1681)
Portrait commémoratif de Moïse ter Borch – vers 1667/1669
Huile sur toile, 76,2 x 56,5 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

« Il se tient debout, appuyé sur une canne, devant un rocher partiellement envahi par la végétation. Il est entouré de symboles : le temps (la montre à gousset), la mort (le crâne), l’éternité (le lierre sur le rocher), la fidélité (le chien), la vie militaire (l’armure). » (Notice du musée)

 

On retrouvera ce portrait de Moïse dans le troisième album de Gesina, le Familie plakboek (Album de famille), qu’elle commence dans les années 1660. Elle y rassemble de nombreuses productions familiales, dessins de ses jeunes frères et croquis préparatoires exécutés par Gerard. Ses propres dessins ne sont plus des illustrations mais des aquarelles indépendantes, pleine page.

On peut les classer en différentes rubriques qui ne sont pourtant pas constituées comme telles. Pour résumer, on trouve d’abord une série de portraits, parfois d’après des huiles de son frère Gerard ; celui de Moïse et probablement d’une de ses sœurs, Jenneken.

 

Portrait de Moïse ter Borch – 1670
Album de famille
Aquarelle sur papier, 36 x 24,3 cm (chacun)
Rijksmuseum, Amsterdam


Portrait d’une femme (Jenneken ?) – vers 1670
Album de famille
Aquarelle et encre sur papier, 36 x 24,3 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


On y trouve aussi l’autoportrait de Gesina que j’ai placé en exergue de la présente notice et celui-ci, en cartouche surmonté des armoiries des Ter Borch, au-dessus d’un poème d’Henrik Jordis louant les vertus de Gesina.

 

Autoportrait et poème – 1660
Livre de famille
Encre et aquarelle sur papier, 31,3 x 20,4 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Des portraits de femmes, ici présentés ensemble mais ce sont des pages distinctes :

 

A gauche : Portrait de femme, à droite : Portrait de Petronella de Waert – vers 1670
Album de famille
Aquarelle sur papier, 36 x 24,3 cm (chacun)
Rijksmuseum, Amsterdam


Et quelques portraits d’hommes et de religieux.

 

Portrait de Graaf van Peñeranda – avant 1687
Album de famille
Aquarelle et encre sur papier, 36 x 24,3 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


D’autres dessins donnent une représentation du mode de vie, de l’habillement et de la sociabilité de la classe moyenne aisée, à laquelle Gesina appartient.

 

Entreprise (de séduction ?) sur une terrasse – 1660/1661
Album de Famille
Encre et aquarelle sur papier, 24,3 x 36 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


C’est une femme pour toi – vers 1661
Album de Famille
Encre et aquarelle sur papier, 24,3 x 36 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Luge sur la glace avec Zwolle en arrière-plan et 
le monastère d’Agnietenberg à gauche – vers 1687
Encre et aquarelle sur papier, 24,3 x 36 cm
Album de Famille
Rijksmuseum, Amsterdam


Avec parfois des membres de la famille ter Borch :

 

 Jenneken ter Borch et son mari, Sijbrant Schellinger, 
avec deux enfants dans un intérieur – 1669
Encre et aquarelle sur papier, 20,4 x 36 cm
Album de Famille
Rijksmuseum, Amsterdam


Moïse apparaît plusieurs fois, ici dans une scène dans la campagne… 

  

Moïse ter Borch à la campagne près de Zwolle – 1666
Album de famille
Aquarelle et encre sur papier, 24,3 x 36 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

et là, pendant la guerre - dans une pose en contrapposto identique à celle du portrait commémoratif - tandis que rôde la mort.  

 

Moïse sur la côte de Harwich - 1667
Album de famille
Aquarelle et encre sur papier, 24,3 x 36 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

 

On rencontre aussi une amie d’enfance de Gesina, partie pour les îles hollandaises des Caraïbes.

 

Hillegonda Louise Schellinger à Curaçao - 1680
Album de famille
Aquarelle et encre sur papier, 36 x 24,3 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Gesina a ajouté à son album quelques souvenir de ses découvertes du monde extérieur, comme ce portrait de deux jeunes Africains, pourtant dessinés plusieurs années avant le début de l’Album :

 

Deux jeunes Africains – 11 septembre 1654
Album de famille
Encre et aquarelle sur papier, 20,4 x 36 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Ou cette copie d’une miniature persane dont on pense que c’est elle qui a décidé de la présenter sur fond noir.

 

Copie d'une miniature persane – entre 1660 et 1687
Album de famille
Aquarelle et encre sur papier, 36 x 24,3 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Mais la partie la plus intéressante de l’album est celle qui témoigne de l’influence de la culture néerlandaise sur l’imaginaire pictural de Gesina lequel est bien loin de se limiter à ce qu’elle voit autour d’elle. On pense qu’elle a été initiée au langage allégorique par son ami Hendrik Jordis, un marchand d’art d’Amsterdam qu’elle a rencontré dans les années 1650, auteur du poème de son autoportrait en cartouche, vu plus haut.

Ainsi, ses représentations à dimension symbolique comme l’allégorie de la victoire de la peinture sur la mort, qui a probablement été en partie inspirée par l’Iconologia de Cesare Ripa.


Victoire de la peinture sur la mort – 1660
Album de famille
Encre et aquarelle sur papier, 24,3 x 36 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

« La Bouche qu’elle a bandée signifie que les Peintres aiment ordinairement le silence & la solitude, pour en avoir l’imagination plus vive & plus forte » (Ripa Cesare, Iconologia, édition Paris 1643, p.183)

 

Et nombreuses sont les scènes évoquant la présence de la mort, s'immisçant dans la société des vivants :

 

Joyeuse compagnie troublée par la mort – 1660
Album de famille
Encre et aquarelle sur papier, 20,4 x 36 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Ici, on pense qu’elle représente une de ses sœurs décédées, Aleida ou Aeltien, près d’une pierre tombale où l’on peut voir les armes de la famille ter Borch.

 

Femme debout dans le chœur de l’église Saint Michel de Zwolle -1671
  Album de famille
Encre et aquarelle sur papier, 20,4 x 36 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Enfin, Gesina s’est aussi intéressée à la symbolique des couleurs, comme le montre ce document qui paraît faire référence, selon les historiens, à un sonnet de Justus de Harduijn, Weerlijcke Liefden tot Roose-mond (Les amours féroces de Roose-mond) composé en 1613.

 

Liste de sentiments avec leur couleur symbolique,
orange pour l’espoir, bleu pour la jalousie, etc. -1659
Album de Famille
Encre et aquarelle sur papier, 24,3 x 36 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Gesina ter Borch est morte le 16 avril 1690, probablement à Zwolle, une date connue grâce à la médaille commémorative éditée peu après son décès. 

Ensuite, Gesina est tombée dans l'oubli. Certes, Van Eijnden et Van der Willigen la mentionnent dans leur Histoire de la peinture de la patrie (Haarlem 1816-1840) comme « artiste hollandaise » et sœur de Gerard mais sans plus. Ses albums ne seront redécouverts qu’à la fin du XIXe siècle et il a fallu encore un siècle pour que l’étude d’Alison McNeil Kettering, Drawings from the Ter Borch Studio Estate in the Rijksmuseum (La Haye, 1988), mette l’accent sur son apport spécifique.  

 *

Il ne vous aura pas échappé que la totalité des dessins de Gesina sont conservés au Rijksmuseum d’Amsterdam. On peut les trouver sur le site du musée, hélas sans aucune explication sur leurs conditions de production ou la signification des très nombreuses références symboliques dont elles sont porteuses. 

Tout au plus apprend-on que, depuis le 8 mars 2021, le portrait commémoratif de Moïse peint par Gerard et Gesina est présenté dans la galerie d’honneur du musée, dont la Ronde de nuit de Rembrandt constitue la pièce maîtresse. Gesina a donc « rejoint » Judith Leyster et Rachel Ruysch, deux autres peintres longtemps méconnues, dont vous pouvez consulter les notices dans ce blog.

Cependant, comme le montre l’unique tableau à l’huile qu’on connaît à présent de sa main, Gesina n’était certainement pas une artiste de la trempe de ces deux autres artistes féminines. Il me semble qu’il serait plus juste d’insister sur les raisons qui ont contribué au fait qu’elle n’a pas atteint le niveau de son frère aîné, comme l’absence de véritable enseignement artistique, le fait qu’elle n’a pas voyagé et pu se confronter avec d’autres artistes, etc. Et développer l’analyse de ses aquarelles pour approfondir leur aspect documentaire sur l’époque.

En un mot, faire connaître les artistes féminines, sans considérer qu’elles se « valent » toutes au plan artistique, au seul motif qu’elles sont des femmes !


Et en guise de natures mortes finales, voici quelques fleurs de la main de Gesina.

 

Sainte Vierge à l’Enfant (détail) – 1659
Album de famille
Aquarelle sur papier, 36 x 24,3 cm
Rijksmuseum, Amsterdam



Motif pour un monument (pierre tombale ?) – vers 1687
Album de famille
Aquarelle sur papier, 24,3 x 36 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

 *


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