Pour ce portrait, il est probable que van Musscher a peint le portrait de Rachel et qu’elle-même a réalisé une bonne partie du décor, à commencer par les fleurs. Dans sa notice, le Metropolitan précise : « Une inscription poétique sur l’album d’études florales au premier plan documente la collaboration et invite les spectateurs à évaluer les mérites respectifs des deux artistes. »
Rachel
Ruysch est née le 3 juin 1664 à La Haye. Dans sa petite enfance, sa famille
s'établit à Amsterdam.
La
famille de sa mère, Maria Post, était liée à la Maison Orange-Nassau. Le
grand-père de Rachel, Pieter Post, était un architecte connu, auteur de
l’actuel musée Mauritshuis de la Haye et son grand-oncle, Frans Post avait
peint la faune et la flore du Brésil.
Le père de Rachel, Frederik Ruysch (1638 – 1731), était médecin, professeur d’anatomie et de botanique. Il avait créé dans sa maison un impressionnant cabinet de curiosité, composé de plantes séchées et d’organes humains, ainsi que de paysages composés en squelettes de bébés (!) qui attirait de nombreux invités de marque. Une partie de cette collection a été acquise ensuite par le tsar Pierre le Grand, en 1697 et serait toujours conservée au musée Pierre-le-Grand de Saint-Pétersbourg, ce que je n’ai pas pu vérifier…
Rachel a commencé à travailler avec son père, en copiant sa collection et en réalisant des décors de fleurs et de dentelles pour sa présentation.
À l'âge de quinze ans, elle eut la chance d’être admise, privilège rare pour une jeune fille, comme apprentie auprès de Willem van Aelst (1627-1683), considéré à l’époque comme le meilleur peintre de nature mortes d’Amsterdam.
Elle était visiblement douée puisque l’année suivante, elle peignit ce tableau :
Comme la plupart des peintres de fleurs, elle utilisait probablement des croquis pris sur le motif, qu’elle réintroduisait dans plusieurs compositions :
Ces deux œuvres, peintes la même année, utilisent certains éléments identiques. On retrouve, par exemple, le même coquelicot, placé au
sommet de la composition et le même œillet au milieu à droite dans la première,
en haut à gauche dans la seconde.
En 1693, Rachel épouse le portraitiste Jurriaen Pool (1666-1745) avec lequel elle a dix enfants, ce qui, fait rare pour l’époque, ne paraît pas l’avoir empêchée d’exercer activement son art. Elle vend ses tableaux à de riches collectionneurs et aux cours européennes, ce qui explique qu’on trouve ses tableaux aujourd’hui dans de nombreux musées.
L’existence de plusieurs portraits d’elle constitue également un signe de sa notoriété.
En 1701, elle devint la première femme à être reçue comme membre de la guilde des peintres de La Haye et, sept ans plus tard, est invitée avec les peintres Jan Weenix (1640 – 1719) et Adriaen van der Werff (1659 – 1722) à la cour de Johann Wilhelm, l’Electeur Palatin au service duquel elle serait restée jusqu'à la mort du prince, en 1716.
En raison de sa nombreuse famille, elle n’alla pas vivre à la cour, elle envoyait un tableau par an à Düsseldorf.
Deux œuvres qu’elle exécuta pendant ces sept années furent offertes à Cosme III de Médicis, probablement en 1712 et sont entrées à la Galerie des Offices de Florence en 1753 (mais ne sont pas visibles en ligne).
Sa
production artistique comprend environ deux cent cinquante natures mortes,
toutes caractérisées par un arrière-plan sombre, des compositions
complexes qui, par la présence d’insectes et la transition de la
maturité parfaite à la pourriture, rappelaient à leurs propriétaires qu’il
était temps de prendre soin de leur âme !
Une « vanité » est une nature morte
qui intègre, à côté d’éléments qui évoquent la richesse de la nature, des
représentations symboliques de la mort. On l’appelle aussi un Memento mori
(Souviens-toi que tu vas mourir). Une vanité évoque trois idées principales :
le caractère inéluctable de la mort (représenté par un crâne, la présence de
mouches ou de fruits « avancés » et/ou d’insectes évoquant la
brièveté de la vie, comme les papillons), la fragilité des biens terrestres
(évoquée par l’image du temps qui passe, comme un sablier ou une bougie qui
se consume), la futilité des plaisirs terrestres. Les vanités existent depuis l’Antiquité, notamment en fresques à Pompéi, mais ce genre pictural devient particulièrement récurrent aux Pays-Bas, au début du XVIIe siècle, dans une période particulièrement troublée politiquement. |
Rachel a continué à peindre jusqu’à l’âge de 83 ans, soit trois ans avant son décès, en 1750.
Je n’ai volontairement
pas reproduit les deux tableaux du musée des Beaux-Arts de Lille dont le style
est si raide et si éloigné de la production habituelle de Rachel que je doute un peu de cette attribution…
Et un tableau d’Anna :
Rachel avait une sœur, Anna, de deux ans sa cadette, qui a peint des fleurs également. Moins connue que Rachel, elle était aussi talentueuse…
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