mardi 21 septembre 2021

Rachel Ruysch (1664 – 1750)


Rachel Ruysch (1664-1750) et Michiel van Musscher (1645-1705)
Rachel Ruysch dans son atelier – 1692
Huile sur toile, 76,2 x 63,5 cm
The Metropolitan Museum of Art, New York

Pour ce portrait, il est probable que van Musscher a peint le portrait de Rachel et qu’elle-même a réalisé une bonne partie du décor, à commencer par les fleurs. Dans sa notice, le Metropolitan précise : « Une inscription poétique sur l’album d’études florales au premier plan documente la collaboration et invite les spectateurs à évaluer les mérites respectifs des deux artistes. »


Rachel Ruysch est née le 3 juin 1664 à La Haye. Dans sa petite enfance, sa famille s'établit à Amsterdam. 

La famille de sa mère, Maria Post, était liée à la Maison Orange-Nassau. Le grand-père de Rachel, Pieter Post, était un architecte connu, auteur de l’actuel musée Mauritshuis de la Haye et son grand-oncle, Frans Post avait peint la faune et la flore du Brésil.

Le père de Rachel, Frederik Ruysch (1638 – 1731), était médecin, professeur d’anatomie et de botanique. Il avait créé dans sa maison un impressionnant cabinet de curiosité, composé de plantes séchées et d’organes humains, ainsi que de paysages composés en squelettes de bébés (!) qui attirait de nombreux invités de marque.  Une partie de cette collection a été acquise ensuite par le tsar Pierre le Grand, en 1697 et serait toujours conservée au musée Pierre-le-Grand de Saint-Pétersbourg, ce que je n’ai pas pu vérifier…

Rachel a commencé à travailler avec son père, en copiant sa collection et en réalisant des décors de fleurs et de dentelles pour sa présentation.

À l'âge de quinze ans, elle eut la chance d’être admise, privilège rare pour une jeune fille, comme apprentie auprès de Willem van Aelst (1627-1683), considéré à l’époque comme le meilleur peintre de nature mortes d’Amsterdam.

Elle était visiblement douée puisque l’année suivante, elle peignit ce tableau :


Roses, convolvulus, coquelicots et autres fleurs dans une urne 
sur un rebord de pierre - vers 1680
Huile sur toile, 83 x 107 cm
National Museum of Women in the Arts, Washington D.C.


 Sa production devient rapidement extrêmement sophistiquée.


Bouquet de fleurs attaché avec un ruban bleu – vers 1680
Huile sur toile, 77,9 x 59,2 cm
Gemäldegalerie, Berlin



Nature morte de raisins, roses trémières, iris, mauve, soucis, clématites, marronnier d'Inde et mûres 
avec des papillons et autres insectes suspendus devant une arche de pierre – 1681
Huile sur toile, 65,7 x 50,8 cm
Collection particulière (vente 2018)


Comme la plupart des peintres de fleurs, elle utilisait probablement des croquis pris sur le motif, qu’elle réintroduisait dans plusieurs compositions :

 

Arrangement de fleurs sur un tronc d’arbre – 1683
Huile sur toile, 93,7 x 71,1 cm
Kelvingrove Art Gallery and Museum, Glasgow


Chardon, œillets et fleurs de maïs sur un sol de forêt moussu 
avec des papillons et un cricket - 1683
Huile sur toile, 64,5 x 51 cm
Collection particulière

Ces deux œuvres, peintes la même année, utilisent certains éléments identiques. On retrouve, par exemple, le même coquelicot, placé au sommet de la composition et le même œillet au milieu à droite dans la première, en haut à gauche dans la seconde.  

En 1693, Rachel épouse le portraitiste Jurriaen Pool (1666-1745) avec lequel elle a dix enfants, ce qui, fait rare pour l’époque, ne paraît pas l’avoir empêchée d’exercer activement son art. Elle vend ses tableaux à de riches collectionneurs et aux cours européennes, ce qui explique qu’on trouve ses tableaux aujourd’hui dans de nombreux musées. 

L’existence de plusieurs portraits d’elle constitue également un signe de sa notoriété.


Godfried Schalcken (1643-1706)
Portrait de Rachel Ruysch – vers 1701
Huile sur toile, 71,8 x 62,2 cm
The Wilson, Cheltenham, Gloucestershire




Bouquet de tulipes et d’iris avec papillons et abeilles – 1696
Huile sur bois, 64 x 50,5 cm
Musée des Beaux- Arts Tomas Henry, Cherbourg-Octeville


Vase aux fleurs – 1700
 Huile sur toile, 60,2 x 79,5 cm
Mauritshuis, La Haye

En 1701, elle devint la première femme à être reçue comme membre de la guilde des peintres de La Haye et, sept ans plus tard, est invitée avec les peintres Jan Weenix (1640 – 1719) et Adriaen van der Werff (1659 – 1722) à la cour de Johann Wilhelm, l’Electeur Palatin au service duquel elle serait restée jusqu'à la mort du prince, en 1716.

En raison de sa nombreuse famille, elle n’alla pas vivre à la cour, elle envoyait un tableau par an à Düsseldorf.

Deux œuvres qu’elle exécuta pendant ces sept années furent offertes à Cosme III de Médicis, probablement en 1712 et sont entrées à la Galerie des Offices de Florence en 1753 (mais ne sont pas visibles en ligne).


Fleurs dans un verre – 1704
Huile sur toile, 83,8 x 67 cm
Arts Institut, Detroit


Roses, tulipes et autres fleurs dans un vase en verre sur un entablement en pierre – 1709
Huile sur toile, 78 x 64 cm
Collection particulière (vente 2006)


Nature morte aux fruits, au nid d'oiseau et aux insectes – 1710/1716
Huile sur toile, 76 x 57 cm
Dudmaston, Shropshire


Sa production artistique comprend environ deux cent cinquante natures mortes, toutes caractérisées par un arrière-plan sombre, des compositions complexes qui, par la présence d’insectes et la transition de la maturité parfaite à la pourriture, rappelaient à leurs propriétaires qu’il était temps de prendre soin de leur âme !

 

Tulipes et crâne – sans date
Huile sur toile
Musée Jeanne d’Aboville, Saint-Quentin
Le musée montre cette vanité en ligne mais ne juge pas utile de citer son auteur…

Vanité

Une « vanité » est une nature morte qui intègre, à côté d’éléments qui évoquent la richesse de la nature, des représentations symboliques de la mort. On l’appelle aussi un Memento mori (Souviens-toi que tu vas mourir).

Une vanité évoque trois idées principales : le caractère inéluctable de la mort (représenté par un crâne, la présence de mouches ou de fruits « avancés » et/ou d’insectes évoquant la brièveté de la vie, comme les papillons), la fragilité des biens terrestres (évoquée par l’image du temps qui passe, comme un sablier ou une bougie qui se consume), la futilité des plaisirs terrestres.

Les vanités existent depuis l’Antiquité, notamment en fresques à Pompéi, mais ce genre pictural devient particulièrement récurrent aux Pays-Bas, au début du XVIIe siècle, dans une période particulièrement troublée politiquement.


Rachel a continué à peindre jusqu’à l’âge de 83 ans, soit trois ans avant son décès, en 1750.

 

Fleurs dans un vase en verre avec une tulipe – 1716
Huile sur toile, 46,5 x 36 cm
National Gallery, Londres 


Fleurs dans un vase - vers 1685
Huile sur toile, 57 x 43,5 cm
National Gallery, Londres


Nature morte de fleurs dans un vase en verre - 1720
Huile sur toile, 65 x 53,5 cm
Rijksmuseum, Amsterdam


Nature morte de fleurs – 1726
Huile sur toile, 75,6 x 60,6cm
Museum of Art, Toledo, Ohio


Branche de rose avec scarabée et abeille – 1741
Huile sur toile, 20 x 24,5 cm
Kunstmuseum, Bâle


Je n’ai volontairement pas reproduit les deux tableaux du musée des Beaux-Arts de Lille dont le style est si raide et si éloigné de la production habituelle de Rachel que je doute un peu de cette attribution…

  

Et un tableau d’Anna :


Rachel avait une sœur, Anna, de deux ans sa cadette, qui a peint des fleurs également. Moins connue que Rachel, elle était aussi talentueuse…


Anna Ruysch (1666-1754)
Fleurs dans un vase, avec pièce de velours et papillon - 1682
Huile sur toile
Musée des Antiquités, Rouen


J’ajoute ici le portrait d’une peintre de fleurs dont on ne connait pas l’identité. Le modèle ressemble à Rachel, raison pour laquelle on a pensé qu’il pouvait s’agir de son portrait. Mais une femme qui lui ressemble pourrait aussi être Anna, dont le style était proche de celui de sa sœur aînée


Michel van Musscher (1645-1705)
Portrait allégorique d’une artiste dans son atelier - vers 1675-1685
Huile sur toile, 114,3 x 91,1 cm
North Carolina Museum of Art, Raleigh




*

 

N.B : Pour voir d’autres notices de ce blog, si elles n’apparaissent pas sur la droite, vous pouvez cliquer sur « Afficher la version Web » en bas de cette page. 



 

 

 

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire