J’ai
choisi de présenter Mary Beale, plutôt que les deux autres femmes de son groupe
d’artistes, Joan Carlile (vers 1606 - 1679) et Susan Penelope Rosse (vers 1655
- 1700), parce qu’elle semble avoir été la première Anglaise à avoir exercé son
activité de peintre à titre essentiel et à avoir fait vivre sa famille grâce à
son art.
Elle est née Mary Cradock, le 26 mars 1633, à Barrow, dans le Suffolk. Aînée de deux enfants, elle est la fille de John Cradock (vers 1595-1652), recteur de la paroisse, peintre amateur et membre de la Société des peintres-coloristes. C’est une société éminente et ancienne, connue depuis 1268. Il est donc probable que Mary ait fréquenté un milieu artistique dès son plus jeune âge.
À dix-neuf ans, Mary épouse Charles Beale (1632-1705), un peintre amateur apparemment sans profession.
Le couple part s’installer à Walton. Ils ont un premier fils qui décède en bas âge.
Ils
s’installent alors à Londres où Mary donne naissance en 1656 à un second fils,
Bartholomew, qui deviendra, lui aussi, peintre portraitiste puis médecin.
Mary travaille chez elle comme portraitiste semi-professionnelle. En 1658, dans son ouvrage The excellent art of painting, Sir William Sanderson (1586-1676) fait déjà référence à Mary Beale, parmi les artistes dignes d’intérêt à cette époque. Elle n’a alors que 25 ans.
En
1660, Charles Beale succède à son père, qui vient de mourir, comme greffier au
Bureau des Brevets. L’emploi lui donne droit à une maison de fonction à Hind
Court, Londres, où Mary peut installer un grand atelier. Elle donne naissance à
un troisième garçon prénommé Charles (1660- vs.1726) comme son père. Celui-ci
deviendra peintre miniaturiste.
Huile sur papier marouflée sur toile - 38,2 x 27,3 cm
National Gallery of Victoria, Melbourne
En juillet 1665, une épidémie de peste à Londres les oblige à s’exiler dans le comté de Hampshire, au village d’Albrook où ils s’installent dans une ferme. Pendant les cinq années suivantes, Mary se consacre exclusivement à la peinture pour subvenir aux besoins de sa famille.
En
1666, un énorme incendie de trois jours (du 2 au 5 septembre) détruit la City de Londres et provoque un exode de la population. La même année, Mary écrit un
discours en prose sur l’amitié, Discourse of Friendship, dans
lequel elle évoque l’égalité entre hommes et femmes artistes et fournit de
nombreuses indications techniques sur son art, premier texte de ce type écrit
en langue anglaise par une femme.
En 1670, l’épidémie de peste terminée, les Bayle retournent s’installer à Londres, dans une grande maison de la Cité de Westminster. Charles, devenu l'assistant de Mary, tient un journal sur leur vie domestique qui constitue un témoignage intéressant de la vie d’une famille d’artistes au XVIIe siècle car il y consigne les méthodes de fabrication des pigments et les procédés de séchage. Il y note aussi les rentrées d’argent, ce qui permet de savoir que Mary est devenue une peintre très appréciée : au cours de l’année 1677, elle a vendu quatre-vingt-trois portraits, soit un tous les quatre jours…
Mary est devenue célèbre, comme le prouve la qualité de ses modèles. Elle rencontre l’élite intellectuelle de son temps et entretient un dialogue artistique soutenu avec Peter Lely (1618-1680) qui vient de succéder à Antoon van Dyck (1599- 1641) comme peintre officiel de la cour et qui influence son style.
…. et l'épouse du précédent :
Huile sur toile, 125,7 x 100,3 cm
Museum of Fine Arts, Boston
Après la mort de Lely, en 1680, les portraits de Mary sont moins à la mode et la vie de la famille devient plus difficile.
Huile sur toile - 76,5 × 63,7 cm
National Gallery of Victoria, Melbourne
Mary cesse de peindre à la fin des années 80 et meurt le 8 octobre 1699, à l’âge de soixante-six ans.
Elle est inhumée dans le cimetière de l’église St James à Piccadilly mais sa tombe est détruite pendant la Seconde Guerre mondiale. Il ne subsiste qu’une plaque commémorative dans l’église St James.
Comme la plupart des artistes féminines, Mary sera ensuite oubliée et ses portraits attribués à Peter Lely. Ils ne lui seront rendus qu’au cours des années 1970, grâce au travail de deux historiens d'art, Elizabeth Walsh et Richard Jeffree. Plusieurs expositions sur elle ont eu lieu depuis, en Angleterre.
Une autre est prévue en 2022 au Moyses’ Hall qui conserve d’elle deux autoportraits, dont celui que j’ai choisi comme « autoportrait de postérité ».
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