Geneviève
Marie Armant est née le 9 février 1888, 355 rue Saint-Martin à Paris. Son père,
Henry Félix Armant est boucher à cette adresse ; sa mère, Désirée
Alexandrine Luce Prieur, âgée de 34 ans, est sans profession. C’est leur voisin
du 357, le boulanger Jules Viot, qui accompagne Henry à la mairie comme témoin,
en compagnie d’Alexandrine Salley, bouchère au 180 rue Saint-Denis. (Archives du
département de Paris, Registre des actes de naissance, cote V4E5515,
acte n°223, p.10/31)
Famille et milieu de petits commerçants sur lesquels Geneviève semble être restée discrète tout au long de sa vie d’artiste.
Discrète aussi sur son premier mariage, intervenu à Enghien-les-Bains, le 15 mars 1909, avec Maurice Charles Gallibert, architecte. D’après le recensement de 1911, ils y résident tous deux, au 31-33 rue de l’Arrivée et Geneviève est déclarée sans profession. Lors du recensement suivant, en 1921, Geneviève habite à la même adresse mais elle est à présent « chef de famille » et artiste peintre. Vérification faite sur le site Mémoire des Hommes, Maurice est mort pendant le conflit mais la date de son décès n’a pas été enregistrée.
Voilà
pourquoi Geneviève, veuve, a gardé son premier nom d’épouse, celui qu’elle
portait lorsqu’elle s’est inscrite à 26 ans, dans la « section
peinture » des Beaux-Arts de Paris, le 8 mai 1914.
C’est probablement à la fin des années 1910, ses études terminées, que Geneviève s’installe dans un atelier, au n°4 de la rue de la Grande Chaumière, à Montparnasse, où l’a rencontrée l’écrivain belge William Speth : « Elle avait promené son pinceau sur le plancher, les murs et les meubles de rotin même (…) on était plongé, en entrant chez elle, dans une sorte de symphonie d’azur, graduée par le ciel si fin de Paris que la verrière imitait et par le seuil enduit de bleu de Prusse. » (La Revue mondiale, volume 207, janvier 1932, p.64-70)
Après les Beaux-Arts, elle a enseigné pendant trois ans, ce qui aurait contribué à perfectionner son art de dessiner qui, toujours selon Speth « tient du prodige chez Geneviève Gallibert », une faculté qui lui permet, « un stylo à la main, [de tracer] sur le papier, sans une hésitation et sans une bavure, les personnages, les sites, les objets dont elle veut perpétuer le souvenir. »
La bougeotte la prend car sa « curiosité sans cesse en
éveil [la] mène de Cannes en Provence, de Deauville à Athènes, dans les rues de
la Barillerie à Marseille, à Paris dans les ruelles de la Cité jusqu’au pied de
l’Arc de Triomphe. Partout elle dessine, compose, travaille sans relâche car la
peinture est sa raison de vivre. »
Au
point que, dès l’automne 1922 : « La saison artistique reprend et c’est
Geneviève Gallibert qui ouvre le feu avec une exposition d'aquarelles de
Cannes, de Monte-Carlo et de Saint-Tropez à la Galerie Barbazanges. Les
aquarelles dues à cette jeune artiste n’ont ni le fondu, ni le caractère
aérien, ni la transparence des water-colours, dont nos amis d'outre-Manche
paraissent si friands. L’écriture picturale de Mlle Gallibert est libre et
précise à la fois. Elle pose ses tons par touches délimitées, elle exalte et fait
jouer les couleurs en ayant recours à ces réserves de blancs qui forment une
des ressources les plus riches de la peinture à l’eau. Les aquarelles de cette
jeune artiste qui n'est plus une débutante témoignent d’autre part d’un goût
très sûr, très fin, et très personnel dans le choix de ses harmonies. »
(Waldemar-George, « Exposition Geneviève Gallibert », L'Ère nouvelle,
5 octobre 1922, p.3)
Des qualités également reconnues par le critique d’art Maurice Raynal : « Elle ne connaît certes pas encore les ficelles du métier, mais l’emploi qu'elle fait des surfaces blanches du papier, loin d’être monotone, s'associe très purement à la répartition des surfaces colorées dont elle joue. Les notations parisiennes ou provençales baignent dans une atmosphère timidement rosée, très fine, et très enveloppante au point que dans certaines de ses mannes dont l’unité limpide est nourrie d’une plénitude très chaude l’on éprouve cette sensation de voir la mer commencer partout et le ciel ne finir nulle part. (« Exposition Geneviève Gallibert », L'Intransigeant, 5 octobre 1922, p.2)
Dès
cette année-là, elle participe au Salon d’Automne avec trois aquarelles, toutes
intitulées Paris. (Cliquer sur les images pour les agrandir)
L’année
suivante, Geneviève expose plusieurs fois, à la galerie Barbazanges en octobre
puis chez Druet en décembre. Cette dernière exposition est largement commentée
dans la presse.
« Sa production de l’an dernier avait été accueillie avec faveur par les connaisseurs ; celle de cette année obtiendra certainement un égal succès. Elle représente un gros effort, puisqu’elle comporte une soixantaine d’aquarelles, dans la manière bien personnelle de l’artiste : coins de Barcelone, vues de Paris et quelques études particulièrement réussies. » (J.C., « Notes d’art », Eve, 16 décembre 1923, p.3)
« Mlle Geneviève
Gallibert expose au premier étage (…). Dans ces coins de Paris et de
banlieue, rapidement jetés sans grand souci de la composition, mais avec une rare
justesse de vision, il y a une verve, une élégance de touche et un sens de la couleur tout à fait savoureux. » (René
Chavance, « Les peintres de l’eau », La Liberté, 27 décembre
1923, p.2)
Au Salon d’Automne, elle expose deux peintures, Baignade et Paysage, dont je n’ai pas trouvé trace.
La
première vraie certitude concerne l’exposition de l’année suivante, à la
galerie Manteau de Bruxelles, puisqu’on a retrouvé, au dos de cette aquarelle,
l’étiquette de la galerie où elle n’a exposé qu’une fois :
Et
il y a aussi un long article de La Nervie, publiée à Bruxelles.
« Amour, couleur de Paris… Paris est le changeant décor du drame que chacun y porte. La couleur du tempérament, le reflet d’une humeur ou la nuance transparente d’une fantaisie s’y superposent et le modifient. (…) Le Paris des aquarelles de Gallibert est vivant de cette rare vérité.
C'est
le Paris qu’un premier contact peut nous révéler, si des circonstances
merveilleusement rencontrées ont réussi le subtil dosage de l’atmosphère de
Paris : un jeune printemps aux verdures légères, l’heure la plus lumineuse sans
dureté, la brume du matin déjà dissipée que révèle seule l’humidité de l’air,
unissant les éléments solides aux eaux du fleuve. Mais c’est surtout le Paris
qu’un long commerce livre à la connaissance. Connaissance où doit entrer cependant
plus de tendresse que d’habitude. Pour exprimer cette tendresse, Gallibert se
sert du moyen le plus léger, le plus délicat : l’aquarelle. (…) Les motifs
choisis sont presque toujours les plus immobiles architectures : arches des
ponts sur la Seine, - Notre-Dame millénaire - frontons obtus, colonnes,
massives verticales : la Chambre des Députés, la Madeleine, - plan horizontal :
la Concorde et le jet soudain de l’Obélisque. Rien n’est figé dans l’œuvre, le
point mort n’est jamais atteint.
Au pied des monuments, la vie se continue et les fait bouger de son reflet. Les autobus tracent leurs sillons dans les avenues, les passants se croisent, sur les quais des manœuvriers travaillent, les remorqueurs et leur note rouge laissent longtemps derrière eux un mouvant sillage, les fumées et les nuages bougent dans le ciel, et sous les arches, alternances mélodieusement superposées, les eaux sont entraînées toujours vers d’autres couleurs. (Roger Van Gindertael, « Les Aquarelles de G. Gallibert », La Nervie, 1er septembre 1924, p.7)
Une
aquarelle de cette année-là a été reproduite dans un ouvrage sur Geneviève :
Et le Fonds Marc Vaux (mon indispensable Bible) en conserve quelques-unes de la même veine :
Au tout début de l’année 1925, Geneviève participe au « Salon de la Folle enchère », une manifestation organisée par la société des amateurs d'art et des collectionneurs : vingt peintres et une petite dizaine d’œuvres chacun. A ce sujet, Le Radical du 7 février 1925 cite « les paysages et les nus de Geneviève Gallibert ».
Voici un Nu, que je serais bien en mal de dater mais il rappelle un peu ceux de Matisse, à la même époque…
« Parisienne de naissance, cette artiste l'est aussi par sa compréhension spirituelle, subtile et si rapide des paysages de Paris. Mlle Gallibert évoque très fréquemment certains coins de la ville. Elle en exprime l'essentiel aspect en quelques coups de pinceau. Elle sait faire jouer la fraîche verdure d'un arbre épanoui sur le fond d'un vieux mur. (…) Geneviève Gallibert est aujourd'hui en plein développement. Elle justifie pleinement les espoirs de ceux qui crurent en elle dès ses débuts. » (Waldemar Georges « Le mois artistique », L’Amour de l’art, janvier 1925, p.238) L’auteur ne dit pas à quelle exposition il fait référence.
Le
magazine ne donne ni le titre ni la technique de l’œuvre illustrant cet
article qui appelle néanmoins l’attention sur un motif récurrent dans l’œuvre
de Geneviève, la « vue par la fenêtre », (Matisse, encore ?).
Le
même Waldemar paraît un peu moins convaincu par une huile que Geneviève montre
au Salon d’Automne…
« Geneviève
Gallibert aborde une donnée plastique qui ne convient point à son talent
primesautier, pittoresque et fait d’ingénuité. Cette jeune artiste que nous
suivons avec beaucoup de sympathie, se doit de mieux connaître ses possibilités. »
(Waldemar Georges, « Le Salon d’Automne », L’Amour de l’art, novembre
1925, p.356)
Toutefois, avant l’automne, Geneviève a aussi exposé à la Galerie d'Art de la Grande Maison de Blanc avec une dizaine de jeunes artistes dont la plupart des noms sont devenus familiers aux lecteurs de ce blog : Marie Laurencin, Emilie Charmy, Béatrice Appia, Hortense Bégué, Cheriane, Hermine David, Alice Halicka, Mela Mutter et Chana Orloff. (Le Rapin, « Nouvelles au fusain », Comœdia, 6 février 1925, p.3)
En
mai 1925, « Geneviève Gallibert expose chez Druet des aquarelles et des
peintures. Ses aquarelles sont déjà fort connues du public et goûtées par
beaucoup d’amateurs. Elles sont d’un faire rapide, où la fougue se décèle
parfois, et ne manquent pas d’acidité. Il y a quelques années les premiers
travaux de Geneviève Gallibert m’avaient séduit par leur prestesse, parce
qu’ils semblaient le résultat d’une vision prompte à saisir l’essentiel, et à
le rendre dans ce qu’il a de plus spontané. Cela d’ailleurs n’excluait ni la
grâce, ni la fantaisie, à tel point que le peintre, à mon avis, me semble en
faire, aujourd’hui trop de cas.
Ce
n’est pas par hasard que le nom de Dufy a été prononcé à propos de Geneviève
Gallibert. Il est certain que, dans la couleur, dans le dynamisme de la présentation, les deux peintres se
rejoignent ; mais, là où Dufy laisse libre cours à son imagination et transpose
sans hésitation, Geneviève Gallibert reste réticente. Or, vouloir
domestiquer, des procédés aussi peu dociles que ceux de Dufy reste une folle
gageure et Geneviève Gallibert a eu grand tort de la tenter. Néanmoins, ces aquarelles ont des charmes
nombreux et certains ; j’ai parlé de grâce, mais elles se parent également d’un esprit très fin, très
souple et l’œil qui les a transcrites sait voir et rendre le mouvement d’une
place publique, l’élégance d’une attitude. » (André Mantaigne, « Les
Arts », Le Journal du peuple, 30 mai 1925, p.3)
La référence à Raoul Dufy va devenir habituelle et c’est vrai qu’elle saute parfois aux yeux (même si cette aquarelle est probablement plus tardive).
Enfin,
en décembre, elle expose à la galerie Hodebert avec le « Groupe de
Peintres Françaises » : Marie-Alix, Fernande Barrey, Chériane,
Marguerite Crissay, Hermine David, Suzanne Duchamp, Geneviève Gallibert,
Marguerite Lemaire Ghy-Lemm, Irène Lagut, Marie Laurencin, Marguerite Matisse
(la fille d'Henri Matisse), Hélène Perdriat, Valentine Prax et Jeanne
Rij-Rousseau.
Après son habituel couplet sur les femmes-qui-ne-sont-que-les-imitatrices-de-leur-maître, Louis Vauxcelles a tout de même une petite appréciation positive : « Geneviève Gallibert restitue avec exactitude l’atmosphère du Paris moderne, la netteté des automobiles. » (« Un groupe de femmes françaises », L’information financière, économique et politique, 14 décembre 1925, p.3)
Je ne sais pas à quel moment Geneviève a eu le temps de séjourner en Grèce mais elle l’a certainement fait puisqu’apparaissent au début de l’année suivante, les premières mentions de ses « bons paysages d'Attique » du Salon des Tuileries. (Gustave Kahn, « Revue de la quinzaine », Mercure de France, 15 juin 1926, p.734)
« Une fois de plus, les paysages affirment la gloire des sites de Languedoc et de Provence. (…) les sites méditerranéens, de Geneviève Gallibert » (Raymond Escholier, « Le Salon des Tuileries », La Dépêche, 23 mai 1926, p.2)
Et le critique d’art Tériade ajoute : « Parmi les femmes on pourrait citer Geneviève Gallibert avec ses toiles d'Athènes qui réussissent à résister au terrible voisinage de Matisse » (Tériade, « Propos sur le Salon des Tuileries », in Écrits sur l'art, A. Biro, Paris, 1996, p.50)
Il écrira aussi que « Dufy, qui a fait faire à l'aquarelle des
progrès remarquables, Chagall, dont les aquarelles font la joie de tous ceux
qui savent voir, Lhote, Hermine David, Geneviève Gallibert, ont contribué pour
une part essentielle au rajeunissement miraculeux de l'aquarelle. » (Ibid,
p.37)
Tériade avec lequel Geneviève a été croquée par la peintre Mercédès Legrand, en terrasse à Montparnasse.
Au Salon des Tuileries, premiers achats de l’Etat, dont La baie de Villefranche, une huile destinée au musée du Luxembourg qui sera ensuite attribuée au musée national d’Art Moderne. Ne la cherchez pas sur le site du musée, lequel « attend l’autorisation » de la montrer (!)
Début
1927, c’est son illustration du livre de Jean Giraudoux, Les Provinciales
qui fait causer les gazettes.
« Voici un ouvrage joliment illustré. Cette série d'aquarelles, reproduites de la façon la plus fidèle, donne un aperçu assez exact du talent d'aquarelliste de Geneviève Gallibert. On y trouve en effet la fraîcheur, le charme, la science de la composition, qui rendent ses aquarelles des plus intéressantes. Des jolis tons, une construction solide, des effets de perspective réussis, un peu d'humour, beaucoup de tendresse, donnent à ses aquarelles, sensibles comme des estampes japonaises, un accent tout personnel qui nous fait regretter que l'artiste ne se préoccupe davantage d'illustrer nos meilleurs livres, car ses illustrations ajoutent au plaisir de nos lectures. » (Cahier d’Art, janvier 1927, p.8)
Puis
vient l’exposition chez Druet, en compagnie d’Emilie Charmy.
« Deux femmes, très différentes, mais également douées. (…) Geneviève Gallibert est avant tout femme de goût : tons justes et harmonieux, oppositions délicates, lumière mesurée, attitudes vraies, groupements agréables. Les tons vifs sont si bien accompagnés, qu'ils chantent sans heurter. De la vie, de la grâce et du goût, du goût ! (« Chez Druet, Charmy et Gallibert », Le Rappel, 10 mai 1927, p.3)
« Mlle Geneviève
Gallibert a rapporté des aspects éclatants d’Alleines et d'Ajaccio. Mais
les tableaux les plus intéressants sont ceux où elle donne à nouveau sa note personnelle de peintre de
Paris, soit qu'elle y fixe des encombrements autos, soit, surtout, qu’elle traduise le calme, le silence et
la sérénité de quelque coin de Seine près de la cité, à l'heure où à l'heure où la paix du soir
commence à s’étendre sur le fleuve. » (Le Quotidien, 13 mai
1927, p.4)
Au
Salon d’Automne, Waldemar Georges enfonce le clou : « Jean Dufy,
Makowska, et Geneviève Gallibert ont contracté la même dette envers
Raoul Dufy » (La Presse, 5 novembre 1927, p.2)
Geneviève
y montre « sa Tour Eiffel dressée haut dans le ciel, [qui] fut
achetée par un critique, et non des moindres ! » (mais on ne saura pas
qui…)
Visiblement,
Geneviève aime prendre de la hauteur. Cela se voit dans ses vues de
Paris.
Le voyage en Grèce de Geneviève n’a pas été de tout repos. Elle a bien failli finir en prison, après un épisode rocambolesque d’incendie dans un « Taktiko. »
« "Qu'est-ce que le Taktiko ?
-
C'est une voiture américaine Hudson-supersix, qui contient six places mais dans
laquelle on se met parfois dix ou douze avec les bagages, le linge, la literie.
-
Bien. Je retiens les six places et commande le Taktiko pour demain matin."
Le lendemain matin le Taktiko était à la porte de l'hôtel et Mlle Gallibert se promettait une belle promenade. Mais dès les premiers cent mètres, on prenait une famille de paysans qui firent fermer la voiture, entassèrent valises, bourriches de paille, cages à oiseaux dans l'auto. La vieille grand'mère lançait des yeux furibonds vers la voyageuse qui avait d’abord protesté, puis qui, philosophiquement avait allumé une cigarette. (…) Tout à coup, un grand choc. On s'arrête. On descend. La voiture flambait.
Gallibert sauve d'abord les oiseaux de la vieille, puis ses dessins, puis ses robes épargnées par le feu. » (Michel Georges-Michel, « Arrestation d'une Française en Grèce » Paris Midi, 1er février 1928, p.2)
Je vous passe les détails burlesques, arrêtée quelques heures, Geneviève sera finalement relâchée.
« A
son retour - raconte William Speth - l’artiste va faire deux découvertes qui
aiguilleront sur une voie nouvelle sa vie et sa peinture. Sur la même route,
elle trouvera l’aviation et la Camargue. »
L’aviation, donc : « Le Portique a donné du 12 au 15 mai, une très intéressante exposition des œuvres de Mlle Geneviève Gallibert. On remarqua les délicates aquarelles du champ d'aviation d'Istres, de l'Oiseau Bleu et de l'aéroport d'Ajaccio. "Ces paysages, ainsi que l'écrivait André Salmon, sont traduits avec une acuité toute moderne et dans une bonne santé lyrique égale à cet état de simplicité qui fût la force des grands impressionnistes." Est-il plus bel éloge à l'endroit du profond talent de Mlle Gallibert ? » (« Une belle exposition », L’Air, organe de la Ligue nationale populaire de l'aviation, 1er juin 1928, p.30)
« Immédiatement
les paysages habituels se modifient ; la vie en plein air bat d’un élan
plus fort ; les tableaux groupent maintenant des appareils, des hangars,
des mécanos en combinaisons. » (William Speth, op.cit., p.69)
La
même année, Geneviève réalise le frontispice de l’ouvrage de Joseph KESSEL Vent
de sable.
Début 1930, André Salmon, le célèbre critique d’art, connu pour son soutien indéfectible au cubisme, écrit un long article sur Geneviève, qu’il apprécie particulièrement. (La Tour Eiffel, c’est peut-être lui…? ) Bien sûr, on a d’abord droit à l’éternel couplet…
« Quand toutes les femmes peindront, quand toutes les femmes sauront peindre, quand elles seront toutes habiles à peindre, celles que nous voyons aujourd'hui sortir de l'Académie comme on les voyait, hier, revenir du cours de piano, quand, dis-je, toutes les femmes sauront étaler de la couleur sur de la toile, alors un peintre, un vrai peintre, enverra à quelque Salon la première du million de toiles qui devra supporter ce titre : "Femme à son chevalet", absolument comme il y a aujourd'hui, en quantité industrielle, des "Femme à sa toilette".
Toutefois, il n'est pas impossible que ce peintre authentique soit une femme. La ruée de tout un sexe au droit à la peinture ne saurait infirmer aucun talent exceptionnel. Geneviève Gallibert, Dora Bianka, Suzanne Duchamp eussent été peintres au temps de Rosa Bonheur, cette exception, ou de Louise Abbéma, ce phénomène. Mais elles paraissent après le temps des grandes confusions, peut-être annonciateur d'un temps pire où, ne se connaissant plus, les sexes peindront chacun de leur côté.
Si ce jour doit venir, quand il viendra, Geneviève Gallibert aura déjà
touché au havre de grâce et de gloire. Geneviève Gallibert va droit
sa route, dans une étonnante mesure. Elle a commencé par nous éblouir de
féeries parisiennes, aussi totalement féeriques que des inventions de Dufy mais
possédant, en outre, la valeur profonde de l'observation réaliste. Ah ! qu'on
pouvait après cela sourire de certaines prétentions si ces paysages parisiens,
vibrants, dépassant en intensité tous les "expressionnismes" du monde,
étaient entièrement fondés sur l'émotion humaine la plus directe. Geneviève
Gallibert ne s'est pas contentée d'être le peintre élyséen des autos et des palais
de fastueux échanges, des Champs -Elysées, de la lumière pénétrée par le
mouvement. Elle a été en Grèce et en Camargue. Or, c'est en Camargue, parmi les
fiers "Guardians" dont elle porte le costume et qui sont parfois des poètes,
que Geneviève Gallibert a le mieux retrouvé l'antiquité vivante. Elle paraît
dans son œuvre libre comme en un poème de Joseph d'Arbaud. Et les blancs
chevaux de Gallibert continuent de nous imposer la notion de la vitesse pénétrant
la lumière, en des rythmes dont l'artiste tire ce parallélisme de couleurs
donnant leur vraie force à ses compositions. Le succès de l'exposition a été
très vif. » (André Salmon, « Femme à son chevalet », Gringoire,
4 avril 1930, p.7)
La Camargue apparaît au Salon d’Automne 1930, dont le catalogue nous apprend que Geneviève a quitté son hôtel des bords de Seine pour adopter une adresse plus bourgeoise, la rue des Sablons, à Passy.
Les
poneys de Camargue…
…
dont on trouve de nombreux exemples dans le Fonds Marc Vaux :
« Dans les plaines de sable et d’herbe, au bord de la mer blanche et bleue, des chevaux désinvoltes et des taureaux très doux paissent et s’ébrouent. » (William Speth, op.cit., p.69)
« Et
voici les fameux "gardians", fiers et souples comme des guerriers. » (Ibid.)
Dès la fin de l’année, les avions sont de retour, sous la plume d’une dame qui sait de quoi elle parle - puisqu’elle a déjà à son actif le record féminin de l'altitude, 6.500 mètres - à propos du 12e Salon de l’Aéronautique du Pavillon de Marsan (28 novembre au 14 décembre 1930) :
« Hélas
! les maîtres de la Peinture contemporains sont bien peu nombreux qui
consentirent à monter en avion. De toute la jeune école française,
seuls Geneviève Gallibert et du Marboré figurent au Salon du Pavillon
de Marsan. Leurs œuvres n'en sont que plus remarquées.
Leur
valeur picturale retient les regards. Cependant à l'Arrivée des Hommes
volants sur les bords du lac Tanganyka et au Spirit of Saint-Louis
de Marboré, je préfère les paysages français de Geneviève Gallibert et
surtout ces Vues de Villacoublay où les avions évoluent dans un ciel qui
a la finesse et l'exacte transparence du ciel de l'Ile de France.
La
jeune artiste avoue toutefois qu'elle n'a acquis qu'après plusieurs voyages, ce "sens de l'air" qui lui a permis de si bien traduire l'atmosphère dans
laquelle évolue l'avion. C'est pourquoi les aviateurs s'arrêtent longuement
devant son Aérodrome Morane-Saulnier. Ils s'y retrouvent. Ils croient y
être. (…) J'avoue que je trouve, dans cette accumulation de symboles aériens, quelque
chose d'excessif : c'est presque créer l'obsession. Il y a, dans le ciel
aviatique, plus d'air et de sérénité. C'est ce que l'artiste Geneviève
Gallibert a si bien compris, si bien senti, et si bien rendu. » (Louise
Faure-Favier, « L’art et l’avion », L'Aérophile,
15 décembre 1930, p.366)
L’année suivante, on parle beaucoup de la sortie du livre Le Demi-Dieu ou Le Voyage en Grèce de Jacques de Lacretelle et de ses illustrations.
« La
typographie de ce livre parfaitement construit témoigne du goût le plus sûr :
de belles pages allongées sans excès dans d'agréables marges, une composition
en tous points correcte dans un Garamond corps 12, une mise en page des
gravures empreinte d'une élégante simplicité, donc la plus rare : bandeaux et culs
de lampe de la largeur du texte et commençant ou terminant ses pages à
l'alignement des autres. Les illustrations de Geneviève Gallibert, gravées
au burin avec bonheur, commentent le texte par divers paysages de Grèce. On y
sent plus la volonté de traduire d'une manière personnelle, que celle d'être
sincère vis-à-vis de la sensation directe. Mais elles restent fort agréables à
regarder. » (Jean Bruler, « Le Demi-Dieu de
Jacques de Lacretelle, illustré par Gallibert, Paris, Le Livre,
1930 », La Quinzaine critique des livres & des revues, 10
janvier 1931, p.146)
Au
Salon d’Automne, « Geneviève Gallibert expose des figures d'une
joliesse irisée, et ses Chevaux de Camargue sont une de ses meilleures
réussites. » (Louis Vauxcelles, « Le Salon d’Automne », Excelsior,
1er novembre 1931, p.4)
Mais
les avions ne sont jamais bien loin, même dans les soirées mondaines.
« Geneviève Gallibert est un peintre de grand talent. On connaissait d’elle de bien émouvants paysages de Camargue, car ce peintre avait vécu, à cheval, sur la lande sauvage la vie des "gardians", et elle avait compris la toute la vivante beauté de son aspect mystérieux. Depuis quelque temps, Geneviève Gallibert nous donne des paysages vus d’avion, qui ont déjà provoqué la formation d’une école, l’"aéro-peinture". On avait jusqu’ici employé l’aéronautique pour la prise de vues photographiques ou cinématographiques, pas encore pour renouveler l’angle de vision du peintre. Aussi, quand Geneviève Gallibert reçoit, sportifs et artistes fraternisent chez elle. On s’écrasait, l’autre après-midi, dans son clair atelier. M. Hirschauer, directeur de l’aviation civile, bavardait peinture avec Hermine David, tandis que Charlotte Gardol demandait au capitaine Arrachart de lui donner bientôt le baptême de l’air. Louise Faure-Favier, - qui est deux fois ailée, puisque poète et aviatrice, - présentait MM. d’Estailleur-Chanteraine, Couhé et le pilote Bajac à un groupe de jolies comédiennes, dans lequel nous avons remarqué la brune Jeanne Boitel et la douce Emmy Guittes.
Le
prince Nicolas de Grèce, peintre et aviateur, confiait à Nadine Boris, qui passait
les cocktails :
-
Je n’ai pas encore songé à combiner ces deux agréments, mais l’exemple de
Gallibert m’y décide !
Jean-Gabriel
Gros de s’exclamer vivement :
-
En même temps que vous peindrez ?
-
Pourquoi ? demande le prince en souriant. Vous avez peur que je me casse la
figure ?
Alors,
sincère, le critique d’art :
-
Non, Altesse, mais que vous fassiez un mauvais tableau ! »
(Pierre Lazareff. « La vie
parisienne », L’Ordre, 16 novembre 1931, p.2)
Janvier
suivant, exposition à la galerie Billiet.
« (…)
C’était la série de Paris. Depuis, Geneviève Gallibert a donné sa série de Cannes,
de Provence, de la Camargue, de la Grèce, du Maroc. Son goût pour les vastes
espaces, et, subsidiairement, les puissants effets de perspective, l'a portée
aussi à fonder, sans publier de manifeste, "l'aéropeinture".
Plus
simplement, je veux dire qu’elle semble avoir été la première à peindre avec
assiduité des paysages vus d'avion. Art de plein air, je le répète ; et, de
plus, sportif, moderne, très "à la page" Bien qu’elle ait passé par l’Ecole
des Beaux-Arts, Geneviève Gallibert est née sous le signe du fauvisme, et Dufy
l'a tenue sur les fonts baptismaux. Elle peint clair, très clair, à l'aquarelle comme à l'huile ; en
vert et bleu majeurs, soutenus par de subtils accords en gris et un dessin
savant, elliptique, intelligent. Geneviève Gallibert a illustré du
Giraudoux, du Kessel ; et Mac-Orlan a écrit la préface au catalogue de sa dernière
exposition. » (Maximilien Gauthier, « Les artistes
d’aujourd’hui », L’Art vivant, 1er janvier 1932, p.521)
En
janvier 1932, Geneviève avait donc déjà été faire un séjour au Maroc. Puis on
n’entend plus parler d’elle, jusqu’à l’automne suivant.
« Geneviève Gallibert est une Parisienne d'été. On la perd de vue pendant des mois - six, huit, douze - et puis un jour, on la retrouve sur une terrasse de café à Montparnasse. Ou chez elle : dans une rue paisible de Passy, un large studio, tout blanc de murs et de lumières, avec des chevalets, des tableaux dans un coin, un phono qui rythme une musique singulière, des cocktails, et, au hasard des tapis, des divans et des sympathies. Alain Gerbault, Marcel Sauvage, André Salmon, Arrachart, Malraux, Mac-Orlan, Michel-Georges Michel, Jacques de Lacretelle, Gaston Chérau… Comment, oui, n'est-ce pas, comment les poètes, les écrivains, les peintres, les aviateurs qui sont les amis de Geneviève Gallibert, ne goûteraient-ils pas, intensément, le charme de ces réunions où l'on est entre soi, sans snobisme ni débraillé ?
Mais,
hier, en dépit de la tradition, ce n'est ni chez elle, ni à Montparnasse que
j'ai vu la jeune femme. Je l'ai rencontrée dans un monde irréel. Au milieu de
paysages à la fois étranges et familiers, surgis de la lumière, avec d'immenses taches de ciel, de blancheurs et d'oasis, au milieu d'ombres
bariolées, accroupies, dans une atmosphère diaprée, adorablement fleurie. Je
l'ai rencontrée au vernissage de son exposition, rue La Boétie.
Le Maroc, par Geneviève Gallibert. Voilà le titre de cette exposition
d'aquarelles, poétique témoignage que nous donne l'artiste de sa passion de lumière, de son goût neuf pour
l'ensorcellement des villes arabes - des paysages et des villes - plus encore
que des indigènes, qui ne sont, pour la plupart, transposés par elle, que des
prétextes. Artiste pure à l'écriture sobre, à la couleur fluide, à l'émotion
sincère, grande artiste qui met tant de fantaisie et de délicate poésie dans
son œuvre que le moins subtil, le moins averti, le plus rustre des passants
serait impressionné malgré lui. » (Paule Malardot, « Geneviève
Gallibert », Femme de France, 6 novembre 1932, p.12)
« Très
tard le soir, lorsque le mouvement de la foule venue à ce vernissage se fut un
peu apaisé, j'ai pu bavarder, comme autrefois, chez elle, avec Geneviève
Gallibert, et la questionner amicalement, sur ces choses qui ne sont pas
indispensables sans doute pour connaître, pour juger, pour aimer une artiste, et
qui nous rapprochent d'elle, pourtant, plus intimement. (…)
- "Voyez-vous, me dit-elle, ce sont les voyages qui m'ont influencée, qui m'ont formée.
J'ai longtemps travaillé en Grèce, j'y suis retournée deux fois. J'ai travaillé
aussi en Catalogne, en Corse, en Tunisie, en Camargue. Et ce dernier hiver, au
Maroc. En fait de pays, je crois que je n'aime au monde que ceux que baigne la
Méditerranée. Ils sont harmonieux et purs, plus que les autres, avec surtout
une adorable magie de lumière. Pour la première fois, en décembre dernier, j'ai
voulu voir autre chose. Et j'ai choisi le Maroc. Je dois vous dire qu'il m'a
surprise, heurtée, peut-être, à cause de sa violence, de ses contrastes. Mais
je l'aime aussi et j'y retournerai l'hiver prochain. J'ai connu ses grandes
villes, je veux pénétrer mieux ses villes
européennes, comme Rabat, par exemple, avec son architecture si moderne, si
intéressante. Et je veux aussi aller le plus loin possible dans le bled du Sud,
retrouver toute la primitivité marocaine de ces pays que n'a pas encore touchés
notre civilisation et qui sont des pays barbares, orgueilleux et magnifiques.
De tous mes voyages, cependant, malgré mon
adoration pour la Grèce, le souvenir le plus attendri que je garde est pour la
Camargue, où j'ai beaucoup travaillé, où je suis repassée cet hiver, où je ne
cesserai de retourner, je crois, parce que le côté primitif qu'elle nous offre,
on ne le retrouve nulle part ailleurs ; et, du reste, on le connaît peu, on
n'en sait même rien à Paris…
Oui, j'ai fait déjà beaucoup d'avion. Presque tous mes petits et longs voyages, à peu près une centaine d'heures de vol. Comment pourrais-je maintenant m'en passer ?... Ainsi, la terre prend l'aspect d'une étrange carte de géographie avec les plus belles harmonies de couleurs qui existent. Mon voyage au Maroc a été magnifique. Je suis partie de Toulouse. A Barcelone, halte : petit café. A Alicante, halte : petit déjeuner. A Rabat, on a ouvert "la boîte". Dix heures de voyage à l'aller, douze au retour. Le passage du détroit de Gibraltar est merveilleux.
La Méditerranée et l'Atlantique ne se ressemblent en rien, ni par leurs formes ni par leurs couleurs. Leur heurt est extraordinaire. Et tout de suite après, c'est la brutalité de l'Afrique. Le vent est dur. Les verts, les bleus sont durs. Il faut un certain temps pour s'adapter à ce pays de contrastes, pour en trouver la singulière et ardente poésie. Mais cette violence m'a permis d'oser bien plus qu'en Provence, qu'en Corse même. Le splendide pays !..."
(…)
La qualité indéfinissable du ciel marocain est ici, dans ces peintures également
indéfinissables, fluides, légères, odorantes, parfois lourdes de chaleur,
mystérieusement mobiles comme la vie bénie par la lumière dans les libres
paysages du Maroc. Fès, grise et lettrée, Moulay-Idriss et sa passion, Rabat et
sa dignité bourgeoise, Marrakech, porte du ciel en fleurs, Agadir et sa
résurrection, l'Atlas et ses améthystes sauvages, ont tour à tour imposé leurs poèmes
à l'artiste tout à fait digne de cette confession éclatante et sensuelle,
dévoilée comme les belles adolescentes de la montagne et du Sud… » (Paule Malardot, Ibid.)
Au
Salon d’Automne suivant, une toile est particulièrement remarquée par la
presse.
Par
la suite, La sortie du Sultan a été exposée à la galerie O'Hana, à Casablanca,
en mai 1934. La toile a été vendue en 2006 sous le titre Sortie de S.M.
le Sultan Mohamed V sur le Méchouar, Rabat. Je sais qu’il s’agit bien du
même tableau car j’ai trouvé cette petite photo, hélas illisible mais qui donne
une idée de la palette.
Dès lors, Geneviève et son « aéropeinture » sont clairement repérées par la presse où les portraits d’aéroplanes et les articles louangeurs se multiplient.
« Vous
avez tous rencontré, autour de la piste râpée d'Orly, ou de velours de Villacoublay,
cette jeune femme alerte comme un moineau, ce visage amusé et curieux. Vous êtes-vous toujours
douté du travail caché qui s'accomplissait à l'abri de ce sourire ? Vous
êtes-vous douté qu'une grande artiste, penchée sur la vie aéronautique, allait nous la traduire avec une éclatante pureté ? Tous ceux qui
s'intéressent à la peinture connaissent l'œuvre de Geneviève Gallibert. (…) Vous
rappellerai-je sa toile de Salon d'automne, la Sortie du Sultan pour la
prière du vendredi et l'éblouissante garde noire dans son uniforme bleu et
rouge ? Nous sommes des voyageurs stériles, la vie passe entre nos doigts comme
du sable, mais vous, Gallibert, vous avez retenu des trésors au passage.
Il
y a, chez cette artiste, quelque chose de primitif, de farouche et une
prodigieuse sincérité dans sa sensibilité, comme dans ses moyens d'expression.
Le goût de l'espace s'est affirmé en elle, de plus en plus intense et impérieux.
De là, viennent la splendide série de ses toiles de Camargue, paysages ventés,
chevaux sauvages ; de là enfin, la suite d'aquarelles et de tableaux aéronautiques
dont je m'autorise pour parler, aux lecteurs des Ailes, de Geneviève Gallibert.
Ses croquis de vol sont "volés" ; elle ne les a pas peints du sol et cela se
voit. Toute l'allégresse de nos vols est dans ses croquis. Ses avions ne volent
pas dans des ciels de brouillard, mais sous l'admirable coupole bleue où il est
si joyeux de s'élancer.
(…)
La fraîche pureté du matin sur la piste pleine de rosée, je la retrouve dans
cette toile peinte au terrain Morane, et que Gallibert exposait à l'Aéro-Club,
parmi les peintres du Ministère de l'Air. Voilà le "pansage" d'un 147 avant
le départ. Peinte aussi à bord d'un Morane d'école, cette excellente aquarelle
intitulée Le Virage où le paysage chavire. »
« Voici
mes chers hangars d'Orly, avec un Junkers qui leur fait face, et voici le
départ nocturne d'un avion qui n'arriva jamais à New-York. »
« Je ne peux pas énumérer la riche collection que j'ai vue et qui place Geneviève Gallibert parmi les gens de l'air, en même temps que parmi les peintres. Je souhaite que son amour fervent mais vagabond nous reste fidèle. Il y a tant de visages nouveaux à peindre parmi nos avions et les ciels sont si peu semblables d'un soir à l'autre. Demeurez notre peintre, Geneviève Gallibert, car c'est très beau de nous voir par vos yeux. » (Madeleine Charnaux, « Les peintres de l’aile, Geneviève Gallibert », Les Ailes : journal hebdomadaire de la locomotion aérienne, 26 janvier 1933, p.13)
Puis,
nouvelle publication dans L’Art vivant, au moment du Salon d’Automne
:
Geneviève exposera ce même tableau à l’Exposition des Femmes Artistes Moderne (FAM) en mai de l’année suivante et il sera à nouveau publié par Les Hommes du jour.
« Geneviève Gallibert a envoyé des Chevaux en Camargue, lumineux et lyriques, et aussi un portrait peut-être un peu figé de la charmante danseuse créole Dal’al. » (R. Civry, « Les Femmes artistes modernes », Les Hommes du jour, 18 mai 1933, p.9)
Cette
« charmante danseuse créole » m’a donné un peu de mal mais, heureusement, elle
avait été photographiée par Man Ray. Elle s’appelait Simone Luce, elle était
martiniquaise et avait notamment posé pour le peintre Jules Pascin avant de
danser avec Joséphine Baker dans « La Joie de Paris », en 1928. Et
je pense avoir retrouvé dans le Fonds Marc Vaux celle que décrit, de façon un peu déplaisante,
Le Crapouillot du 1er juin 1933 : « Une très
savoureuse figure exotique » …
C’est
un autre portrait de Geneviève qui participe à l’exposition « Portraits
contemporains » à la Galerie de Paris. Il est intitulé Claudia mais on
n’en sait pas davantage. Il y a peu de portraits dans le Fonds Marc Vaux.
J’aime bien celui-là que je pose ici à titre d’illustration.
Pour la première fois, Geneviève participe au Salon des Indépendants de février 1934, peut-être parce qu’il s’agissait de « l’Exposition du cinquantenaire » et qu’il fallait en être. Elle y montre une Danseuse gitane de 1921 et Au-dessus de la France (1933), « une toile curieuse [qui] se rattache à la vieille tradition des cartes imagiées et coloriées. » (Claude Chantal, « Le Salon des Indépendants », Le Monde illustré, 10 février 1934, p.112)
Celle-ci
n’a pas été difficile à trouver dans le Fonds Marc Vaux (MV-0666-033) mais je
vais plutôt montrer sa version en couleur qui a servi de couverture au Livre
d’or du tourisme aérien, édité l’année suivante.
En
mars, Geneviève participe à une exposition du Cercle international féminin,
avec « Mmes Hermine David, Camax-Zoegger, Chériane, Andrée Joubert, Zina Gauthier, Véra Rockline, Hélène
Marre, etc. » (Notre Temps, mars 1934, p.4), puis, en mai, elle est
à Casablanca pour l’exposition de la galerie Ohana où elle est reçue par le président
de l’Aéro-Club du Maroc.
La presse locale est dithyrambique :
« Tout Casablanca était là, à croire, vraiment, qu'une grâce singulière avait touché ce public, toujours si froid, avait ouvert définitivement les yeux… et l'esprit. Comment, dès lors, ne pas goûter toute la décision, toute la beauté rythmique de ses paysages, de ses portraits. Peindre, n'est-ce pas, pour elle, suggérer transposer. Tout est signe, tout est langage intelligible. Sa couleur a des résonnances inattendues, insoupçonnées : apaisement, sévérité des bleus, des mauves, dans la fanfare des orangés (Place Djemâa-el-Fna). Diffusion tendre des tons où s'opère un doux, un subtil évanouissement de la couleur (Jardin de la Mamounia). Parfois, elle développe, avec un exquis arbitraire des harmonies d'une intensité incomparable (Palmeraie à Marrakech). Puis, des rouges brique, des jaunes œillets d'Inde, des mauves roux, des verts olive et ce sont des Paysages de Cambo, La Plage à Biarritz ; tout le charme à la fois si sévère et si tendre des paysages de France. (…) Et je me surprends à répéter ce que disait, quelque part, J. Guenne : "Un peintre ne vaut que par l'originalité de ses moyens d'expression, que par l'importance de l'Univers qu'il a créé". C'est la raison qui nous porte à aimer Gallibert ; elle a su s'affranchir d'une vaine idéologie, qui prétend mettre l'Art au service d'une stricte et pure imitation, le faire servir à des fins qui lui sont étrangères. » (Albert Abt, « Geneviève Gallibert à la Galerie O'Hana », L'Afrique du Nord illustrée, 23 juin 1934, p.11)
Et, heureusement pour nous, le quotidien illustre son article avec une photo de Marc Vaux d’un tableau qui vient d’être acquis par l’Etat, L’Atlas vu de la Manounia.
(J’écris heureusement car je n’ai pas trouvé la photo dans le Fonds Marc Vaux et que, pour ce tableau-là aussi, le MNAM « attend l’autorisation » de partager sa photo avec le public…)
A l’exposition des FAM, en juillet, « (…) l'exotisme fleure des Portraits de vahinés de Mme Geneviève Gallibert, coloriste ardente. » (Georges Turpin, « La griffe artistique », La Griffe, 8 juillet 1934, p.15). (Pas de Portraits de vahinés dans le Fonds Marc Vaux… )
Le 20 novembre 1934, un drame survient. Hélène Boucher, la jeune aviatrice prodige de 26 ans, recordwoman de vitesse en août (445 km/h) s’écrase à Guyancourt avec son Rafale. Le 2 décembre, elle est la première femme à recevoir un hommage national aux Invalides.
Le Crapouillot publie son
portrait par Geneviève.
Et
ses portraits d’avions sont repris à chaque occasion :
« Notre
Camargue, grâce à Geneviève Gallibert, se peuple célestement de manades
d’avions » (« Les femmes sont-elles peintres », Le Petit
Marseillais, 31 juillet 1935, p.2)
C’est aussi l’année où Geneviève aurait été officiellement admise dans le « Corps des peintres, graveurs et sculpteurs du département de l'Air », créé par décret du 5 juillet 1931. Comme l’explique le texte, cela ne confère aucun droit d’aucune sorte. Il s’agit d’un titre honorifique accordé aux « artistes de nationalité française ayant consacré leur talent à l’étude de l’air, de l’aéronautique et des gens de l’air ».
J’écris au conditionnel car j’ai trouvé cette mention dans plusieurs documents (et notamment sur le site de l’association des peintres de l’air et de l’espace et sur la page Wikipédia qu’il leur est consacrée) mais absolument rien sur le site du service historique du ministère de la Défense…
En
1936, Geneviève se trouve à New York, dont il ne reste qu’un petit croquis
photographié par Marc Vaux.
Si l’on en croit la presse, Geneviève passe une grande partie de son temps dans le Midi. « Les villages perchés de Saint-Paul et de Cagnes où vivent les peintres comme des papillons sur des amas de fleurs : Ceria, Dufy, Lombard, Friesz, Waroquier, Geneviève Gallibert et même Jean-Gabriel Domergue, dont la villa "Fiesole" ébahit duchesse et midinettes. » (Michel Georges-Michel, Ma Riviera, Mon Paris : son visage et sa vie ardente, 1er février 1936, n.p.)
Quoi qu’il en soit, Geneviève est de retour à Paris pour le Salon d’Automne, où elle montre La Danseuse au repos. La jeune femme ci-dessous représentée ressemble un peu à Simone Luce, je le choisis donc pour évoquer ce titre mais absolument rien ne prouve que ce soit le tableau dont il s'agit !
Le Voltaire
apprécie son travail : « Dans le bataillon revenu innombrable des
femmes peintres ou sculpteurs, il en est relativement peu qui méritent une
attention sérieuse et soutenue. Beaucoup tiennent pinceaux ou ébauchoirs comme
on faisait jadis de la dentelle. Ce qui n’empêche pas que quelques-unes
s’appellent Louise Hervieu, Geneviève Gallibert, Hermine David, etc... Ce
sont là des artistes authentiques et qui valent même mieux que pas mal d’hommes
artistes. » (17 octobre 1936, p.23)
Geneviève n’apparaît presque pas dans la presse en 1937…
C’est peut-être lié au fait que c'est justement cette année-là que Geneviève épouse, le 19 juillet 1937, Pierre Louis Hirschauer (1885-1939), fils du général Édouard Hirschauer, devenu sénateur de la Moselle en 1920.
Docteur en droit, Louis Hirschauer a dirigé, dans les années 20, le service des collections de l'aéronautique et il est le créateur, avec Charles Dollfus, du Musée de l'aéronautique de Meudon et de « L' Année aéronautique » qu’il dirige encore en 1936. Ils sont tous deux « pilotes d’aéronat » (c’est-à-dire de ballon dirigeable) et Louis Hirschauer a remporté de nombreux prix dans cette discipline qu’il pratique depuis l’âge de 15 ans.
Et
il se pourrait bien que ce portrait soit le sien (comparé à une
photographie de lui, environ à cette époque).
Au
début de l’année suivante : « Mme Louis Hirschauer, peintre officiel
du Ministère de l’Air, sous le nom de Geneviève Gallibert, vient d’être nommée
chevalier de la Légion d’honneur. Epouse de l’ingénieur en chef de
l’Aéronautique, Mme Louis Hirschauer est la belle-fille du sénateur de la
Moselle. » (Les Dernières nouvelles de Strasbourg, 12 février 1938,
p.11)
« 11 février : Promotion du ministère de l’Air : chevalier : Mme Louis Hirschauer, soit Geneviève Gallibert, peintre du ministère de l’Air, qui s’est attachée à tracer toute l’élégance des fuselages, la légèreté des plus lourds que l’air, et encore la légèreté des ciels de l’Ile-de-France, du Maroc, de la Camargue et de l’Hellade où elle se rendit pour illustrer d’un allègre burin le Demi-dieu de M. Jacques de Lacretelle, le ciel qu’elle connaît bien, ayant à son actif déjà cent heures de vol. » (Gaston Poulain, « La Quinzaine artistique », La Vie intellectuelle, 25 février 1938, p.157)
Ce qui n’empêche pas Geneviève de participer à l’exposition des FAM (Femmes artistes modernes) au mois d’avril et d’organiser le « Trente-Troisième groupe des artistes de ce temps » qui expose au Petit Palais à la fin de l’année.
« On sait que le conservateur du Petit-Palais, notre collaborateur M. Raymond Escholier, s’est proposé de faire connaître au grand public peintres, sculpteurs, graveurs, décorateurs qui représentent l’Art contemporain. Dans ce trente-troisième groupe, organisé par Geneviève Gallibert, tout est grâce, tout est séduction, depuis les miroirs fleuris, de Marie Chauvel, les terres cuites émaillées, de Mika Mikoun, les madones et les anges, si charmants et si tendres, de Mabel Gardner, jusqu’aux Crevettes roses, de Thérèse Debains, jusqu’aux compositions décoratives et aux intérieurs peints par Marguerite Louppe. Dans cet ensemble, Geneviève Gallibert s’impose par sa touche spirituelle, par ses harmonies lumineuses. » (Charles Kunstler, « Des Champs-Elysées au Boulevard de la Madeleine », Les Nouvelles littéraires, artistiques et scientifiques, 18 novembre 1938, p.7)
« Geneviève Gallibert, à qui nous devons l'organisation de ce groupe si divers et si homogène, a, elle aussi, bien de l'esprit. Ses vues cavalières de la place de l'Etoile et des Champs-Elysées, d'une mise en page si neuve, d'un accent si nerveux, raviront les amoureux de Paris. » (Raymond Escholier, « L’Art féminin triomphe au Petit Palais », Le Journal, 13 novembre 1938, p.7) Voici une vue des Champs-Elysées, plus tardive (1949) mais je n'en ai pas trouvé d'autre, puis une autre vue « en vol ».
Au
Salon d’Automne de 1938, elle expose une Jeune fille sur la terrasse et une
vue d’avion de la Baie de Villefranche. Je n’ai rien trouvé de ressemblant
dans le Fonds Marc Vaux mais voici une autre baie…
…
et une autre terrasse, vue sous deux angles différents, que je trouve particulièrement
évocatrices de ses « fenêtres ».
« Nombreuses
sont les femmes artistes dont les œuvres s’imposent, cette année, au Salon
d’automne. A une observation fructueuse de la vie, la plupart joignent une
certitude étonnante dans le dessin et une grâce exquise. C'est le cas de Jeanne
Baraduc, de Geneviève Gallibert, d’Adrienne Jouclard, d'Odette des Garets,
de Valentine Prax, d'Hélène Marre, de Madeleine Luka. » (Charles Kunstler,
« Le Salon d’Automne », Ric et Rac, 23 novembre 1938, p.5)
Le catalogue de ce Salon témoigne de son changement d’adresse. Elle habite à présent 2 rue du Château, à Boulogne-Billancourt.
Tout début 1939, Geneviève participe à une exposition collective à la galerie Pierre Worms, intitulée « Tropiques ». Il s’agit d’évoquer les beautés les « provinces » de l'Empire français, selon Mobilier et décoration du 1er janvier 1939.
Puis, comme elle le fait régulièrement, Geneviève s’installe à Vence pour l’été.
C’est là que Louis Hirschauer est décédé, le 12 septembre 1939, à cinquante-quatre ans.
Geneviève participe cependant au Salon d’Automne où l’Etat acquiert plusieurs de ses aquarelles
qui témoignent de l’évolution de sa palette.
La ville de Paris lui achète également une peinture intitulée Coucher de soleil en Camargue (Bulletin municipal officiel de la Ville de Paris, 9 décembre 1947, p.1867 – Rapport sur les acquisitions au titre de l’année 1939). Cette œuvre n’est actuellement répertoriée ni dans les collections de musées de la ville, ni dans celles du Fonds d’Art contemporain « Paris collections », où elle devrait logiquement se trouver…
Le 17 octobre 1939, « Une exposition internationale d'huiles, d'aquarelles, de sculptures et de gravures de femmes artistes de onze nations a ouvert ses portes au public au Riverside Museum, 310 Riverside Drive. La France, l'Italie, la Norvège, la Hongrie, la Tchécoslovaquie, la Pologne, la Grèce, la Suisse, les Pays-Bas et l'Australie contribuent aux 438 exemples répertoriés dans le catalogue. (…) Parmi les trente-quatre œuvres françaises présentées figurent des peintures de Marie Laurencin, Suzanne Valadon, Madeleine Luka, Geneviève Gallibert et Hermine David. Tant par les sujets que par l'approche, l'exposition offre une grande diversité. L'univers académique, l'ultramoderne et le décoratif se retrouvent parmi les œuvres présentées, soigneusement mises en valeur par les groupes nationaux dans les galeries des premier et deuxième étages du musée. Les sections française, italienne, hongroise, polonaise et tchécoslovaque sont plus vastes que les autres et présentent de nombreuses œuvres enrichissantes. » (New York Times, 18 octobre 1939, p. 34)
Rien ne dit que Geneviève s’y soit rendue personnellement. L’exposition ne suscite qu’un seul commentaire dans la presse nationale, celui de La Française : journal de progrès féminin du 1er janvier 1940… !
A cette date, Geneviève est probablement installée à Vence de façon permanente. Elle ne participe pas au « regroupement des salons » de l’année et n’apparaitra ensuite qu’au Salon d’Automne, en 1942 où elle expose une Femme assise et en 1945, avec La Pinède et La fille du Sud, saluée par L’Echo d’Alger du 6 octobre 1945.
Son
adresse est à présent le « Mas Galli », à Vence. Et voici peut-être
ce qu’elle voit de sa fenêtre…
En
1946, elle participe à nouveau au Salon des Indépendants avec un
« intéressant envoi de scènes d’aviation », selon Le Figaro du
6 juin 1946 puis, en août :
« Organisée dans un élégant hôtel de Vence, ‘’Les Palmiers’’, l’Exposition des peintres paysagistes est un intéressant essai de décentralisation artistique. (…) En aquarelle, Geneviève Gallibert donne des paysages très stylisés et, avec une palette assez simplifiée, elle rend cependant aux paysages qu’elle interprète, l’essentiel de leur atmosphère teintée. » (Ary Brezès, « Les paysages de Vence », Arts : beaux-arts, littérature, spectacles, 23 août 1946, p.5)
Même si elles datent de 1949, ces aquarelles permettent de percevoir l’évolution de son style, dans le sens d’une synthétisation.
En juin 1947, nouvelle exposition personnelle à la galerie Jeanne Castel, largement relayée par la presse nationale et locale (même si le rédacteur n’avait plus en tête le sens du mot « stigmates »)
« Geneviève
Gallibert admire Dufy. Cela saute aux yeux dès qu’on entre galerie Castel où
maintes aquarelles lavées par elle sont accrochées à la cimaise. Bonne humeur,
dessin facile, sobriété d’expression, tels sont les stigmates de ses
ouvrages. » (R.D., L’Aube, 2 juillet 1947, p.2)
Puis,
en 1948, son exposition à Cannes donne lieu à un commentaire plus intéressant
(en dépit de la « simplicité virile » !) : « Dans l’art
de Geneviève Gallibert, les lignes décidées jouent agréablement, mais au
profit d’une masse de couleurs claires. Aussi sobres que possible (et voisines
de l’élément), les teintes accusent certaine sobriété, que sert le vol d’oiseau
: de nombreuses aquarelles placent "le paysagiste" au centre d’une vue
cavalière renouvelée, et ennemie du détail qui serait précieux. A ce stade,
c’est bien la sobriété qui l’emporte, ainsi qu’un dédain évident pour la
couleur complexe et empâtée, que ne tolère l’aquarelle. Il serait vain de
parler des "festons" que donnent les formes recréés, et comme massées par la vigueur
sèche, belle, quand elle procure une sensation de relief ; quand elle assure
ses "rehauts" (Gallibert est aussi graveur) ; quand elle assemble les traits
plus accusés et qui savent se servir du "flou" : ils répondent à la vision
panoramique.
Cette
vision pourrait être l’une des clefs de l’art de Gallibert, nourri d’une vive
prédilection pour le monde extérieur. Le paysage tant décrié est soumis à la
sensibilité de qui retranscrit non des états d’âme mais des commotions. Le
style de cet artiste conduit à une méditation aussi claire que possible, à un
état panoramique, qui, par la peinture, voudrait retrouver ce que j’imagine être
le premier âge humain, fait de simplicité virile. » (René de Solier, « Gallibert, Exposition à Cannes, Galerie des Etats-Unis »,
Les Cahiers du Sud, 1er semestre 1948, n.p.)
Même
succès en 1949 : « Une aquarelliste, Geneviève Gallibert, se
distingue par les vues de Paris et du Midi qu’elle expose chez Jeanne Castel.
C’est bien notre capitale riante qu’elle exprime avec toute sa gamme de couleurs
fraîches. Son midi est intelligent. Rompant les traditions d’un ciel bleu, elle
donne toute leur vraie couleur aux grisailles des oliviers, en jouant avec le
soleil. » (Point de vue, Images du monde, 12 mai 1949, p.30)
Dans
les années qui suivent, Geneviève ne paraît plus que dans quelques expositions
où elle montre notamment une nouvelle image de Paris, comme ces vues de la
place de la Concorde…
… de la
Fontaine de Carpeaux, en haut du jardin de l’Observatoire …
…
ou du Pavillon de Marsan :
Et
elle continue à voyager, dans le sud…
… en Suisse…
… en Italie…
A la fin de sa carrière, elle sera honorée par trois expositions importantes, au Palais Galliera en 1969/70,
… à la Galerie
des Ponchettes, à Nice (novembre 1971-janvier 1972) et à la galerie Paul Vallotton de
Lausanne fin 1972.
Geneviève
Gallibert est morte à Vence, le 7 mars 1985.
Reconnue
de son vivant comme peintre de l'air et aquarelliste de talent, Geneviève est tombée dans un tel oubli qu’elle ne bénéficie
même pas, aujourd'hui, d’un article dans Wikipédia. Je ne pratique pas moi-même
cet exercice mais quiconque voudrait en créer un est encouragé(e) à piller sans vergogne toutes les références - dûment vérifiées - de ma petite notice !
*
Et voici les trois natures mortes que j'ai pu trouver :
*
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