Margaret Rose Mac Pherson est née le 29 avril 1875 à Adélaïde, en Australie du
sud. Elle est la fille aînée d’un ingénieur naval, David Mac Pherson et de
Prudence Cleverdon, sans profession. A neuf ans, en plus de ses études, elle
suit l’enseignement du peintre de paysage William Lister Lister (1859-1943).
Lorsqu’elle a dix-huit ans, elle est admise à l’école de la National Gallery of Victoria de Melbourne après avoir probablement suivi les cours d’une peintre française, Berthe Mouchette, qui s’était installée à Melbourne en 1881.
A
la mort de son père, en 1894, Rose – c’est ainsi qu’on appelle à l’époque -
rentre à Adélaïde où vivent sa mère et sa sœur, et commence à enseigner, tout
en étudiant la nature morte à la School of Design d’Adélaïde.
En
1903, elle ouvre un atelier où plusieurs futures peintres féminines suivent son
enseignement. Rose se lie d’amitié avec l’une d’elle, Bessie Davidson (voir sa
notice) et c’est en sa compagnie qu’elle part en Europe, le 2 juillet 1904.
Elle étudie un an à l'École nationale d'art pour femmes de Munich puis
s’installe à Paris en 1905 où elle expose une nature morte intitulée Oignons
au Salon de la Société nationale des beaux-arts. Elle y est inscrite sous son
premier prénom, Margaret.
En
1906, elle est à nouveau présente à la « Nationale » avec deux
huiles, Le Chiffonnier et une nature morte de fleurs. C’est donc probablement
à Paris qu’elle peint cette huile, dans son atelier.
L’année
suivante, Margaret rentre en Australie où elle reprend l’enseignement. Elle
produit à l’époque des natures mortes élégantes mais un peu académiques, comme
celle-ci :
Et
d’autres d’une expression personnelle plus affirmée :
Partageant
son atelier avec Bessie Davidson, elles organisent ensemble une exposition de
leurs œuvres au cours de laquelle Onions de 1905 est acquis par la
Galerie d’Art d’Australie du Sud où le tableau se trouve encore aujourd’hui.
Elle se lie d’amitié avec une autre de ses élèves, Gladys Reynell.
En 1911, elle reçoit une commande d’un comité de citoyens pour la réalisation d’un portrait posthume de Catherine Helen Spence (1825-1910), une prédicatrice de l’église chrétienne unitarienne, très engagée pour le vote des femmes qui était devenue vice-présidente de la Women’ Suffrage League of South Australia en 1894.
Second voyage en Europe en 1912, avec Gladys Reynell, cette fois. Elles se rendent à Londres où elles assistent à l’exposition postimpressionniste organisée par Roger Fry (voir les notices de Vanessa Bell et Dora Carrington). Elles s’installent d’abord à Paris, voyagent en Bretagne – où Margaret découvre Gauguin - et retournent à Londres au début de la Première Guerre mondiale. Là, Margaret travaille la gravure sur bois à la Society of Women Artist, apprend la poterie à la Camberwell School of Arts & Crafts et s’intéresse aux productions du groupe de Bloomsbury.
Margaret expose trois fois à la Royal Academy : Still Life : sunshine indoors en 1914, Poeticus en 1915 et Anemones en 1916, année où elle participe aussi à l’exposition d’hiver du New English Art Club avec sa nature morte d’inspiration postimpressionniste, Summer :
Margaret a aussi voyagé plusieurs fois en Irlande.
En
1915, elle emmène un groupe d’étudiants à Bonmahon, dans le sud de l’Irlande et
revient l’année suivante, pendant huit mois. L’eau-forte
ci-dessous est signée « Preston » mais on peut penser que Margaret
l’a signée plus tard, après son mariage…
Au
cours de l’été 1918, Margaret et Gladys enseignent la céramique et la vannerie
aux soldats blessés de l’hôpital Seale Hayne (Devon) puis, en 1919, Margaret
est invitée à exposer au Carnegie Institute de Pittsburg. C’est en revenant qu’elle
rencontre William George Preston (1881-1978), qui venait d’être démobilisé après
avoir servi au sein de l’Australian Imperial Force. Margaret l’épouse le
31 décembre 1919, après leur retour à Adélaïde.
Le couple s’installe à Mosman, sur la rive nord de la baie de Sidney. Will Preston travaille pour la chaine de grands magasins Anthony Hordern & Sons et gagne bien sa vie. Déchargée de toute contrainte financière par un mari qui souhaite qu’elle s’épanouisse en tant qu’artiste, Margaret expose à la Royal Art Society of New South Wales et pratique assidûment la gravure. Son style évolue, se synthétise…
… tandis qu’elle s’attache à représenter les vues de la baie de
Sidney :
Et surtout, elle commence à se laisser séduire par la flore locale et ce qu’on appelait alors l’art aborigène, sans qu’on sache très bien dans quelle mesure cet art avait déjà été transformé par le contact avec les Européens.
Dès
lors, les huiles et les estampes de Margaret explorent la faune et la flore
d’Australie, dans l’objectif de renouveler, moderniser, la nature morte et
l’étude de paysage.
En
1923, la Société des artistes de Sydney est accueillie à la Royal Academy pour
une exposition d’art australien. Margaret y participe avec une huile, Phlox
and Xmas Bells et une gravure intitulée Cockatoos, que j’évoque avec
celle-ci, réalisée deux ans plus tard.
Son
travail du portrait est également surprenant, d’autant qu’il se limite à trois
tentatives (dont son autoportrait, placé en exergue de cette notice, qui répondait
à une commande du musée qui le conserve aujourd’hui). Ici, il s’agit de Myra
Worrell, sa gouvernante, et le titre, Flapper, désigne dans les années 1920 les jeunes femmes aux cheveux coupés et qui portent des robes courtes. Le tableau est très moyennement apprécié lors de sa première exposition en 1928 : selon le musée qui conserve l’œuvre, celle-ci aurait
été qualifiée de « dure et laide » par le critique du Sydney
Morning Herald. Pourtant, ce portrait deviendra rapidement une sorte d’icône
non officielle de la « nouvelle femme » australienne !
Margaret commence à exposer avec la Society of Artists et bénéficie du mécénat de l’éditeur du magazine Art in Australia, pour lequel elle écrit de nombreux articles et qui édite son autobiographie, From Eggs to Electrolux en décembre 1927. Dans les années 20, elle est régulièrement exposée dans des galeries.
Et,
dès 1926, elle expose aussi avec le Contemporary Group des
peintures d’inspiration moderniste…
…
voire franchement « art déco », comme cette huile très graphique :
pot et vaisselle, alignés en deux diagonales parfaites, dessinent des ombres
portées très allongées où seul le petit citron vient rehausser la dominante en
noir et blanc (admirons le travail sur les reflets !)
Ses
fleurs aussi deviennent plus graphiques.
Et
on détecte même parfois une inspiration cubiste, comme avec ces Fleurs
aborigènes où la tension produite par les deux cercles convexe et
concave est tenue par les verticales noires et grises…
…
ce qui ne l’empêche pas de s’attaquer à la composition complexe de ses modèles :
ici, une fleur typique de la côte sud de l'Australie occidentale, dite :
« Corymbia ficifolia ».
Et voici les fameuses Banksia, qui symbolisent l’engagement de Margaret dans la promotion des fleurs indigènes d’Australie et sa recherche de création d’un art australien original.
Cette
inspiration vient aussi des nombreux voyages que Margaret effectue au cours des
années 20. Après la Nouvelle Calédonie et les Nouvelles-Hébrides en 1923, elle
visite les pays d’Asie du Sud-Est de 1924 à 1926, puis le Queensland – l’Etat
qui se trouve au nord de la Nouvelle Galles du Sud où elle vit - en 1927. Elle
rapporte de ses voyages de nombreuses photographies et cartes postales,
conservées aujourd’hui à la National Gallery of
Australia de Canberra.
Margaret
approfondit encore sa connaissance de la nature qui l’entoure lorsqu’elle
déménage avec son mari, en 1932, pour Berowra, alors un village à une trentaine
de kms de Sidney, près de la rivière Hawkesbury. Là, elle découvre vraiment la
brousse australienne et commence à s’intéresser progressivement à l’art
rupestre autochtone.
Inspiration
qu’elle traduit sur plusieurs supports.
J’ai
lu plusieurs fois que Margaret aurait remporté une médaille d’argent à
l’Exposition internationale de Paris en 1937. Hélas, en dépit d’une recherche
approfondie dans le catalogue, je n’ai pas trouvé son nom…
Dans les années 1940, Margaret commence à collectionner des sculptures d’artistes aborigènes comme Kalboori Youngi, Nora Nathan et Linda Craigie, trois artistes encore plus oubliées que les oubliées puisqu'on ne connaît presque rien d'elles… raison de plus pour les montrer ici !
Les deux dernières sculptures ont
appartenu à Margaret, elle en a fait don à l’Art Gallery of New South Wales en
1948.
C’est
le moment où Margaret modifie sa palette, la réduisant aux couleurs de terre, et adopte des formes simplifiées, cerclées de noir.
Puis, elle revient aux paysages et aux scènes évoquant l’art
aborigène.
Mais
elle s’autorise aussi quelques retours à la couleur !
Puis
dans les années 1950, elle produit plusieurs séries gravées, sur des épisodes
bibliques…
…
et des légendes australiennes :
Au
cours des années 1950, elle paraît abandonner ses propres références
occidentales pour explorer de plus en plus profondément son interprétation d’un
art « national australien » qu’elle voulait promouvoir. Puis sa production se
ralentit à la fin des années 1950.
Margaret
Preston est morte à Mosman, près de Sidney, le 28 mai 1963. Elle n’a jamais été
oubliée en Australie où elle a été régulièrement exposée, notamment dans les
années 1990 et récemment dans une grande exposition à Canberra, consacrée aux
femmes artistes australiennes : « Know My Name : Austrialian Women
Artists 1900 to now », en 2021.
Toutefois,
comme Bessie Davidson, elle n’a jamais fait l’objet d’exposition en Europe, au
cours des cinquante dernières années.
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